N’ayant jamais été un obsédé linguistique, je n’en ferai pas un drame. Mais quand même, j’ai la méchante impression que les principaux oubliés de la campagne électorale actuelle (en Belgique) seront les Francophones de Flandre. C’est finalement assez logique : la 6e Réforme de l’État règle beaucoup de questions et il n’y a plus trop matière à revendication. Pourtant, ces Francophones – dont je suis – sont toujours là.
Ils ne sont d’ailleurs pas une petite minorité qu’on pourrait ignorer. Les recensements linguistiques étant interdits en Belgique, il est impossible de savoir combien de personnes parlent français, comme première langue, tout en habitant en Flandre. Les estimations tournent entre 300 000 et 370 000. Ce qui fait quand même 5,9% des Flamands !
Bon nombre d’entre eux habitent dans des « communes à facilités » et bénéficient donc d’un régime spécial, même si les autorités flamandes ont plutôt tendance à ignorer celui-ci. Mais je ne veux pas parler ici de ces facilités, dont je ne bénéficie pas. Je souhaite simplement attirer l’attention sur ces milliers de gens qui – comme moi, je le reconnais – parlent avant tout français tout en habitant en Flandre, en s’y trouvant fort bien d’ailleurs.
Ils n’ont aucune revendication particulière parce qu’avant tout ils savent très bien qu’ils vivent dans une région dont la langue principale n’est pas la leur. Quoi de plus normal donc de s’exprimer en néerlandais lorsqu’ils sont en contact avec les autorités ou les administrations publiques. Depuis plus de 27 ans que je vis en Flandre, cela ne m’a jamais posé le moindre problème, même si je fus confronté à différentes situations cocasses. Il faut dire que – comme beaucoup de ces francophones – je vis dans une région « frontalière » et que les langues se mélangent sans problème quand il le faut.
Alors, de quoi me plains-je ? J’ai simplement peur que les Francophones de Flandre soient définitivement oubliés, qu’on fasse comme s’ils n’existaient pas ou plus, qu’on tourne la page. Je n’entends plus aucun politique demander que la Flandre avalise enfin la « Convention-cadre pour la protection des minorités nationales ». Ce n’est bien sûr ni essentiel ni vital. Les Francophones continueront à exister sans cela. Mais ce serait mieux si c’était le cas.
Je ne vais pas en faire un plat. Je ne suis même pas sûr de voter pour l’« Union des francophones », tellement cela me semble peu important eu égard aux grands défis auxquels les Belges sont confrontés, dont tout simplement celui de maintenir le concept de « solidarité » comme base première de notre société. C’est loin d’être gagné ! Pourtant, cela seul compte !
N’empêche, j’ai un peu l’impression d’être ignoré dans une dimension elle aussi essentielle, celle de ma culture.
Si vous êtes arrivé jusqu’ici, vous vous demandez peut-être encore pourquoi ces trois jolies jeunes-filles servent d’illustration à ce billet, sans aucune prétention ! Ce sont simplement trois candidates lors de l’élection 2014 de Miss Belgique. Aucune des trois n’a gagné, mais elles avaient ceci en commun : Coralie, Anissa et Morgane sont des Francophones de Flandre. La bizarrerie était qu’elles figuraient parmi les 12 candidates francophones – sur les 24 candidates admises en finale – tout en habitant respectivement Dilbeek, Dworp et Strombeek. Mais finalement, tout le monde s’en fout…