Pourquoi n'ai-je pas lu Féerie pour les ténèbres avant ? Les rioteux ont emporté la réponse dans l'En-dessous...
Pourtant j'en ai entendu beaucoup de bien, et de nombreuses fois. On parle d'un roman parût il y a presque dix ans aux éditions Nestiveqnen, repris en intégrale par le Belial il y a deux ans, et enfin paru en poche chez J'ai lu ce printemps. Il m'a donc fallu l'observer de loin tout ce temps avant d'emporter un exemplaire avec moi dans le métro et de dévorer cette gourmandise fantasyste envoûtante.
Cette Technole vous dit vaguement quelque chose ? C'est ce qu'il y a de plus tangible pour nous dans cet univers où vivent sous-terre des mutants mutilés que l'on nomme "les rioteux", morceaux de chair amputés qui parlent par tous les orifices sauf la bouche et qui sont méprisés et craints des humains, où des Féeurs prodiguent leur magie à la cour du roi et peuvent voltiger corps et âmes au fin fond de la terre et cracher des maléfices mortels avec des formules ésotériques, où des ratruandières, méduses carnivores, s'accrochent aux ponts et terrifient le voisinages, et où des grobes-muçotes dévorent le ventre des petits-enfants.Je vous épargne un peu plus de ce langage technique propre à Féerie pour les ténèbres, issu de l'imaginaire débordant, foutraque et un brin pervers de Jérôme Noirez, d'une part pour ne pas trop vous égarer, mais surtout parce que je ne serais pas capable de retranscrire correctement ses mots, son langage poétique et ses dialogues fleuris qui mêlent habilement érudition, humour et épouvante. Car oui, il y a pas mal de passages abominables dans Féerie pour les ténèbres, si vous avez peur d'histoire de mutilations et souffrez d'entendre parler de sang, d'os et de chair en décomposition, sachez que Féerie pour les ténèbres peut heurter un poil vos sens.Mais quand je parle de la langue de Jérôme Noirez, je déconne pas les gars, il a cette capacité à faire des phrases qui semblent rouler sur votre langue quand vous les répétez à voix hautes, des phrases où vous vous dites "ce type est un génie", car c'est à la fois beau et écrit et terriblement monstrueux. Et surtout : c'est drôle ! J'ai ri un nombre de fois incalculable grâce à cette verve gouailleuse qui imprègne tout le texte. C'est certainement ce qui permet pour moi au texte de ne pas tomber totalement parfois dans le scabreux et l'intolérable, c'est cet humour absurde qui transparaît dans la personnalité des personnages tous plus attachants les uns que les autres (big up à Quinette), dans les dialogues et dans l'élaboration entière de son univers, et qui rend chaque retournement de situation cocasse, apportant du rire là où germe l'horreur. Alors voilà, j'ai terminé le premier volume, car il y en aura deux en poche, et j'ai hâte de lire la suite, pour me replonger dans les étranges aventures de ces héros rocambolesques légèrement frappés du bulbe, finis à la pisse et parfois même pas entier... mais les héros d'un monde hors norme totalement fascinant.
Alors monsieur Jérôme Noirez, je n'avais lu - du temps de mon apprentissage où je m'occupais des romans pour ados - que Fleurs de dragon, qui m'avait enchanté, mais alors là je suis conquise, et dans mon panthéon des auteurs de fantasy, vous vous hissez à la place d'Odin. Et j'espère bien, la prochaine fois que sort l'un de vos livres, vous rencontrer dans ma future librairie.Sur ce, après ce gros shoot de bonne littérature, je vais passer ma descente en finissant Nos étoiles contraires, du talentueux John Green, qui m'avait déjà fait voir trente-six chandelle avec son coup de poing Qui es-tu Alaska, et qui me fout à nouveau la pâtée.
Ps : le blog de Jérôme Noirez, qui vaut le détour ! : http://jeromenoirez.over-blog.com/