Oasis a fait une entrée très remarquée en 1994 grâce à leur tout premier opus intitulé Definitely Maybe. Je vous fais visiter les lieux qui ont mené à sa création.
2014 marque le 20e anniversaire de la parution d’un album qui allait avoir l’effet d’une bombe dans le paysage rock n roll dès sa sortie. À l’époque, le Royaume-Uni était de retour au centre de l’attention musicale grâce à la britpop, le mouvement culturel que des groupes comme Suede et Blur avaient mis au goût du jour l’année précédente en mélangeant le rock populaire avec une forme de fierté nationale britannique. À ce moment, il s’agissait en quelque sorte d’un retour aux sources pour les groupes anglais alors que tous les regards étaient auparavant dirigés vers le grunge de Seattle.
Definitely Maybe est un album que Noel Gallagher, auteur-compositeur d’Oasis, a écrit sur la route, dans son appartement, dans des locaux insalubres de répétition et dans certains studios de Manchester. Noel s’inspirait de sa jeunesse, son imprudence, son envie de vivre et de conquérir le monde. Ces thèmes ont été habilement mélangés à la musique des groupes qui l’ont inspiré : notamment les Beatles, T.Rex, The Stone Roses et The Jam. Cette musique est soutenue par le petit frère Noel et frontman du groupe, Liam Gallagher, qui livre les paroles avec attitude, désinvolture et parfois avec douceur.
Pourquoi cet album a-t-il été si marquant ? C’est une œuvre qui a du mordant, qui est bien construite et qui est inspirante à sa propre manière. Elle nous transporte pendant une cinquantaine de minutes dans un concept musical symbolique d’une jeunesse de classe ouvrière qui rêve d’émancipation dans tout ce qu’elle a de rock n roll, d’arrogante et de fascinante.
Afin de souligner cet anniversaire important, je propose de vous transporter dans les lieux mythiques qui ont mené à la création de cet album classique. Ces lieux que j’ai personnellement eu la chance de visiter l’été dernier lors d’un court passage à Manchester, en Angleterre, sont encore bien vivants.
La maison familiale des Gallagher
C’est ici que tout a réellement commencé. C’est dans ce logement de Burnage, à Manchester, que Peggy Gallagher s’est réfugiée avec ses trois jeunes fils (Paul, Noel et Liam) en pleine nuit en 1984. Elle voulait offrir à ses fils une meilleure qualité et vie et ainsi fuir son mari de l’époque qui s’avérait souvent violent envers les membres de sa famille. C’est dans cette maison que Noel a appris par lui-même à gratter des accords sur une guitare acoustique de seconde main.
Suite au succès monstre qu’a connu le groupe fondé par deux de ses fils, Peggy est restée humble et a toujours refusé de déménager dans une plus grande et luxueuse demeure. Elle aimait son quartier et son voisinage. Elle y habite encore aujourd’hui.
Sifters
« Mister Sifters sold me songs when I was just sixteen » Shakermaker, Oasis, 1994
Situé à quelques minutes de marche de la demeure des Gallagher se trouve le magasin de disques Sifters. Noel et Liam y ont passé de longues et précieuses heures à éplucher la musique qui s’y trouvait.
Lors de l’écriture de Definitely Maybe, il pouvait leur arriver d’être pris de court à la dernière minute avec des paroles incomplètes. C’est en route vers le studio pour enregistrer Shakermaker qu’ils ont finalisé les paroles de celui-ci. Ils sont passés devant le commerce en voiture et y ont inclus « mister Sifters sold me songs when i was just sixteen » pour rendre hommage à cet endroit qui a marqué leur adolescence et qui a grandement contribué à leur émerveillement pour la musique.
Le propriétaire se rappelle très bien de l’époque où les frères Gallagher venaient errer dans son magasin et lui posaient des questions sur les nouveautés du moment. Ce fameux propriétaire est encore à ce jour derrière le comptoir du commerce et il est bien sympathique. Si jamais vous avez la chance d’y aller et de le croiser, il se fera un plaisir de vous partager certains souvenirs de leurs passages. En guise d’hommage et de fierté envers ses célèbres clients, ce dernier affichait les posters du groupe parmi les nombreux autres qui tapissaient les murs du disquaire. Bon nombre d’entre eux sont encore présents aujourd’hui. Il suffit d’y entrer pour le constater.
