Un mécanisme spécifique du cerveau qui contribue à prévenir la distraction en « écartant » du champ visuel les objets non signifiants, c’est la découverte de 2 psychologues de l’Université Simon Fraser (Canada). Ces travaux présentés dans le Journal of Neuroscience pourraient bien révolutionner la prise en charge du trouble du déficit de l’attention et hyperactivité (TDAH).
Dans un environnement visuel encombré de données multiples et en constante évolution, les humains doivent ignorer certains stimuli non pertinents pour la tâche à accomplir. John McDonald, professeur de psychologie et son étudiant John Gaspar –qui préparait sa thèse sur le sujet- révèlent comment notre cerveau, grâce à ce mécanisme de suppression, évite d’être distrait par des informations non pertinentes alors que nous nous concentrons sur un élément ou une tâche donnée.
L’équipe du Dr McDonald et d’autres scientifiques avaient déjà identifié l’existence d’un mécanisme de suppression neuronal, en 2009, mais sans bien comprendre son rôle de protection anti-distractions visuelles. Des données récentes de neuro-imagerie, rappellent les auteurs, indiquent que la capacité de prévenir cette distraction dépend du niveau de l’activité de contrôle de l’attention dans le cortex frontal, mais le mécanisme précis de ce contrôle reste mal compris.
Ici, les chercheurs ont mené plusieurs expériences au cours desquelles 47 étudiants, âgés en moyenne de 21 ans, devaient accomplir une tâche d’attention visuelle nécessitant une recherche. Pendant ce temps, les chercheurs enregistraient l’activité électrique du cerveau à partir de capteurs embarqués dans un casque, correspondant aux processus neuronaux liés à l’attention, à la distraction et à la répression de la distraction. Ils identifient une activité cérébrale de suppression des éléments distrayants même si ces éléments sont situés dans le même champ visuel que la cible poursuivie. Ils montrent également que l’action de recherche est écourtée « automatiquement » lorsque la cible est erronée et n’est en fait qu’un élément « distracteur », suggérant qu’un mécanisme de suppression vient réduire la saillance visuelle des éléments qui pourraient détourner de la tâche principale.
Ce petit délai nécessaire à évacuer des éléments visuels, venant perturber l’information principale, ou cible, a déjà été décrit lors d’une récente étude de neuroscientifiques américains, publiée dans PLoS ONE. Les chercheurs montraient que nous pourrions même moduler au mieux ce délai d’évacuation ou de réflexion pour prendre de meilleures décisions…
Sélectionner les données pertinentes et supprimer les données perturbantes : Ce sont des avancées importantes pour les neuroscientifiques et les psychologues car si la plupart des recherches sur l’attention portent justement sur les processus du cerveau impliqués « dans cette cueillette des objets pertinents du champ visuel », ce n’est, en réalité, « qu’une partie de l’équation », ajoute l’auteur : Il faut également un mécanisme de suppression des objets non pertinents. C’est donc une autre voie qui s’ouvre pour traiter les personnes ayant des déficits d’attention liés à la distraction.
Alors que la distraction est l’une des principales causes de blessures et de décès, qu’il existe des différences individuelles dans la capacité à faire face à la distraction, il existe un vrai besoin de programmes d’entraînement, par vidéo, qui contribuent à renforcer ces 2 capacités. C’est aussi une nouvelle piste thérapeutique que celle de la suppression des signaux perturbants, qui s’ouvre, pour prendre en charge les troubles associés à des déficits d’attention, le TDAH mais aussi la schizophrénie.
Source: Journal of Neuroscience 16 April 2014 doi: 10.1523/JNEUROSCI.4161-13.2014 Suppression of Salient Objects Prevents Distraction in Visual Search