"Cette stabilisation est conforme à la tendance de fond observée depuis octobre 2013 : après de fortes hausses pendant cinq ans, le nombre de demandeurs d’emploi connaît une période de variations mensuelles erratiques, avec une évolution moyenne en net retrait par rapport aux épisodes précédents" (François Rebsamen, ministre du travail et de l’emploi…
"On est sur une tendance baissière" dit le Monsieur emploi du gouvernement si faussement socialiste… il y a donc même besoin d ‘inventer des mots pour dire l’indicible, l’insupportable, l’inadmissible. Utiliser des périphrases pour circonscrire la lèpre. Se gargariser d’oxymores pour ne surtout pas se sentir responsable de la tragédie humaine qui parcourt la société française depuis bien trop longtemps déjà. Car c’en est une, de Tragédie, à la grecque même, sans rire : perte de la dignité personnelle, sentiment de culpabilité et d’inutilité sociale, incorporation d’un regard qu’on imagine volontiers réprobateur des autres parents à la sortie de l’école quand on est un homme et qu’on va chercher ses gosses, questions inquisitrices de la famille à l’issue de chaque repas pour vous demander s’il y a du nouveau sur le front de l’emploi, conseils de ceux qui savent (même quand ils n’ont jamais été au chômage) comment il faut s’y prendre pour débusquer le trésor qu’est devenu un emploi salarié non précaire à temps plein, centaine de lettres envoyées en pure perte, lecture des annonces à s’en user les yeux, stages à la con qui ne servent à rien sinon à justifier l’existence et la paie depuis trente ans des travailleurs des services de l’emploi qui développent un jargon technique de nature à maquiller le vide et l’évidence (il n’y a pas d’emploi pour tout le monde, mais il ne faut surtout pas le dire), perte de l’estime de soi, dévalorisation allant jusqu"à la dépression quand cela n’a que trop duré, idées noires et envie d’en finir, destruction des liens sociaux, familiaux, puis perte des relations affectives et ruptures sentimentales quand l’emploi se fait désirer, paroles malheureuses qui font croire à la victime qu’il est l’auteur de son propre malheur alors qu’il faudrait bien davantage condamner une société qui n’est pas foutue de donner un emploi à tous, et surtout un revenu à ceux qui en ont besoin pour survivre parce qu’ils ne sont en rien actionnaires ni rentiers d’aucune manière, et qu’ils ont épuisé toutes leurs économies au fil des mois que dure l’absence d’une activité salariée qui se fait désirer au point que même cadre, on rêve d’être éboueur ou employé des pompes funèbres pour enfin retrouver le plaisir de vivre et d’exister pour quelqu’un d’autre que pour soi.
Et pendant ce temps là, depuis des dizaines d’années, toujours cette même litanie qui égrène les chiffres du chômage, sans états d’âme apparents, venant de gens qui ne l’ont jamais connu. On se prend à rêver alors qu’un jour peut être – si seulement ! - les stages de chômage seront obligatoires avant d’accéder à des responsabilités politiques de haut niveau. ça leur ferait les pieds, à ces nantis !
Mais le poids du malheur, de la noirceur et du plomb de l’inutilité sociale et surtout l’absence de revenus pour survivre (surtout quand on a des enfants qui ne comprennent pas pourquoi ils doivent se priver de la dernière console), se fait cruellement sentir… Et l’on entend toujours la même plainte hypocrite, toujours la même fausse compassion de technocrates à l’abri du besoin, toujours les mêmes certitudes imbéciles qui font dire à ceux qui n’en savent rien que quand on veut on peut et que du travail, on en trouve toujours, si l’on est courageux et pas trop difficile… Toujours cet aplomb des politiques qui savent, et qui peuvent, et qui agissent, et qui… L’envie de meurtre n’est alors pas loin, mais on préfère alors réfréner sa violence en soi, histoire de pure politesse et de convenance sociale, et donc nourrir son cancer ou son ulcère à l’estomac.
Mais chez ces gens là, on ne pense pas, Monsieur, non, on ne pense pas. On aligne des courbes et on bâtit des plans sur la comète. Et on fait croire au commentateur de la télé qu’on maîtrise la situation... je n’ai pas pour habitude d’être grossier mais…. Pauvres cons ! L’humanité souffrante vous pisse à al raie et les chômeurs(ses) qui ne sont pas des nombres vous conchient ! Vous n’êtes que des impuissants qui faites semblant d’agir, alors que nous savons tous trop bien, pour le payer de notre sueur et de nos angoisses, que les salariés et les chômeurs ne sont que les variables d’ajustement de la cupidité internationale. Alors, arrêtez de nous faire croire que vous compatissez : vous n’êtes plus crédibles. Et le chômage devient votre gagne pain, sur lequel vous cultivez l’espoir de vous faire de nouveau élire en jouant sur l’espoir de désespérés. Mais je ne vous crois plus : votre imagination est un peu trop libérale à mes yeux pour être tout à fait honnête.
Pourtant, d’autres, à gauche, savent qu’un autre monde est possible…