Tom à la Ferme // De Xavier Dolan. Avec Xavier Dolan, Pierre Yves Cardinal et Lise Roy.
Un film de Xavier Dolan c’est toujours quelque chose que j’attends toujours comme le messie. Et je ne me trompe pas. En effet, ses films sont des vrais oeuvres d’art. Depuis J’ai
tué ma mère je suis tout simplement sous le charme de l’empreinte de ce réalisateur, réussissant à capturer de vrais moments de vie. Il peut être à la fois charmeur, tendre et violent. Que cela
soit dans la mise en scène ou bien dans les dialogues. Je serais tenté de dire que Tom à la ferme est son meilleur film depuis J’ai tué ma mère. Occupant tous les terrains
(réalisateur, scénaristique, acteur, monteur, producteur, costumier), il permet à son film d’avoir sa propre identité. On sent qu’il y a une part de Xavier Dolan chez Tom. Adapté
d’une pièce de théâtre de Marc Michel Bouchard, le film débute sur une magnifique reprise de Les Moulins de mon Coeur pour s’achever sur une note beaucoup plus sombre. Le film
joue énormément sur les on-dits, sur les personnages troublants que l’on a du mal à cerner, sur la jalousie, sur la violence, etc. Il y a plein de sentiments balayés durant tout ce film et c’est
Pierre Yves Cardinal qui va donner le rythme.
Un jeune publicitaire voyage jusqu'au fin fond de la campagne pour des funérailles et constate que personne n’y connaît son nom ni la nature de sa relation avec le défunt. Lorsque le
frère aîné de celui-ci lui impose un jeu de rôles malsain visant à protéger sa mère et l'honneur de leur famille, une relation toxique s'amorce bientôt pour ne s'arrêter que lorsque la vérité
éclatera enfin, quelles qu'en soient les conséquences.
Francis, de son nom dans Tom à la Ferme, est un personnage ravagé. A la fois par la jalousie envers son frère qui a pu vivre une vie qu’il aurait aimé vivre lui aussi, mais aussi
par une part particulièrement sombre. Petit à petit la pression monte et le personnage devient de plus en plus effrayant. On se laisse donc bercé par la mélodie de cette histoire sans jamais
réussir à décrocher, notamment car l’atmosphère se veut de plus en plus folle et assourdissante. Le but est clairement de plonger le spectateur dans un univers psychologiquement fort où tout se
rétrécie petit à petit. En effet, les lieux sont de moins en moins denses et Xavier Dolan n’hésite pas à changer le 16/9e pour le Scope afin de se concentrer sur les regards et
le côté claustrophobe de l’histoire. Il y a aussi quelque chose d’intéressant dans le cheminement de la filmographie du réalisateur. On passe de l’adolescent en pleine à crise, à l’adolescent qui
découvre l’amour, puis à l’adulescent qui se cherche entre l’homme et la femme à quelque chose de particulièrement brut et sauvage, très adulte et sombre.
Il est vraiment difficile de voir où est-ce que ce film veut aller à chaque minute qui passe. On se questionne donc sur chaque chose que l’on peut voir. C’est ce qui rend le tout encore plus
intéressant. On ne sait pas ce qu’il y a derrière la tête de Francis mais encore moins derrière celle de Tom (qui est certainement le personnage le plus étrange et mystérieux du film).
Xavier Dolan n’hésite pas à faire de Tom à la Ferme un chef d’oeuvre hitchcockien, n’hésitant pas à assumer ses références. C’est bourré de bonnes choses et l’on
en ressort émerveillé car la tranche de cinéma que l’on voit est si authentique que l’on en a le sang glacé. Plus le temps passe et plus l’on a l’impression de nous aussi vivre ce que semble
vivre Tom, une sorte de syndrome de Stockholm, fasciné par la violence du personnage mais pas pour autant intimidé. Tom à la Ferme est un film singulier qui s’éloigne du côté
onirique des deux précédentes oeuvres du réalisateur (et notamment de Les Amours Imaginaires). Le monde est ici rustre et cruel, celui d’un Québec que l’on n’a pas le chance de
voir tous les jours non plus au cinéma.
Note : 10/10. En bref, l’une des claques de l’année. Et Pierre Yves Cardinal sa révélation.