Les vieux fourneaux (T1) Ceux qui restent

Publié le 09 avril 2014 par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Chronique « Les vieux fourneaux T1″ : 3 papys et 1 enterrement

Scénario de Wilfrid Lupano, dessin de Paul Cauuet,

Public conseillé : Adolescent / Adulte

Style : comédie sociale Paru chez Dargaud, le 11 avril 2014 Share


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L’histoire

La jeune Sophie, enceinte jusqu’aux yeux, repeint un théâtre de marionnette, prend une douche et enfile une petite robe noire. Pierrot, Septuagénaire sec et revendicatif sort de son studio couvert d’affiches de révolte et vient prendre Mimile à la maison de retraite. Direction, l’enterrement de Janine, la femme d’Antoine, le troisième larron de la bande. Pour ces trois copains-là, c’est “à la vie, à la mort”’.
Après la messe, les trois vieux se retrouvent pour évoquer la vie, les luttes sociales, les souvenirs, les blessures…
En attendant Antoine qui remplit la paperasse chez le Notaire Brousse, Mimile et Pierrot s’installent. Mais quand Antoine ressort, c’est gonflé à bloc, avec une arme à la main qu’il part pour la toscane, dire deux mots à Garan-Servier, leur ancien patron….
La lettre de la défunte vient de déterrer un secret de famille… de quoi embarquer ses potes de toujours et Sophie (la petite fille) dans un road-movie inattendu…


Ce que j’en pense


Décidément, Wilfrid Lupano est en « odeur de sainteté » ! Avec ce premier tome des « Vieux Fourneaux », il assure son statut de scénariste original !
Pour moi, aussi étonnant et différenciant que Zidrou, il a su en quelques albums, prouver sa maîtrise narrative et son axe très personnel. Remarqué sur « Alim le tanneur » avec Virginie Augustin, « L’homme qui n’aimait pas les armes à feu » avec Paul Salomone, « Ma révérence » avec Rodguen, « Azimut » avec Jean-Baptiste Andreae, « Le singe de Hartlepool » avec Jérémie Moreau, c’est au genre « film de potes » que Lupano s’attaque avec « Les vieux fourneaux ».
Pour décaler son récit, il choisit des héros pas piqués des hannetons. Trois vieux emmerdeurs, (70 balais bien tapés) assez décatis, mais avec le verbe haut et la Niac’. Des papys-font-de-la-résistance, attachants et râleurs à souhait, comme je les aime !

« On lui a dit un jour qu’une machine ferait mieux le travail que lui, alors, il a défié la dite machine, en combat singulier. »
A la masse de chantier. Victoire par KO au premier round. »

Plus qu’une intrigue, il prend son temps pour décrire le petit monde des ancêtres. Leurs vies, leurs amitiés, leurs amours, leurs regrets… Avec poésie, ironie et beaucoup de franchise, il nous embarque dans leur petit monde d’amitié plus fort que la mort.

« Tu comptes faire chier le monde encore longtemps ?
Le plus longtemps possible, Oui. A nos âges, il n’y a plus que le système qu’on peut encore besogner. Du coup, ma libido s’est reconvertie sur la subversion. »

Quand, en milieu d’album, le récit prend une nouvelle tournure plus dynamique, c’est pour nous embarquer dans un road-movie qui s’effondre comme un soufflé trop cuit… et prendre encore une nouvelle direction. Comme quoi, Lupano nous prouve qu’on peut très bien ne pas suivre une structure classique de scénario et nous captiver quand même. Du grand art !!!

Vous avez dit “dialoguiste” ?


Original dans ses personnages, dans sa narration, Wilfrid Lupano est une bête de Dialogues (avec un « D » majuscule, Moooosieur) !

« Brousse, le Notaire : j’en ai connu des pompes à vélo, mais alors lui… »

Avec “Les vieux fourneaux”, il s’est surpassé. Sous sa plume, les trois vieux râleurs, sans oublier Sophie, ont un franc-parler que ne renierait pas Michel Audiard (“Les tontons flingueurs”, “Les Barbouzes”, « le cave se rebiffe”, “Les Morfalous”…). Il enchaîne expressions imagées et décalées à s’en claquer les zygomatiques. Ne lisez pas cette BD dans un transport en commun. Vous risquez de passer pour un fou !

Le dessin


Jeune dessinateur (et accessoirement pote de Lupano), Paul Cauuet a déjà travaillé avec Wilfrid sur deux tomes de la série « L’honneur des Tzarom » (paru chez Delcourt).
Pour ce premier épisode des « Vieux fourneaux », Cauuet se met au diapason complet avec le « maître » ! Son trait semi-réaliste se permet le juste décalage. Les gueules expressives, à peine caricaturales font le pendant des dialogues truculents. Côté décors, c’est tout aussi bon. Que ce soit la France profonde ou l’Italie « carte postale », on s’y croirait. Tant de maturité pour un jeune dessinateur, j’applaudis à quatre mains !

Pour résumer


Waouuu ! attendu avec impatience, cette nouvelle BD de Wilfrid Lupano tient toutes ses promesses. Comédie sociale grinçante et décalée, Lupano et Cauuet nous offrent un petit bijou d’humour. Personnages attachants et “justes”, leurs trois pépères vont vous embarquer sur la route avec eux, c’est certain !