Via de la Plata. Étape 24: poulpes, eucalyptus et... Santiago!

Publié le 22 avril 2014 par Sylvainbazin


Je suis  arrive a Santiago, comme prevu donc, après une bien belle derniere journee sur cette Via de la Plata. Une etape que j'ai vraiment appreciee.
Je n'avais pourtant pas tres bien dormi, et la, etant donne que j'avais un bon lit et que j'etais seul dans ma chambre, je ne peux accuse des ronfleurs ou une literie suspecte d'avoir perturbe mon repos reparateur (mes deux nuits les plus penibles durant ce voyage furent cependant celles que j'ai passe au premier etage de lits suspendus: ils n'y avait aucun garde-fous et comme j'ai tendance a gigoter en dormant, j'avais peur de degringoler ce qui aurait ete bien embetant! ). Non, c'est sans doute juste que j'etais trop fatigue pour bien dormir. J'ai du boire 1 litre d'eau ou pas loin.
Mais heureusement je ne me ressens pas trop de ce manque relatif de sommeil. Je ne cherche pas, c'est vrai, a me depasser physiquement aujourd'hui, mais je ne me sens pas mal du tout. Assez pour marcher d'un tres bon pas, voire même pour trottiner quand le terrain descend. Ce n'est pas si mal, après plus de 20 jours tout de même bien fournis en kilometrage, sac au dos et sur un parcours pas si facile que ca. Assez pour apprécier le paysage, ce qui est bien l'essentiel.
C'est un paysage qui me plait et me convient particulierement bien. C'est vallonne, on peut même dire que le denivele n'est pas negligeable, mais ca reste tres doux. De belles forets peuplees de chenes et d'eucalyptus, principalement, avec quelques pins. Des fougeres, de la mousse. On sent un pays vert et bien arrose. Dans les villages, les jardins debordent de fleurs de glycines. Je vois mes premieres roses de l'année. Cette douce campagne possede pour moi un air vraiment familier. Je m'y sens bien, chez moi. Je pourrais vivre ici sans doute.
C'est ainsi, mais je pense finalement que la nature et le paysage qui nous a impregne lorsqu on était enfant garde une place particuliere dans nos coeurs, dans notre sensibilite. En tous cas, chez moi c'est ainsi. Je suis "admiratif", parfois fascine par d'autres natures, d'autres milieux. Le desert, la haute-montagne me semblent des mondes extremes et possedent leurs beautes, leurs attirances. Mais ces royaumes de pierres ne sont pas, même si j'aime les rencontrer, les affronter parfois, les miens. Une nature plus hospitaliere, un paysage plus bucolique, m est plus aimable et je m'y sens sans doute mieux, pour vivre et même pour courir et marcher. L'effort s'accorde de cette douceur. J'aime aussi sentir la mer pas trop loin, parfois, et ici, on sent sa proximite.
Du coup cette derniere journee, malgre un temps qui a definitivement tourne a la pluie, me parait vraiment belle. Je vais bien. Contrairement a la veille, mon moral est bon. Je suis content d'arriver au terme de ce beau voyage et d'en profiter jusqu au bout. Ca me fera du bien, demain, de ne plus courir et marcher avec un sac sur le dos. Et puis je pense au retour de facon plus positive. Tant de belles personnes a voir et a revoir, a mieux connaitre. Rien qu'en rentrant, mon casse-tete consistera a choisir (selon la fatigue et mes capacites materielles) vers quelle invitation j'irai le prochain weekend. Ca m embete de ne pouvoir repondre a toutes favorablement. Ce genre de choix est plutot bon signe!
Et puis, j'ai encore tant de beaux projets a mener. Les chemins prevus cette année, celui qui m animera sans doute une grande partie de 2015. Et puis tant d'autres choses a mener qu'il ne devrait pas manquer de belles choses dans cette vie que je tente de mener au plus pres de mes aspirations.
Alors oui, c'est d'un pas allegre et allégé que je vogue vers Saint-Jacques.
