Galerie de portraits
"L’exposition rassemble une galerie de portraits, des figures mythologiques de l’Antiquité tels Achille ou Prométhée, aux supers héros de la culture populaire et des fictions, en passant par des héros plus contemporains tels un jeune insurgé du Printemps arabe ou un couple d'heureux ‘mariés pour tous’ prenant les traits des artistes." Ces deux artistes ont pour pratique la réalisation de photographies peintes ensuite à la main. Dans des décors construits grandeur nature dans leur atelier, ils mettent en scène leurs proches, anonymes ou célèbres (Julie Depardieu, Arielle Dombasle, Isabelle Huppert, Karl Lagerfeld...).
Le succès international des artistes jalonné d'expositions à travers le monde (New muséum de New-York, Muséum d'art contemporain de Shanghai, Maison européenne de la photographie à Paris notamment) valorise une démarche qui surfe sur le mélange quelque peu grinçant d'un kitch aux traits forcés revisitant les mythologies anciennes ou contemporaines. "L'imagerie populaire, comme l'imagerie classique, nous intéressent. Dans l'art, il n'y a pas de bon ou de mauvais goût. L'art provoque, dérange, fait réfléchir, pose des questions" explique Gilles Blanchard, un des membres de ce duo et couple.
Un art qui dérange ?
On peut aisément se laisser séduire par un second degré savamment cultivé aussi bien avec les héros de l'antiquité que les People actuels. J'ai, pour ma part, plus de mal à adhérer à l'idée d'un art "qui dérange". Dans l'ensemble des pratiques de la peinture, ne serait-ce que depuis la seconde moitié du vingtième siècle, les propositions n'ont pas manqué pour déranger, que ce soit sur un plan d’une analyse de la peinture que sur ce lui d'un engagement militant pour les causes de son époque. Pierre et Gilles,avec leurs œuvres certes drôles, certes malicieuses, me semblent davantage, au regard des tensions du monde, partir en guerre avec un pistolet à eau couleur rose bonbon.
La liberté des artistes reste le bien le plus précieux. Pierre et Gilles et leurs choix artistiques s'expriment avec cette liberté non négociable. Pour autant, la lecture que nous pouvons être amenés à faire de leurs photographies peintes relève également de cette même liberté. Il y a deux ans, la galerie Daniel Templon présentait les peintures de Kehinde Wiley pour lequel je manifestais ma perplexité. C' est un sentiment du même ordre qui nait ici au sujet des héros de Pierre et Gilles.
La galerie évoque, au sujet du duo "la tradition de Georges Méliès" : "Il créent pour chaque œuvre une ambiance originale grâce à des artifices et accessoires et un jeu complexe de lumière et de cadrage". Peut-être faudrait-il aussi mettre en relation leur pratique actuelle avec l'époque d'un Nadar qui, au-delà de ses avancées révolutionnaires pour la photographie, recevait dans son studio toutes les célébrités artistiques pour réaliser leur portrait photographique ?
Pierre et Gilles sont en phase avec un univers où art, mode, glamour, merchandising, médias se fondent dans un même consensus flou.
Il ne reste plus pour les personnages consentants ou involontaires sur lesquels s'exerce leur second degré qu'un univers désuet pour héros fatigués.
Photos: Galerie Daniel Templon
Pierre et Gilles
Héros
10 avril - 31 mai, 2014
Galerie Daniel Templon
Paris - 30 rue Beaubourg