La maladie mentale: La confrontation de 2 experts sur la question
Suite à mon récent article concernant le trouble de la personnalité au Québec, je retourne faire une incursion judiciaire en milieu de maladie professionnelle dont beaucoup de travailleur sont victimes et dont la CSST ou la Commission des lésions professionnelles met des bâtons dans les roues de ces employés ayant eu un accident de travail ayant causé une lésion mentale.
À mon avis le médecin expert oublie très souvent sa vocation première soit soigner les gens aux détriments d’une somme d’argent pour aller raconter n’importe quoi devant les tribunaux.
Regard sur le trouble d’adaptation au travail
L’histoire est bien simple, un travailleur subit un accident au travail lui causant un trouble d’adaptation et un débat judiciaire s’ensuit afin de déterminer qui à raison entre le travailleur et l’employeur
Afin de trouver une réponse à la question regardons l’expertise de 2 experts hautement reconnus soit le Doc Mailloux et la nouvelle coqueluche de TVA, le docteur Gilles Chamberland.
M.B. et Compagnie A
[1] Le 5 septembre 2007, monsieur M… B… (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 24 juillet 2007 à la suite d’une révision administrative.
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[5] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a subi, le ou vers le 20 avril 2007, une lésion professionnelle lui donnant droit aux prestations prévues à la loi.
GILLES CHAMBERLAND
[78] Le 23 juillet 2007, le travailleur est examiné par le docteur Gilles Chamberland, psychiatre, à la demande de son employeur.
[79] Un premier commentaire s’impose quant à la durée de l’entrevue qui est établie par le docteur Chamberland de 13 h 30 à 14 h 50. La preuve testimoniale est tout autre. En effet, le travailleur s’est présenté à l’évaluation accompagné de monsieur F…. Les deux témoins sont catégoriques, l’entrevue avec le docteur Chamberland n’a duré que 30 minutes tout au plus.
[80] De toute évidence, il semble que le docteur Chamberland ait inclus l’étude du dossier à l’intérieur de la durée de l’entrevue.
[81] Dans le cadre de la revue du dossier, le docteur Chamberland fait état des nombreuses expertises exigées par l’employeur ou l’assureur dans le cadre des invalidités pour épisodes dépressifs en 2002 et 2005. Ces absences ont eu lieu en raison de difficultés d’ajustements du travailleur dans sa vie personnelle.
[82] Il résume ainsi une expertise du docteur Lionel Béliveau du 24 septembre 2002. Il poursuit avec un résumé de l’expertise du docteur Jacques Gagnon du 16 décembre 2002 dans laquelle il lui était difficile de poser un diagnostic précis. Il considère toutefois que le travailleur a passé une phase dépressive manifeste avec présence d’idées suicidaires et une humeur dépressive. Cette condition lui apparaît en partie rétablie. Il note : « probable que le travailleur ait consommé de l’alcool suffisamment pour que cela ait contribué au tableau dépressif. » Pour lui, il s’agit d’un individu qui a des difficultés chroniques d’ajustement dans sa vie personnelle. Dans le cadre de son plan de traitement, le docteur Gagnon recommande dans un premier temps, une abstinence complète quant à la consommation d’alcool et de drogues et de la médication en conséquence.
[83] Le docteur Chamberland reprend avec le rapport psychiatrique subséquent du docteur Gagnon, effectué le 23 mai 2003, dans le cadre duquel il note une amélioration clinique de l’état du travailleur. Son discours semble moins rapide, mieux structuré. Il précise qu’il n’a pas d’indice que le travailleur abuse d’alcool ou de drogues en ce moment.
[84] Il poursuit avec le résumé de l’expertise du docteur Sylvain-Louis Lafontaine du 6 juin 2005. Ce médecin diagnostique un trouble de l’adaptation avec anxiété et ajoute qu’il ne croit pas que le travailleur fait des épisodes dépressifs incurables, mais qu’il a plutôt des difficultés d’adaptation suite à des événements de vie particulièrement difficiles. De même, il ne peut mettre en évidence aucune dépendance à l’alcool ni aux drogues. Il considère le travailleur apte à reprendre son travail sans restriction.
[85] Dans sa nomenclature des faits, il est à noter que le docteur Chamberland ne parle aucunement de l’événement du 20 avril 2007. Il ne traite aucunement d’ailleurs des lettres du travailleur complétant sa « Réclamation du travailleur » dans laquelle il fait état des nombreux événements.
[86] Le docteur Chamberland limite son étude aux faits décrits par madame V… Br… dans une lettre adressée à la CSST datant du 1er mai 2007.
[87] À l’histoire de la maladie actuelle, le docteur Chamberland constate que lorsque le travailleur parle des événements survenus le 20 avril 2007, il s’effondre en pleurs lorsqu’il relate ces faits. La colère est palpable, le travailleur parle avec des associations relâchées de son patron au travail, un sentiment de persécution et ressentiment face à ce qui lui a été dit par le directeur de l’usine à l’effet qu’il a eu un cancer par sa faute. Lorsqu’il aborde ce sujet, il devient ému et sur le bord des larmes.
[88] Encore une fois, le docteur Chamberland ajoute que la collaboration du travailleur est déficiente tout au long de l’entrevue et qu’il est obstructif dans ses réponses. Il eût été intéressant de connaître les raisons pour lesquelles le docteur Chamberland juge les réponses du travailleur obstructives. Le docteur Chamberland diagnostique une maladie affective bipolaire, épisode actuel en phase mixte. Il diffère son diagnostic quant aux traits de personnalité ou troubles de personnalité. Selon lui, les épisodes dépressifs bien documentés antérieurement militent en faveur d’un trouble de l’humeur en phase mixte chez une personne qui souffre d’une maladie affective bipolaire. Selon lui, le travailleur nécessite une prise en charge importante sur le plan thérapeutique.
