Avant, la couleur verte était celle qui me faisait démarrer au feu, celle à cause de laquelle les portes s'ouvraient vers un lieu où je n'avais pas envie d'aller. Maintenant, je noie mes regards dans l'océan vert tendre des champs de blé du printemps qui ondulent dans le vent.
Avant, il n'y avait pas de fleurs. Je tentais en vain de débusquer le moindre éclair de verdure au milieu du béton. Aujourd'hui, mes chemins quotidiens sont bordés de l'or des champs de colza qui brillent sous le soleil.
Avant, je m'extasiais du lever du soleil rouge au-dessus des tours de la Défense, mais cette grosse boule était aussi inquiétante, irréelle, science-fictionnelle. Aujourd'hui, la nature autour de moi est apaisée et les nappes blanches des brouillards matinaux remplacent celles, acides, de la pollution.
Avant, les seuls reliefs qui se présentaient à moi étaient les mirages des montagnes dont le filtre menteur formait un rempart à la laide réalité. Maintenant, je navigue sur des collines qui n'ont rien à envier à la Toscane.
Avant, je n'avais comme repère temporel que les jours et les nuits qui s'égrainent à une cadence mécanique et les vacances qui se succèdent, vides de sens. Maintenant, les paysages se dessinent au rythme des saisons, tout change imperceptiblement à chaque instant. Mes yeux ébahis assistent à une redécouverte permanente de ce qui m'entoure.
Avant, je vivais dans la peur.
Aujourd'hui, je vis.