C’est le plus grand drame de ma vie : je n’arrive pas à garder mon argent bien au chaud sur mon compte en banque dès lors que je franchis la porte d’un vendeur-de-musique. Disquaires indés, grandes surfaces "culturelles", internet et même vide greniers, tout y passe, et la carte trépasse. Une maladie dont de moins en moins de gens sont atteints, paraît-il. C’est pas grave, je compense la crise à moi toute seule.
Et c’est pour les cigales équipées comme moi qu’a été inventé le Record Store Day / Disquaire Day. Mais pas que. C’est surtout pour soutenir nos très chers disquaires, sans qui nous ne serions musicalement pas grand chose, que chaque année se tient cet événement.
Les éditions se suivant et la fréquentation ne faisant qu’augmenter, l’appat du gain en a poussé certains à créer leur shop (très) éphémère (coucou certains labels), ou à rejoindre le mouvement, alors même que c’est justement un peu contre eux que ce mouvement a été lancé (coucou certaines chaînes de magasins culturels qui arborent fièrement pancartes et banderoles). Mais passons.
C’est donc en m’étant jurée de ne rien dépenser que je fonçai dès (midi passé) le matin, tête baissée, chez Total Heaven, LE disquaire indépendant bordelais. L’affluence était là, tout le monde prêt à dénicher LA perle du jour. Après quelques minutes de traque, le constat était sans appel : non seulement je n’allais pas ressortir bredouille de cette affaire, mais en plus, le Grâal se tenait là, droit, sans bouger, derrière les bacs. Il n’attendait qu’une chose : que quelqu’un l’attrape. Ne pouvant résister devant tant de détresse (mes fesses ouais), je le soulevai, le retournai, et le reposai dans la seconde au vu de son prix. Pour ne pas me faire plus de mal, je filai vers la caisse en quatrième vitesse et essayai de m’éloigner le plus vite possible de l’objet des convoitises. Petit passage chez Mollat pour trouver un 45T qui n’était pas ou plus chez Total Heaven …
Et deux heures plus tard, c’est en courant que je rappliquai chez eux, succombant finalement (deux heures, c’est très long) à l’appel du Grâal.
Des achats sans réfléchir le plus souvent, mais jamais regrettés. Et cette année n’a pas échappé à la règle. 140€ dépensés pour deux 45T, un 12" et un coffret 5 33T, mon oeuvre de charité s’est avérée plus onéreuse que prévu. Beaucoup plus. Un peu trop d’ailleurs … Eh merde.
Après ce petit moment de flottement, il fallait quand même passer à l’essentiel : écouter de la musique.
The Dodos, un de mes coups de coeur que j’ai pu croiser l’année dernière en concert, ont été rejoints par le Magik*Magik Orchestra, pour enregistrer de nouvelles versions de "Substance" et "The Ocean", parues sur leur dernier album.
L’objet est assez joli, sobre, le vinyle, bien que pas parfaitement rond (le diamant était content … ), arbore fièrement un orange aussi éclatant que le son qui en sort. Les nouveaux arrangements ne font que sublimer des morceaux à l’origine excellents, contrat rempli donc pour ce petit (mais costaud) 45T. Et le petit plus : un code pour télécharger les versions digitales des morceaux … Parfait !
À écouter : la version réarrangée de "The Ocean"
À écouter : "Porpoise Song" par Django Django
Le résultat : une sorte EP/12" en anglais et français (Bertrand Belin oblige) qui te cloue par la beauté et la simplicité des compositions que l’on y retrouve. Y’a des guitares, des violons, des pianos, et c’est beau, vraiment beau, délicat, c’est la perle de ce Disquaire Day. Celle qu’on est fier d’avoir dégotée, et qui va être soigneusement rangée parmi les disques les plus précieux de la ‘tite Justine. Mais avant, la face A va passer en boucle dans mes oreilles pendant des jours …
À écouter : j’aurais bien voulu vous faire découvrir "Oh it’s on again", mais elle ne risque pas d’apparaître sur internet. Je peux juste vous dire qu’on y retrouve H-Burns au chant, et l’incontestable finesse de composition de Jonathan Morali. D’ailleurs, ce vinyle confirme une fois de plus l’adage "Jonathan Morali sur la pochette, beauté dans les oreilles".
Puis, vient le Grâal.
LCD Soundsystem. James Murphy (aka mon deuxième dieu après John Frusciante). La chose parle d’elle même. 300 exemplaires en tout, 5 vinyles, presque quatre heures de live, et pas n’importe quel live, puisque c’était le dernier du groupe, enregistré au Madison Square Garden, il y a à peine plus de trois ans, avec pour special guests Arcade Fire et Daft Punk (enfin, leurs chansons). Une folie que seuls les fans (ou les vrais tarés, ou les deux) peuvent s’offrir. Il fallait bien ça pour se consoler, et pour essayer de revivre leur concert à Rock en Seine en 2010, qui était épique.
À écouter : "Losing My Edge"