EXPOSED
Drama // 42 minutes
Ecrit par Charles Randolph (La vie de David Gale, Love et autres drogues). Remake de la série suédoise Annika Bengtzon: Crime Reporter de Lisa Marklund. Réalisé par Patty Jenkins (Monster, The Killing, Betrayal). Pour ABC, Universal Television, TBD Entertainment & Yellow Bird Entertainment. 59 pages.
Anna Loach, journaliste d'investigation pour Rolling Stone Magazine, ne recule devant rien pour découvrir la vérité concernant des affaires controversées sur lesquelles ses confrères n'osent même pas enquêter, quitte à mettre sa vie en grand danger, contre l'avis de son patron, ses collègues et ses proches. Alors qu'elle est sur le point de faire la lumière sur des pratiques douteuses de la police locale, elle reçoit l'aide inattendue et mystérieuse d'un dénommé "Stoya", qui lui révèle les détails d'une conspiration gouvernementale touchant tous les citoyens américains...
Avec Mary Elizabeth Winstead (Die Hard 4, The Spectacular Now, The Thing), Brian F. O'Byrne (FlashForward, Mildred Pierce), Pedro Pascal (Game Of Thrones, The Good Wife), Fran Kranz (Dollhouse, La Cabane dans les bois), Sandrine Holt (24, House Of Cards, Resident Evil), Ben Barnes (Le Monde de Narnia), Peter de Jersey (Broadchurch)...
Je n'attendais pas grand chose d'Exposed, si ce n'est un show procédural, énième variation de série policière se cachant cette fois derrière un personnage de journaliste têtue pour accomplir ses basses besognes. Il n'en est rien, ou presque. Si l'aspect procédural est inévitable dans les premiers temps, avec une affaire par semaine, la part de feuilletonnant est très très importante et chaque petite affaire, comme dans ce pilote, est en réalité liée à une bien plus grand affaire, une conspiration gouvernementale. Rien que ça. A plusieurs reprises, cette partie de l'histoire m'a fait rouler les yeux. Pas d'incrédulité, mais de surprise. Le scénariste va très loin, quitte à nous entraîner quasiment dans de la science-fiction, sauf que tout cela semble finalement très réel, crédible. Et c'est franchement super flippant.
La série s'inscrit dans une paranoïa très actuelle, très post-11 septembre, très Homelandienne, où, au nom de la sécurité du pays, chaque citoyen est surveillé (et pas seulement aux Etats-Unis) par tous les biais possibles et imaginables : nos mails personnels sont lus et stockés sur des serveurs géants pendant des mois, des années; la moindre de nos recherches sur internet est retraçable; nos conversations téléphoniques peuvent être écoutées à tout moment; et, cerise sur le thriller, des drones postés au-dessus des plus grandes villes sont capables de suivre le moindre de nos faits et gestes, la moindre de nos rencontres, du matin au soir, 24/24, 7j/7. C'est ce qui arrive à Anna Loach, nous offrant au passage des points de vue intéressants niveau réalisation, depuis ces fameux outils postés dans le ciel. Toute son enquête du jour, assez passionnante par ailleurs mais très sombre -il s'agit de la disparition d'une jeune fille, liée à des dealers de drogues, des gangs...- est suivie à la trace par une mystérieuse entité gouvernementale qui n'a clairement pas pour unique but de protéger les citoyens, mais aussi de leur cacher de terribles vérités. Le pilote se termine par des menaces violentes proférées à son encontre. Un certain Quigg, à la tête de ce groupe, devient ainsi l'ennemi numéro un de l'héroïne, tandis que son allié, surnommé "Stoya", est un fugitif dont elle ne sait rien, mais pour qui elle a déjà développé des sentiments qui vont bien au-delà du respect, de la gratitude ou d'une certaine forme d'amitié malsaine. Elle est amoureuse quoi... alors qu'elle a déjà un boyfriend de longue date, Oscar, qui se trouve aussi être son patron aux bureaux de la côte Ouest de Rolling Stone, et qui la presse depuis plusieurs mois pour qu'elle vienne vivre chez lui, une idée qu'elle rejette en bloc, soi-disant parce que sa fille de huit ans la déteste. Bref, si Exposed est indéniablement un thriller qui se veut intelligent, rythmé, inquiétant et ultra-moderne, elle n'oublie pas une composante essentielle, particulièrement sur ABC : la romance. Ici trouble et dangereuse. Donc excitante. Scandalienne ?
L'héroïne n'est pas instantanément attachante. Dans les premières scènes, elle est très bavarde, très désagréable avec ses collègues, trop rentre-dedans, on la soupçonne même d'être un peu prétentieuse. Puis plus le pilote avance et plus sa témérité force le respect et plus on comprend que le rempart qu'elle a construit autour d'elle est absolument indispensable pour qu'elle puisse exercer son métier avec le plus de liberté possible. Elle devient finalement admirable, mais pas héroïque. Elle reste ambitieuse, carriériste et si ses intentions sont louables et son empathie pour les victimes et leurs proches sincère, ses méthodes n'en sont pas moins discutables. Anna Loach est atypique. Elle m'a un peu fait penser à Ellen Parsons de Damages, quelque part. Elle aussi semble avoir un passé familial compliqué. Elle a clairement un problème avec son père, tandis qu'elle reste muette sur sa mère. Elle a en revanche une jolie relation avec son frère, mais cela ne va pas durer vraisemblablement : il n'est rien de moins que le grand chef d'une entreprise qui fabrique des systémes de sécurité de haute technologie... comme justement les drones utilisés par le Gouvernement ! Il y a conflit d'intérêt... Il ne sort jamais sans gardes du corps, sa vie est constamment menacée. La plupart des collaborateurs d'Anna ne sont qu'accessoires dans ce pilote, à l'exception d'un certain Elvis Giroux, pour qui on a rapidement de la sympathie. Il a beaucoup d'humour et on sent une véritable complicité entre eux, qui permet de temps à autres de détendre l'atmosphère. Et c'est vraiment nécessaire !
Exposed est un pilote extrêmement intéressant, indéniablement réussi, qui impose un ton et une ambiance thrilleresques que l'on attend davantage sur le câble, en tout cas sur le fond, et certainement pas sur ABC, même si la forme est soignée dans ce sens. Pour le moment, la série est facile d'accès, limpide, mais sur une saison entière (de 13 ou 22 épisodes), elle est amenée à devenir beaucoup plus complexe. J'ai le sentiment que la chaîne a de fortes chances de passer son tour. En tout cas, elle ne peut pas se permettre de commander et Exposed et American Crime, qui sont très différentes mais qui jouent quand même dans la même cour et représentent un risque...