Armand Frédéric MICHEL est né le 1er mai 1880 à Beauclair, arrondissement de Montmédy, canton de Stenay dans la Meuse. Beauclair est une petite commune de 200 habitants, limitrophe des Ardennes, à 90 km de Reims.
Peintre décorateur, il a un degré d’instruction générale noté : 3 par le conseil de révision. Une lettre conservée dans la famille en atteste et renvoie indirectement au travail des instituteurs de la Troisième république pour qui l’apprentissage de la lecture et une bonne orthographe étaient des priorités.
Il est donc de la classe 1900, matricule 844 au bureau de recrutement de Reims car il habite Reims, au 129 rue Gambetta, à l'époque de son recensement. Il fera une demande de dispense car il avait dû tiré un numéro pour 3 ans, un mauvais numéro. En effet, son père, disparu, n’habite plus, au moment de la conscription, avec sa femme. En tant que soutien de famille (suivant l'article 22 de la loi de 1889), Armand ne va donc partir pour ne faire qu'un an au lieu de trois.
Il est appelé le 14 novembre 1901 au 161ème régiment d’infanterie de Saint-Mihiel dans la Meuse, et affecté à la 7ème compagnie. Il est placé en disponibilité le 21 septembre 1902 et reçoit son certificat de bonne conduite.
Portrait d'Armand réalisé à Saint-Mihiel (sans date).
Le 20 juin 1903, le conseil de révision de la Marne le déchoit de ses droits à dispense pour un motif qui nous restera inconnu, sans doute à cause du remariage de sa mère. Il doit donc achever son service, avec les recrues de la classe 1900 qui ont fait trois ans en tout. Il est donc rappelé au 161ème RI, 7ème compagnie le 1er juillet 1903 et mis en disponibilité le 20 septembre 1904 avec un certificat de bonne conduite (et de 2 !), document de la plus haute importance pour trouver un emploi.
Armand passe dans la réserve de l'armée d'active le 1er novembre 1904. Son registre matricule indique une première affectation au 361ème Régiment d'Infanterie, régiment de réserve du 161ème R.I. qui devait aux termes du journal de mobilisation, se constituer à Reims, lieu de repliement, pour la mobilisation, du régiment actif dont la portion principale était à Saint-Mihiel.
Armand se marie le 4 octobre 1905 avec Camille Victorine Raulet dite Jeanne (6 mars 1880 - 20 février 1964).
Armand et Jeanne eurent quatre enfants : Hélène en 1906, Jean en 1907, Louis appelé Charles en 1912 et Albertine appelée Reine en 1914.
Le 20 juillet 1906, ils habitent 120 rue Gambetta à Reims, au moment de la naissance du premier enfant Hélène, puis au 129 rue Gambetta, le 10 septembre 1909. Ils y sont encore lors du recensement de 1911. Les mentions « peintre » et « patron » nous indique qu’il est artisan peintre décorateur ; Nous savons aussi que sa femme tient une droguerie, marchand de couleurs comme on disait à l’époque.
Le 4 août 1914, au troisième jour de la mobilisation, Armand rejoint, comme indiqué dans son livret individuel miliaire, le dépôt commun du 94ème et 294ème régiment d’infanterie de Bar-le-Duc, caserne Excelmans dans lequel servaient des Ardennais, des Meusiens du Barrois et beaucoup de Rémois. Il est affecté à la 29ème compagnie de dépôt du 294ème RI avant de partir en campagne.
Armand Michel est ensuite affecté à la 2ème section, 17ème compagnie, 5ème bataillon, du 294ème régiment d’Infanterie de réserve. Formé à deux bataillons, le régiment quitte Bar-le-Duc et entre en campagne le 9 août sous les ordres du Lieutenant Colonel Duperrier. Il fait partie de la 56ème D.I. - 111ème Brigade.
Nous ignorons quand exactement, Armand entre lui en campagne. Son registre matricule ne donne pas l'information. Il est resté à Bar-le-Duc un temps puis rejoint le régiment « en campagne » plus tard pour le renforcer, probablement après les hécatombes d’août. Le 16 août on lui adresse encore du courrier à Bar-le-Duc. L'indication "29e compagnie, dépôt" est importante : elle confirme qu'il n'est pas parti immédiatement sans quoi il aurait averti sa famille de lui écrire à sa nouvelle compagnie.