[89] Quant à la question de consommation d’alcool ou de drogues, il juge qu’elle est présente dans le cas du travailleur. Il ajoute qu’il ignore si le travailleur a consommé des drogues pouvant entraîner des atteintes permanentes de ses capacités. Il juge des propos du travailleur au niveau de sa consommation comme étant totalement non fiables. Il va même jusqu’à prescrire des tests appropriés pour s’assurer que le travailleur n’a pas consommé de drogues pour une période d’au moins trois mois lors de l’exercice du droit de retour au travail.
LE DOCTEUR MAILLOUX
[95] Le 29 septembre 2009, le docteur Mailloux, psychiatre, soumet un rapport d’expertise à la demande du travailleur. Ce rapport fait suit à sept rencontres s’échelonnant du 25 mars 2008 au 11 mars 2009 pour un total d’au moins 7 heures d’évaluation. Le docteur Mailloux dispose de l’expertise du docteur Chamberland et de sa revue du dossier complet du travailleur.
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[99] Selon le docteur Mailloux, tous ces faits sont des stresseurs objectivement traumatisants pour un être humain, peu importe la situation endogène de l’individu.
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[102] À la suite de cette revue de faits, le docteur Mailloux commente l’expertise du docteur Chamberland. Selon lui, le docteur Chamberland utilise les consultations psychiatriques antérieures à des fins de discréditer le travailleur. Toutefois, il est indéniable suivant ces expertises antérieures que le travailleur a vécu quelques périodes difficiles dans sa vie.
[103] Le docteur Chamberland commet également des erreurs dans les périodes concernant les périodes d’arrêts de travail ou plus précisément celle relative au cancer qui, selon ce dernier, a nécessité un arrêt de travail du mois de février 2006 au 14 avril 2007. Le docteur Mailloux ajoute que le docteur Chamberland banalise l’événement traumatisant du 20 avril 2007 rapporté par le travailleur. Quant au diagnostic, le docteur Mailloux ne comprend pas que le docteur Chamberland puisse poser un diagnostic de trouble psychotique de maladie affective bipolaire avec un épisode actuel en phase mixte alors que, selon toute vraisemblance, le travailleur n’a jamais été psychotique. Il note également que le travailleur a toujours nié avoir consommé des drogues et qu’il n’y avait aucun début de preuve contraire à cet égard. Le travailleur se dit profondément blessé par cette insinuation qu’il qualifie de malicieuse.
[104] Le docteur Mailloux conclut que le travailleur ne souffre d’aucun trouble de l’humeur ni de trouble idéique. Selon lui, le travailleur n’a jamais présenté de symptômes psychotiques. Le travailleur demeure bouleversé par une histoire traumatisante qui l’a affecté psychologiquement. Il diagnostique un état de stress post- traumatique chronique, consécutif aux harcèlements et aux propos extrêmement blessants qu’il a vécus à son lieu de travail, dépassant largement ce que tout être humain peut subir sans voir son intégrité psychique solidement ébranlée. À l’axe II, il ne retient aucun diagnostic.
[105] Le docteur Mailloux témoigne également à l’audience. Il explique qu’il a dû avoir plusieurs rencontres avec le travailleur en raison de son extrême émotivité, mêlant son exposé des faits. À l’occasion du processus d’évaluation, le docteur Mailloux rencontre un ami, un ancien collègue du travailleur, de même que sa conjointe.
[106] Il décrit le travailleur comme une personne bien et ayant un bon style de vie. Le docteur Mailloux ne comprend d’ailleurs pas les raisons pour lesquelles le docteur Chamberland croit que le travailleur consomme des drogues illicites, ce que le travailleur et son entourage nient de même que les psychiatres qui l’ont vu en 2002 et 2005.
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[109] Dans le résumé des expertises antérieures effectué par le docteur Chamberland, un des psychiatres conclut à un trait narcissique. Le tribunal note que le docteur Chamberland s’abstient sur cette question. Le docteur Mailloux explique que la conclusion de l’existence d’un trait de caractère prend plusieurs heures d’évaluation, ce qui explique l’absence d’une opinion du docteur Chamberland à cet égard et qui rend peu probante l’opinion du psychiatre intervenu dans le passé sur ce point.
[110] Le docteur Mailloux est d’avis que le travailleur ne présente pas de trait narcissique. En effet, le travailleur n’accorde pas d’importance indue à son « soi », il n’est pas égocentrique et n’occupe pas toute la place dans un contexte social. Le travailleur n’a donc rien de narcissique.
[111] Le docteur Mailloux est catégorique, il n’y a aucun trouble de personnalité contributif à la problématique survenue en avril 2007.
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[116] De dire à un individu qu’il a fait exprès d’avoir un accident d’automobile ou un cancer alors qu’il s’est battu pour vivre, dépasse le cadre normal de l’exercice du droit de gérance de l’employeur.
Pour lire le jugement: M.B. et Compagnie A
En conclusion
Imaginons que le travailleur n’aurait pu enquérir une contre expertise du docteur Mailloux et posons la question à savoir les répercussions des écrits et propos du docteur Chamberland qui lui tel qu’il appert du jugement n’a vu le patient qu’environs 30 minutes
30 minutes qui aurait eu de graves répercussions sur les droits du travailleur.
30 minutes qui bafouait un honnête travailleur à quel prix payé par un employeur ?
La preuve qu’un diagnostic peut avoir de bonne comme mauvaise conséquence devant la justice!