« De retour à Londres, après un long séjour aux Etats-Unis, le jeune climatologue Adam Kindred sort à peine d'un entretien d'embauche pour un poste à l'Imperial College que ce spécialiste des nuages voit son existence basculer brutalement : témoin inattendu du meurtre d'un homme dont il venait de faire connaissance, Adam se retrouve la cible de tueurs à gages et poursuivi par la police. Dépouillé de tout ce qui le définissait - sa carrière, sa réputation, son passeport, ses cartes de crédit, son portable et même ses vêtements -, le voilà contraint d'entrer dans la clandestinité et de rejoindre la horde de ces laissés-pour-compte condamnés à vivre totalement en marge de la société. »
L’écrivain aborde ici le thème des vies qui peuvent basculer d’un instant à l’autre, Adam jeune homme à l’avenir prometteur se retrouve à la rue, recherché par la police et poursuivi par un tueur mystérieux mais aussi les magouilles de l’industrie pharmaceutique pour mettre un nouveau médicament sur le marché. Pour décor il a choisi Londres et plus précisément les bords de la Tamise, toujours présente, au premier ou second plan ; si le touriste y verra un point de vue romantique, pour Adam Kindred ce ne sera pas un long fleuve tranquille.
C’est le second roman de William Boyd que je lis et ici encore j’en sors aussi étonné que ravi. Etonné, parce que je pourrais dresser une longue liste de critiques : il ne faut pas être trop pointilleux sur l’intrigue policière et sa crédibilité, il y a beaucoup de digressions et un suspense mou, la vie de SDF n’est pas si difficile que cela si on suit le parcours d’Adam Kindred « Il s’émerveilla lui-même de son aptitude à s’adapter, presque à s’épanouir dans ce monde hostile et sans pitié ». Ravi aussi pourtant, parce que le roman se lit avec une facilité déconcertante, on ne s’ennuie jamais, envoûté par l’écriture bien rythmée mais sans urgence, d’une simplicité désarmante pour le lecteur, faite de chapitres courts alternant les personnages. Une écriture maitrisée, signe d’un bon écrivain.
William Boyd est l’archétype de l’écrivain « confortable », à trop vouloir décortiquer ses romans je n’y trouve rien de réellement remarquable – et quand je lis ou écoute les analyses faites par les professionnels je les trouve exagérées - mais pourtant je prends énormément de plaisir à le lire. Boyd, jamais exceptionnel mais toujours pourvoyeur de bonheur pour le lecteur.
« Je sais ce que Kindred fait, dit-il calmement d’un ton égal, en se renfonçant sur son siège. Je l’ai compris en l’attendant. Il a vécu là-bas, près de ce pont, depuis des semaines… Juste en se tenant à carreau. Il n’est pas stupide : il ne fait rien, il n’y a donc pas de trace. Pas de chèque, pas de factures, pas de notes, pas d’appels sur portable – cabines téléphoniques uniquement -, pas de cartes bancaires, du liquide – rien. C’est comme ça qu’on disparait au vingt et unième siècle – on refuse simplement d’y participer. On vit comme un paysan au Moyen Âge : tu mendies, tu voles, tu dors sous un buisson. Voilà pourquoi personne ne pouvait le trouver – même pas la foutue Brigade criminelle au complet de la Metropolitan Police. »
Traduit de l’anglais par Christiane Besse