La météo avait annoncé à tort un beau soleil. Nous partons sous quelques gouttes de pluie, mais ne nous laissons pas effrayer par les nuages. Nous surplombons la Creuse mais lui tournons le dos pour le moment, pour mieux imprimer nos semelles sur le Chemin de Saint Jacques de Compostelle qui en a vu tant d'autres (le chemin, pas Saint Jacques).
La forêt est luxuriante, en ce début de printemps, et ce ne sont pas les champs couverts de fleurs de pissenlits, les fossés comblés de coucous et de primevères qui vont me contredire. Il fait incroyablement chaud, si bien qu'en fin de randonnée, nous aurons l'impression de gravir les pentes tropicales d'un volcan du Pacifique. Mais, pour le moment, nous sommes encore en pays tempéré : les petits carrés de vignes viennent tout juste d'être taillés et des jachères multicolores croissent à leurs pieds.
Plus tard, nous arrivons sur les hauteurs de Gargilesse et quittons le chemin des pèlerins pour poursuivre notre route vers le village du Pin. Les résidences secondaires sont encore fermées mais laissent deviner çà et là un salon de jardin tout bleu sous les arbres, un banc qui regarde la Creuse, une pergola aux colonnes ornées de glycines. Autant de promesses de paradis cachés.
Une fois en bas, les bords de la rivière ne nous rafraîchissent même pas et les étranges demeurent, là-haut sur les falaises, prennent un air inquiétant de villas hantées. Le plus dur reste à faire, puisqu'au bout de plus d'une heure de marche, il nous faut maintenant remonter tout le dénivelée en quelques dizaines de mètres. Nous haletons, nous liquéfions de chaleur en grimpant les marches qui nous ramènent à notre point de départ. Encore un autre circuit dépaysant dans ce coin que nous ne finirons jamais d'explorer. Tout laisse à penser que quelque génie efface et recrée le paysage après chacune de nos visites...