L'etape n'est pas tres longue, mais encore bien vallonnee. Une descente bien marquee mais agreable me fait degringoler jusqu a Puente Ulla, le point le plus bas de mon parcours, a peine 100 metres d'altitude.
Après, bien entendu, ca remonte un peu. Je suis finalement en forme et pourrai presque pousser directement jusqu a Santiago, mais la faim m attire tout de même jusqu a un bar de bord de route, signale a une centaine de metre du chemin, a un croisement.
Il ne paye pas de mine, il faut même (comme souvent en Espagne ou l'eclairage n'est pas pousse a fond pour dire "c'est ouvert!" et que les fenetres des cafes sont celles d'habitations normales en terme de format) pousser la porte pour se rendre compte que l'etablissement est bel et bien ouvert.
Mais une fois a l'interieur, je suis bien accueilli. La patronne est tres aimable, attentionnee même. Pour le menu, c'est facile et elle ne me laisse pas le choix: ici, on mange du poulpe. C'est un bar-pulperia. Donc, c'est logique. Alors, va pour le poulpe.
Je n'avais pas encore goute a cette grande specialite gallicienne, ca tombe donc tres bien pour cette derniere etape! Ici, le poulpe, ca se mange un peu assaisonne et pimente, avec des petits piques a aperitif. Et c'est bon.
Après ce sympathique et authentique dejeuner, je repars tranquillement pour les huit derniers kilometres de mon periple.
Ils restent bien agreables. La campagne s'etend presque aux portes de la ville et c'est donc un chemin tranquille qui m amene a Saint-Jacques.
Sans doute par inadvertance, j'arrive a perdre le balisage juste avant d'entrer dans la vieille ville et je finis donc mon voyage en tournicotant un peu avant de retrouver la grand place et la cathedrale. La pluie, qui s'était calmee, redouble et l'une des tours est sous un grand échafaudage. La photo d'arrivee sera donc moins belle qu'il y a deux ans, mais qu'importe. Je suis content d'etre a nouveau la, après ce nouveau chemin.
C'est donc fini. Je flane un peu dans cette belle ville a l'atmosphere bien particuliere, avant de trouver mon hotel. Je vais pouvoir la visiter tranquillement demain, car cette fois je ne repars pas vers Fistera. Cela me semblait moins logique que lors de mon premier voyage et je n'ai pas envie de retracer mes pas.
Comme après une course, on repere facilement dans les rues ceux qui viennent du chemin: le pelerin porte des tenues de trekking, des chaussures de marche, des runnings ou des sandales. Certaines demarches sont tres fatiguees. Je croise des asiatiques et des anglais qui boitillent.
J'ai une pensee pour tous ceux que j'ai rencontre sur le chemin, qui je l'espere vont terminer leur voyage bientôt, et dans la joie. Ulrich ne doit pas etre loin, Alix et son papa non plus. Mon irlandais encore plus pres peut-etre. C'était bien de partager ces quelques pas, ces discussions, même fugaces. Je ne fait que passer mais j'aime ces rencontres du chemin.
J'ai aussi une grande pensee pour vous tous qui me lisaient jour après jour. Le savoir me fait avancer, aussi. Merci a tous pour vos encouragements, pour vos petits mots. Un grand merci également a ma famille, qui me soutient toujours, et a mes partenaires, Via Compostella, Chamina et Terres d'Aventures sans qui je ne pourrai etre la a vadrouiller et a vous raconter mes peregrinations. Merci a mes amis, a ceux aussi, je pense notamment a Serge et a Sebastien, qui m ont apporte des critiques constructives par rapport a l'ecriture de mon premier livre. Merci a tous ceux qui m aident a progresser, je pense, dans tous les sens du terme.
Merci a ma doctoresse pour ses conseils podologiques et ses encouragements.
Je vais pouvoir laisser un peu mes pieds (qui vont mieux déjà) se reposer, avant de repartir vers de nouvelles aventures. Et, je le sais déjà, je reviendrai sans doute encore a Santiago, toujours par une autre voie, seul ou pas, mais cette destination bien particuliere et les chemins qui vont avec n'a pas fini de m attirer.