Flat de Noel Gallagher
C’est dans ce logement du Greater Manchester que Noel a habité durant sa jeune vingtaine alors qu’il était roadie pour le groupe mancunien Inspiral Carpets. Lorsque le band était en pause, Noel y passait de longues heures à y jouer de la musique, à pratiquer et à consommer des drogues. C’est dans ce flat qu’ont pris naissance quelques-uns des morceaux qui allaient figurer sur la liste de chansons de Definitely Maybe. On raconte que Noel y faisait jouer de la musique très fort et que les voisins le trouvaient dérangeant.
The Boardwalk
Alors que Noel était au beau milieu d’une longue tournée en Europe avec Inspiral Carpets, il a passé un coup de fil à sa mère qui réclamait de ses nouvelles. Celui-ci lui a alors demandé ce qui se passait avec son frère Liam. Elle lui a répondu qu’il allait très bien et qu’il était maintenant chanteur d’un groupe de musique rock qu’ils avaient nommé Oasis. Étonné, Noel s’est par la suite rendu à un de leurs spectacles dans une petite salle du coin. Il les a trouvé plutôt ordinaires, mais trouvait qu’il y avait tout de même quelque chose à faire avec eux. C’est à ce moment qu’il s’est dit que ce serait peut-être l’opportunité pour lui de présenter les chansons qu’il écrivait pendant ses temps libres. Liam a demandé à son frère ce qu’il pensait de son groupe. Il a répondu qu’ils étaient corrects, sans plus, mais que s’il faisait partie du groupe, il pourrait les emmener au sommet du monde. Les membres du groupe, Bonehead, Tony McCarroll, Guigsy et Liam, ont finalement accepté. À partir de ce moment, Noel faisait partie intégrante du band et Oasis commençait à pratiquer et répéter ses chansons de manière intensive. Quelques mois plus tard, ils donnaient leurs premiers spectacles au Boardwalk, une petite salle de Manchester.
Malheureusement, en 1999, le Boardwalk a été vendu. Il est désormais un immeuble à bureaux.
Flat de Bonehead
Ce petit logement vous dit quelque chose ? Il semble très banal, mais vous l’avez probablement déjà vu. Il s’agit du flat dans lequel le guitariste Paul Arthurs AKA Bonehead habitait au début des années 1990. C’est un endroit où les membres du groupe aimaient se retrouver pour jammer, fumer, boire et écouter de la musique. C’est dans ce logement qu’a eu lieu le shooting photo qui allait servir de pochette à l’album.
L’intérieur a l’air de ceci :
Lorsqu’on fait le tour du bloc et qu’on accède à l’arrière du building, on se trouve dans la petite cour de Bonehead. C’est à cet endroit qu’Oasis a tourné une bonne partie du clip de Shakermaker. Les lieux ont quelque peu changé depuis le tournage.
Tous ces lieux ont contribué à façonner et inspirer les chansons d’un album qui, par ses thèmes universels et sa musique brillamment ficelée et accrocheuse, a su traverser l’épreuve du temps. Suite à la diffusion du premier single Supersonic dans les radios au printemps 1994, Oasis a su attirer l’attention de milliers de fanatiques de musique. Les deux singles qui ont suivi, Shakermaker et Live Forever, n’ont fait qu’accroitre l’engouement autour du band. L’album est finalement paru en magasins le 30 aout 1994. 86 000 copies de l’album ont trouvé preneur en Angleterre lors de la première semaine, L’opus s’est rapidement trouvé en première position des palmarès. À l’époque, c’était le debut album le mieux vendu dans l’histoire de la musique britannique. Le succès était autant populaire que commercial : les critiques de presque toutes les plateformes musicales louangeaient cet album. Il a taillé une place de choix à Oasis un peu partout dans le monde. Il a ensuite mis la table pour la suite des choses.
20 ans plus tard, Definitely Maybe est maintenant perçu comme un classique. C’est un album qui n’a pas perdu une once de son énergie. Que ce soit les premières notes de Rock ‘N’ Roll Star qui sont toujours aussi exaltantes et saisissantes, l’excitante désinvolture de Cigarettes & Alcohol, la puissance de Bring it on Down ou encore la sensibilité de Slide Away, tout est en place pour créer une œuvre sans failles. C’est un album que les générations plus jeunes se plairont à découvrir. On peut d’ailleurs le retrouver dans toutes sortes de palmarès qui célèbrent les albums marquants faits par des médias musicaux bien établis tels que le Rolling Stone, Q, NME, Uncut et bien d’autres. C’est un album qu’on peut placer dans sa collection de disques près des Abbey Road, Exile on Main Street, Never Mind the Bollocks et autres. À découvrir ou redécouvrir. Une piece d’anthologie.