Ceci est la relation d’un amour banal et de son pouvoir dévorant.
Il m’est tombé dessus au début des années septante dans la très laide ville provinciale de P. L’objet de cet amour : celui que je puis maintenant, depuis trois ans à peine, qualifier de gars parfaitement ordinaire, mais qu’avant cela j’ai appelé dans mon for intérieur de tous les noms que le monde ait jamais inventés pour désigner tout ce qui est inaccessible et ardemment désiré, tout ce qui vous défie et déchire, tout ce qui est beau et dingue à la fois.
Son vrai nom était Z.
C’est par ces lignes que commencent Les Boîtes en carton, de Tom Lanoye. Récit des premiers émois, de la naissance du désir, du premier amour. Roman grandement inspiré de la propre biographie de l’auteur.
Tom, le protagoniste, rencontre Z. lors d’un voyage en Ardennes organisé par les Mutualités chrétiennes. Celles-ci offrent à chaque petit participant une valise en carton, et à Tom, la première boîte de son roman, donc. Première rencontre et premiers troubles pour Tom qui n’a alors que 10 ans. Tom et Z. se retrouveront deux ans plus tard dans la même école où ils noueront une amitié qui se développera sur les bancs qu’ils partagent et dans d’autres voyages : les Alpes, la Grèce. Je ne me permettrai pas d’en dire plus, car je ne sais comment raconter sans trop en dévoiler.
Outre son amour et son désir pour Z., Tom nous offre des moments de tendresse quand ils présentent les quatre femmes de sa vie (sa sœur ; Wiske, l’amie de la famille ; sa mère ; et Pit Germaine, sa tante maternelle) ; des pages jubilatoires lorsqu’il décrit sa pratique du plaisir solitaire et la manière dont il conquiert ainsi le monde, l’annexant région par région ; une amusante description du milieu scolaire, de son évolution (l’arrivée d’ensiegnants laïcs dans une institution jusqu’alors exclusivement religieuse et même l’apparition de (jolies) femmes dans le corps professoral), et bien d’autres choses encore.
Pour une première rencontre avec Tom Lanoye, je suis charmée. Et ravie que ce roman ait été traduit en français, même s’il a fallu de nombreuses années pour y arriver. J’ai été très touchée par ce récit, amusée par certaines anecdotes, j’ai apprécié la langue de Tom Lanoye et suis maintenant curieuse de découvrir celle de sa mère. Mais plus tard… J’ai d’abord besoin d’un peu de légèreté.
Tom LANOYE, Les boîtes en carton, traduit du néerlandais (Belgique) par Alain Van Crugten, Editions de la Différence, 2013
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