Ce discours date de 2002 mais n'a rien perdu de sa force. A méditer.
"Discours de Philippe Gaillard, chef de la délégation du CICR au Rwanda en 1993-1994, prononcé à l'occasion du Genocide Prevention Conference, organisé par le « Aegis Trust » et le Ministère britannique des Affaires Etrangères, Londres, janvier 2002
"Die Sprache spricht als das Geläute der Stille"
(Martin Heidegger, Unterwegs zur Sprache)
En 1994, avant, pendant et après le génocide qui a fait environ un million de morts, pour la plupart des civils, j’ai donné des centaines d’interviews, de comptes rendus et de conférences à toutes sortes d’auditoires, aux journaux, aux télévisions, aux radios et au grand public. Avec du recul, je pense que ce n’était pas seulement la chose à faire, mais aussi la bonne thérapie.
Ensuite, fin 1994, j’ai décidé de ne plus parler du génocide rwandais et j’ai refusé toutes les demandes qui m’étaient faites à ce sujet. Je voulais juste retrouver une situation de silence et d’invisibilité, comme il sied à un délégué du CICR mais aussi parce j’ai une personnalité plutôt timide et discrète.
Près de huit ans se sont écoulés depuis le génocide et, par ma présence ici, je me retr ouve à en parler. Ce n’est pas que je sois moins timide aujourd’hui qu’il y a huit ans, ni que j’aie besoin de redevenir visible – j’aimerais ne plus jamais l’être – mais j’ai encore un genre de dette ou plutôt un certain devoir envers tous ceux qui sont morts au Rwanda en 1994 et auxquels on a accordé si peu d’attention par la suite que certains d’entre nous pensent que le génocide rwandais peut être considéré comme une « étude de cas ». (Lire la suite)
A revoir également cet épisode de notre série "Une histoire d'Humanité" avec Cornelio Sommaruga (président du CICR de 1987 à 1999) qui revient sur cette tragédie.