The 100 est une nouvelle série diffusée sur les ondes de CW aux États-Unis et sur Netflix au Canada. L’action débute dans l’espace dans le vaisseau nommé « The Ark ». C’est qu’il y a 97 ans, une guerre nucléaire a éclaté sur la Terre, rendant celle-ci invivable et les derniers êtres humains ont dû se réfugier dans l’espace. Mais voilà que les vivres et l’oxygène viennent à manquer et on décide d’envoyer 100 adolescents en reconnaissance sur la Planète bleue afin de savoir s’il est possible de retourner y vivre. Aussitôt arrivés, les jeunes se rebellent alors que dans l’espace, les membres de différents clans sont en profond désaccord quant aux solutions à apporter pour assurer leur propre survie. Adaptation du roman éponyme de Kass Morgan, la CW a encore une fois trouvé le moyen de faire de cette science-fiction un drama pour adolescents avec des guerres de clans et exploitant le concept de popularité. Si la série peine à maintenir un équilibre de ton entre les scènes sur Terre et celles dans l’espace, force est d’admettre qu’elle est un peu plus mature que ses précédentes créations.
Quelques nuances
Comme il fallait s’y attendre, les êtres humains qui ont pu échapper au déclin de leur planète se sont dotés de règles très strictes afin d’assurer leur survie dans la galaxie. Par exemple, on a empêché les couples d’avoir plus d’un enfant, mais même cette mesure est devenue caduque parce que le vaisseau peine à contenir plus de trois générations. Une mission vers la Terre est donc devenue impérative et on préfère envoyer des adolescents condamnés pour certains méfaits, un peu comme les pays européens envoyaient leurs prisonniers et hors-la-loi peupler leurs colonies.
Le problème dans cette microsociété de l’espace est que tous ceux qui enfreignent les lois sont passibles de la peine de mort et la plupart des enfants participant à la mission ont perdu un ou deux de leurs parents pour cette raison. Il est donc peu surprenant qu’une fois arrivés sur terre, ils n’aient plus envie d’avoir quelque contact que ce soit avec ceux qu’ils ont laissés derrière. La première conséquence de la guerre nucléaire est la quantité industrielle de radiations qui s’est propagée dans la nature. Un siècle s’est écoulé depuis, mais la planète ne s’en est que partiellement remise. L’eau semble être redevenue potable et les feuilles des arbres ont retrouvé leur verdure, mais à tout moment peut survenir une pluie acide meurtrière et les radiations ont transformé génétiquement des animaux comme les papillons, cerfs et poissons. Alors que les jeunes tentent de s’acclimater à leur nouvelle vie, là-haut dans le vaisseau les relations sont loin d’être au beau fixe. Certains sont d’avis d’abandonner les enfants à leur sort alors que d’autres souhaitent miser sur eux au détriment de certains de leurs pairs qui se meurent.
La mise en scène et les effets spéciaux sont les points forts de The 100. En premier lieu, le contraste est frappant entre la noirceur continuelle du vaisseau et l’éclat des couleurs de la Terre. Fait inusité en science-fiction, c’est la Terre et non l’espace qui constitue l’endroit d’exploration. Bien que les paysages nous soient familiers, on réussit à créer plusieurs tensions grâce à des forces de la nature transformées, pour ne pas dire défigurées. Et un bon point pour CW, la chaîne semble enfin comprendre qu’elle peut captiver son auditoire autrement qu’en mettant l’emphase exclusivement sur les problèmes sentimentaux de ses jeunes protagonistes. Pourtant, il reste beaucoup de chemin à faire…
Faire confiance aux adolescents… une très mauvaise idée
C’est justement dans les moments où CW tente d’imposer la signature de la chaîne dans The 100 qu’on décroche. Encore une fois, les adolescents sont laissés à eux-mêmes et cette quasi-confiance qu’on leur accorde pour cette mission sur la planète vient nous prouver à quel point ils sont immatures et irresponsables. Aussitôt mis les pieds sur terre, l’un d’eux, Bellamy (Bobby Morley), fomente une rébellion et convainc presque tous ses pairs de se départir de leurs bracelets les reliant avec l’espace. Ce faisant, ils ne peuvent plus être monitorés par leurs aînés et ne recevant plus de signal, ces derniers ne peuvent que conclure qu’ils sont morts. Le jeune homme est rapidement mis sur un piédestal et seul un petit groupe composé de Clarke (Eliza Taylor), Finn (Thomas McDonnell), Jasper (Devon Bostick) et Wells (Eli Goree) lui résistent. En fait, ce sont les seuls à avoir la présence d’esprit d’accomplir leur mission, retenant l’information élémentaire qu’elle a pour but d’assurer la survie de l’humanité. Dans son article, Allison Keene résume ironiquement bien le ridicule de la situation et surtout la différence de ton qui s’agence mal dans la série : « There are other love triangles, squares, hexagons and other permutations that form among other characters which drive most of the action (literally and figuratively) on Earth 2.0. Meanwhile though, in the sky, the adults are arguing over silly things like governance, population control, failing oxygen levels and the fate of humanity. »
Dans The 100, le concept de clan est malheureusement omniprésent, et qu’on soit dans Star-crossed ou Reign, séries de la même chaîne, on en retrouve toujours un dit « populaire », à la fois mesquin et sans aucune répartie, opposé à un autre, moins attractif, mais qui incarne la voix de la raison. Évidemment, les plus beaux protagonistes portent les épisodes sur leurs épaules et ceux moins beaux jouent un rôle secondaire aux intrigues. À la belle blonde, Clarke, intelligente et posée, on oppose Octavia (Marie Avgeropoulos), la sœur de Bellamy qui ne pense qu’à faire la fête et collectionner les prétendants. Outre les clichés habituels (le Japonais doué en informatique, les acolytes de Bellamy, des garçons étroits d’esprit qui exécutent n’importe quel ordre provenant de leur chef, etc.), ce qui exaspère le plus, ce sont des phrases telles que « We’re back bitches! », « We’ll do whatever we want! », « I am done following orders » ou encore « We’re liberating ourselves » qui ne nous rappellent que trop que la CW fera tout pour garder son jeune public cible en répétant toujours la même histoire, mais dans un emballage différent : des adolescents « rebelles » et incompris qui cherchent maladroitement à s’affranchir.
The 100 surpasse les autres nouvelles séries de CW pour 2013-14, mais on est encore loin d’atteindre un produit de qualité. Pourtant, le pilote a assemblé 2,73 millions de curieux (un record pour la chaîne que seule Life unexpected avait égalé en 2010), mais trois semaines plus tard, l’auditoire chutait de 30%. Certaines critiques qui ont vu à l’avance quatre épisodes fournis par le studio ont dit que la série avait du potentiel, mais vus individuellement chaque semaine, le tout manque de constance : le premier n’était pas si mal, le deuxième ennuyeux et le troisième captait déjà davantage l’intérêt. À une époque où les séries sont annulées en un claquement de doigts, The 100 a besoin de se mettre en selle, et vite!