« Berlin, 1942. Bernie Gunther, capitaine dans le service du renseignement SS, est de retour du front de l’Est. Il découvre une ville changée, mais pour le pire. Entre le black-out, le rationnement, et un meurtrier qui effraie la population, tout concourt à rendre la vie misérable et effrayante. Affecté au département des homicides, Bernie enquête sur le meurtre d’un ouvrier de chemin de fer néerlandais. Un soir, il surprend un homme violentant une femme dans la rue. Qui est-elle ? Bernie prend des risques démesurés en emmenant cette inconnue à Prague, où le général Reinhard Heydrich l’a invité en personne pour fêter sa nomination au poste de Reichsprotektor de Bohême-Moravie. »
Second roman de l’écrivain que je lis et je reconnais tomber sous le charme de ce Bernie Gunther habilement créé par Philip Kerr. Un policier allemand opérant durant la seconde Guerre Mondiale au milieu des SS et Gestapistes, il fallait y penser. Si Bernie relève de la fiction, le roman est truffé de personnages ayant réellement existé comme ce Reinhard Heydrich, parmi d’autres, et l’intrigue policière se glisse avec maestria au cœur d’évènements historiques avérés, ce qui renforce l’épaisseur du roman. Philip Kerr connait parfaitement son sujet, outre les notions historiques, il parsème le texte de références à la culture allemande, le bouquin jouant alors sur deux tableaux, une enquête policière et un enrichissement de notre culture générale.
Pour ce qui est de l’intrigue, de bonne facture, Prague fatale s’inscrit dans la lignée des polars à la Agatha Christie ou mieux encore, Gaston Leroux, puisqu’il y est question d’un assassinat par balles dans une chambre close ! Donc, je résume, un décor historique riche et instructif, une intrigue policière bien menée où Bernie Gunther découvrira qu’il n’est qu’un pion au milieu d’un plan machiavélique, et j’ajouterai l’humour dévastateur de Kerr, noir et acerbe, d’autant plus paradoxal que l’époque et les lieux ne s’y prêtent pas à priori - le nazisme et l’extermination des Juifs – au travers de réflexions lâchées ici ou là comme « D’après nos services de renseignements, certains de ces Tchèques sont de sacrés pickpockets. J’opinai. Ca me paraissait de bonne guerre, étant donné que nous leur avions piqué leur pays. » Et je ne résiste pas à cet autre exemple « Mais elle avait quitté cet emploi – un excellent emploi – parce que, prétendait-elle, il n’arrêtait pas de la tripoter. Une situation fâcheuse que je comprenais parfaitement. Je ne pouvais m’empêcher de la tripoter moi aussi. »
L’impayable Bernie n’a certainement pas fini de me réserver de bons moments de lecture, ce dont je remercie par avance Philip Kerr.
« - Être mort, c’est comme être une putain, affirma Hamperl. On passe l’essentiel de son temps sur le dos pendant que quelqu’un d’autre – moi, dans le cas présent – fait le travail. La procédure peut sembler embarrassante, parfois même légèrement ridicule, mais elle n’a rien de répugnant. A toute personne n’ayant encore jamais assisté à une autopsie, je conseillerais d’essayer de ne voir que le côté cocasse de la chose. Si cela commence à avoir l’air répugnant, alors c’est le moment de quitter la pièce avant qu’un incident se produise. L’odeur d’un cadavre est en général suffisamment désagréable sans avoir à supporter celle du vomi. Est-ce clair ? »
Traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Philippe Bonnet