An Pierlé Strange Ways Tour, un marathon: fin 2013, les édifices religieux: chapelles, églises, collégiales...début 2014, reprise du périple dans les salles conventionnelles avec une longue escale en France, puis le retour dans nos plates contrées: Saint-Trond, le Spirit of 66 et ce mercredi une étape à Uccle, 't Candelaershuys, une scène qu'elle avait foulé en début de carrière, il y a fort longtemps.
Du monde, ce soir, un Steinway trône sur le podium exigu, par quel tour de force a-t-il abouti dans la demeure bourgeoise?
D'une démarche altière, An Pierlé traverse la foule, grimpe sur l'estrade, affiche un sourire carnassier et pousse un énorme soupir, c'est parti.
Pas de pause, 'Wrong things done' et ses méandres encaissés nous projette des images de Kate Bush.
Désolé pour ceux qui étaient venus en espérant assister à un concert désinvolte, s'excuse la belle dame avant d'entamer la version sublime du 'Such a Shame' de Talk Talk.
La Gantoise s'est appropriée le titre pour le façonner à son image.
Sur 'Strange Days', le tourbillonnant 'Winds' et ses accents Regina Spektor. Prise d'un accès de fureur brusque, la dame tourmentée écrase théâtralement les touches du grand piano.
Une vieillerie pour le plus beau des hommes, Corto Maltese, 'High on the tower', mouvements violents ou apaisés se succèdent, la plage finira de manière abrupte.
Eblouie l'assistance, ayant retenu son souffle, applaudit à tout rompre.
Après le décès de mon bompa, ma grand-mère a fait le même rêve pendant six longs mois, son mari l'appelait, ils se trouvaient tous deux sur les berges opposées d'une rivière, pour rejoindre l'homme aimé, la vieille dame, qui n'avait jamais appris à nager, plonge dans le cours d'eau et se fait emporter par les courants, ce songe m'a inspiré 'Cold Winter', une plage aux arômes Jean Ray.
Quels sont les démons ayant pris possession de son âme et de son cerveau, telle une damnée elle s'époumone, 'This burning', et nous donne la chair de poule.
Aucune faiblesse, ce titre au background asiatique et enjolivé d'un sifflement fleuri a séduit l'audience.
Le torturé 'Solid rain' traite des aléas d'une relation amoureuse qui dure.
Une maîtrise vocale incomparable, un jeu irréprochable et une présence scénique charismatique: la classe à l'état pur.
'How does it feel'
Pourquoi vois-tu Lennon chantant 'How do you feel' en pensant à Paulo?
Un clin d'oeil...en fait ma musique est bénéfique pour les dépressifs et devrait être remboursée par la mutuelle.
Voici un titre plus joyeux, il traite du bombardement de Dresde, 'Suburban skies'.
Le terme chef-d'oeuvre n'est pas usurpé.
Une explication intéressante, comment aborder le sujet, je ne suis pas Cohen, ni Dylan, finalement j'en ai fait une version Marianne Faithfull en prenant le point de vue d'un pilote de bombardier larguant ses projectiles meurtriers sur la ville qui, pour lui, ressemblait à une maquette.
Sans seul souci était de savoir s'il reverrait sa bien-aimée.
Sentiment de culpabilité?
None!
Elle poursuit avec 'Weather chemistry' une berceuse agitée à laquelle elle accouple 'You just wait' et ses effets de voix hasardeux.
Le mélodrame orageux 'The house of sleep' met fin au set.
Rappel,
Un enfoiré m'a piqué la partition du formidable requiem 'Cold Song' que Klaus Nomi avait emprunté à Purcell.
Un chant liturgique intense, profond, tout en halètements qui te cloue sur ton siège.
Le récital prend fin avec son 'hit' alternatif, 'Mud Stories', qui reçoit un traitement loufoque avec un impromptu pour souhaiter un happy birthday à un spectateur ravi.
Talent, créativité, originalité, virtuosité, charme ...ajoute ce que tu veux, An Pierlé est tout simplement une grande interprète!
photos: JP Daniels