Ce n'est pas un raz-de-marée. Mais la résistance est là. Le Pacte de responsabilité ne séduit pas tout le monde au sein de la majorité des députés socialiste. Il y a ceux qui voteront les pieds lourds et la main hésitante. Ils n'y croient peut-être plus mais ils ont été élus députés grâce à la dynamique présidentielle de mai 2012.
Il y en a d'autres qui sont plus véhéments.
Trois au moins ont décidé de ne pas voter ce Pacte irresponsable. Christian Paul, Jean-Marc Germain et Laurence Dumont l'ont fait savoir dans les colonnes de Libération en fin de semaine dernière.
"Où est la justice quand, pour financer la baisse des prélèvements des entreprises, on envisage la baisse du pouvoir d’achat des pensions de retraite, des allocations familiales, des aides au logement et du traitement des fonctionnaires, y compris les plus modestes ?"La tribune fait mal car elle vise presque juste.
"Car il faut appeler un chat un chat, c’est bien de cela qu’il s’agit quand on gèle des prestations alors que les prix augmentent."Evidemment, cette tribune n'est pas sans arrière-pensée politique. Qui croit encore que la politique se confond avec de la philanthropie ? Les trois députés signataires de l'affaire sont qualifiés d'"aubryistes". Pour le non-initiés aux arcanes du Parti Socialiste, cela signifie qu'ils soutiennent Martine Aubry, qui n'est d'ailleurs candidate à rien depuis sa réélection à la tête de la mairie de Lille.
Mais les trois résistants touchent là où il faut. Le problème, pour ces députés, n'est pas tant le redressement des comptes que l'arnaque politique du moment.
Primo, les contreparties demandées aux entreprises bénéficiaires des exonérations sont finalement inexistantes. C'est le propre du socialisme de l'offre que de croire qu'une baisse des cotisations sociales va provoquer des embauches par millions. Partout en Europe, surtout dans les pays faibles, les marchés, qui restent la meilleur incarnation visible du Capital, exigent cette baisse du "coût du travail" pour mieux améliorer la rentabilité du capital. De surcroît, les entreprises sont incapables de garantir des embauches sur un tel long terme. Quel chef d'entreprise prendrait ce risque ? Au mieux aurons-nous des "objectifs", non contraignants, tandis que les baisses de cotisations seront actées, validées, accordées.
Secundo, répétons-le: le pacte des 50 milliards sert d'abord à baisser des cotisations et non à redresser les comptes publics.
D'autres députés socialistes ont proposé des "alternatives", preuves que l'affaire vallsienne reste mal ficelée, mal comprise. On trouve même Yann Galut, chantre de la Gauche Forte chère à Manuel Valls, qui râle son désarroi: "La politique de l'offre ne peut être financée au détriment du pouvoir d'achat des Français, estime Galut. La prolongation du gel du point d'indice des fonctionnaires pose un problème, comme lorsqu'on tape sur les prestations sociales."
La trouille d'une nouvelle débâcle ?
Dans les colonnes du Parisien, Karine Berger évoque notamment le report à 2016 de l'application du pacte de responsabilité pour les grandes entreprises (soit 3 milliards d'euros d'économies) pour financer la réindexation des petites retraites. Quid des autres prestations sociales que Manuel Valls veut geler ?
Manuel Valls a senti le boulet. Il multiplie les (petits) reculs. Ses annonces du 8 avril étaient dures à souhait pour se laisser un peu de marge de négociation interne. Une vingtaine de députés socialistes ont été rameutés pour soutenir à leur tour, dans une tribune publiée par le JDD dimanche 27 avril, le fameux pacte.
Ces atermoiements ne changent pas le fond du sujet. Le gouvernement entend bien livrer la plus importante des exonérations de cotisations sociales de la décennie.
Merci.