On se demandait ce qu’allait devenir la commissaire Edwige Marion après les sombres moments qui ont suivi sa blessure par balle à la tête (Crimes de Seine et Le jour de gloire) et les tourments qui en découlèrent. Personne ne donnait cher de sa peau, alors, et, depuis qu’elle s’en est sortie, beaucoup la considèrent comme une survivante, un peu zombie, incontrôlable. Elle a réussi à se remettre sur pied mais son cerveau continue à lui jouer des tours : pertes de mémoire, plongées dans le néant et une encombrante désinhibition sexuelle qu’elle ne parvient pas toujours à contenir ni à cacher…
Par charité et pour lui remettre le pied à l’étrier, la Crim du 36 l’a récupérée et lui a confié l’examen de vieux et gros dossiers d’affaires non élucidées. Marion s’ennuie, le terrain lui manque mais, vaille que vaille, elle fait son job. Au détour d’un PV d’audition dans l’enlèvement d’un enfant de 5 ans en banlieue parisienne quelques années plus tôt, elle tombe sur le nom d’une jeune femme qui la renvoie à une affaire très douloureuse de ses années lyonnaises. 20 ans en arrière, elle a mené l’enquête dans le double assassinat d’un couple auquel avait plus ou moins assisté leur fille aînée alors âgée de 11 ans. Un témoignage anodin ou une vraie piste ? Comment savoir, sauf à tirer un peu plus fort sur ce minuscule bout de fil qui agit comme un petit ver qui lui rongerait le cerveau. Marion laboure toutes les pistes qui se présentent, découvre qu’à Lyon, un autre enfant a été enlevé deux avant celui de Gentilly et n’a jamais été retrouvé. Lyon, encore…
Et voilà qu’à Paris, la disparition brutale d’un petit Gabriel de 5 ans dans des conditions qui semblent longuement préparées par son agresseur, met la pression à son comble. La Crim du 36 est saisie, tous les effectifs mobilisés. Sauf Marion qui reste sur le bord de la route, frustrée. Pour tuer le temps et l’amertume, elle va fureter dans les méandres de dossiers aussi gigantesques qu’indigestes jusqu’à Lyon où elle retrouve des figures qu’elle pensait ou espérait avoir oublié. Mais si notre mémoire s’ingénie à ne garder que les bons souvenirs, la réalité ne s’embarrasse pas de scrupules. La vie ne fait de cadeau à personne, Marion l’apprend un peu plus à chaque étape de cette histoire rythmée par le retour sur l’enquête de l’assassinat des époux Bergman en 1994 et assaisonnée de scènes cocasses dans des lieux de débauche.
Après deux livres où Marion était plutôt absente, en tout cas physiquement, j’ai voulu la remettre en scène, dans une histoire qui représente une transition avant la suite de ses aventures. C’est une nouvelle Marion, en quelque sorte, qui, pour avoir frôlé la mort, ne pense plus comme avant, ne réagit plus comme avant. Elle admet enfin ses faiblesses, ses lâchetés et décide de les affronter.