A-t-il participé aux combats de Senlis dans l'Oise en septembre 1914 ? Sur l'Aisne ? Autour de Beuvraigne ? Le 1er novembre, après l'arrivée de renforts et un peu de repos, le régiment arrive en Artois. La présence en Artois d'Armand est attestée par sa correspondance : A lire ICI
Un an jour pour jour après le début de la mobilisation, Armand écrit à sa mère. il dresse à la fois un court constat et nous montre que sa vie d'avant ne l'a pas quittée :
Sa mère tenait un magasin « à la poterie du Nord » 138 rue Gambetta à Reims.
«… pour ma permission, c’est probablement...du 15 au 20 courant car je suis remonté dans les tranchées et je n’en redescendrais que vers le 12… » Nous ignorons s’il a eu cette permission. Ce serait sans doute la dernière fois que la famille l’aurait vu.
La photo ci-dessous pourrait avoir été prise à cette occasion :
Le 6 septembre 1915, le 294e RI quitte l'Artois et, par étapes, rejoint le front de Champagne où Joffre a préparé une grande offensive pour la fin du mois de septembre. Les hommes s'en doutent, ils en seront : (cliquez sur le lien)
Offensive de Champagne, septembre-octobre 1915
138 000 soldats français tués, blessés et disparus. Parmi ces derniers, Armand Michel.
8 octobre ?
Armand Michel est porté disparu le 8 octobre 1915, selon la plaque familiale apposée dans le monument ossuaire de la ferme de Navarin. Pour qu'un soldat soit déclaré mort, il fallait que de l'attaque, reviennent deux témoins pour l'attester. Faute de quoi il était déclaré disparu.
Dans le registre matricule, on trouve la mention « signalé sur avis n° GL 1267, émanant du Ministère de la Guerre en date du 11 janvier 1916, comme étant décédé le 25 octobre 1915 à Souain ». Ces avis étaient transmis au maire de la commune qui en avisait personnellement (lui ou son représentant) la famille que le soldat avait demandé de prévenir. L'avis est également signifié aux autorités qui tiennent le registre matricule. A partir de là, la mairie peut établir des "actes de décès". Ce qui permet à la famille d'ouvrir la succession. Armand est déclaré officiellement Mort pour la France à la date du 25 octobre 1915 par le jugement rendu le 7 mars 1919 par le tribunal de Reims et transcrit le 11 mai 1919 à l’état civil à Reims. Le jugement dit « qu’aucun acte n’a été dressé pour constater son décès ». La date du 25 octobre figure sur trois documents officiels.
25 octobre ?
Le régiment était en repos depuis le 10 octobre. Ce qui peut accréditer la thèse d'une blessure ou d’une maladie (crise cardiaque ?) qui lui coûtera la vie plusieurs jours plus tard. Charles un fils d’Armand évoquait le témoignage tardif dans ce sens de Marcel Batreau, né le 28 mars 1895, qui habitait 2 rue de l’Ecaille et fut apprenti chez Armand Michel. Ancien combattant de 14-18 et résistant du quartier Saint-Remi à Reims pendant la Seconde Guerre mondiale, il évoquait une crise cardiaque. Par ailleurs, Marcel Batreau témoigna de la grande guerre dans le documentaire : « Le siècle de Verdun, documentaire de Patrick Barberis, France, 2006, Coproduction : ARTE France, Image et Compagnie ».
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Article extrait des écrits de Jean HENRI (janvier 2011) Le parcours du combattant de la guerre 14-18
Ce paragraphe est lui-même extrait du site d'Arnaud Carobbi : combattant.14-18.pagesperso-orange.fr/
Les photos et documents proviennent de la famille, du site CNDP/crdp-reims et du site Mémoire des Hommes
Mise en ligne pour Reims 14-18 : Béatrice Keller, d'après combattants.14-1/.pagesperso-orange.fr/