Comment expliquer à ma fille, à ma petite fille les mots qu'elle entend ?
Après la violence des discussions politiques où le vrai, le faux, l'infâme et l'impoli se croisent sans aucune limites, pour la plus grandes joies des médias avec des rebondissements et tumultes de personnes sans scrupules, voici que la rue nous rattrape.
Comment trouver des mots simples pour sécher les pleurs d'une petite fille malheureuse d'avoir entendu des insultes à son égard, des mots sur sa différence, des mots sur la couleur de sa peau ? Avec la surenchère entre celle de ses parents, ceux de ses frères et soeurs, les siens, tout est tombé si violemment sur elle. Notre fille, notre petite-fille, adoptée, comme des milliers d'enfants, sauvés de situations difficiles, mais surtout intégrée dans notre famille comme unique et totale membre de notre chair. Elle est nôtre. D'ailleurs personne n'a jamais vu de différence, même quand nous faisions le bain des petits, ils se posaient des questions entre enfants, trouvaient des raisons avec leurs mots d'enfants, avec des rires, rien d'autre.
Mais là, adolescente, elle se sent blessée par le jugement, par la bêtise, par la folie des hommes, par cette fange qui mélange culture, racines, origines, famille et bien d'autres préceptes douteux sur la race.
Alors que faire en tant que femme, en tant que mère, en tant que grand-mère, en tant que soeur, en lien directe avec elle, avec sa détresse. La blessure devient contagieux, honteuse d'une part, rageante de l'autre.
Ouvrir les bras, sécher les larmes, trouver les mots. Expliquer sans se justifier, sans non plus oublier de condamner les paroles reçues. Donner le levier pour rester debout, pour se défendre sans tomber dans le jeu si facile de la confrontation, mère nourricière du racisme, repas facile de la caricature. Taper sur la table pour lui montrer qu'elle n'est pas seule, qu'elle ne sera jamais seule, contre cela, ou contre d'autres injustices, car nous sommes une famille, blanche et noire, métisse, unie, unique et fière.
La rassurer sur sa beauté, même si là, la jalousie est peut-être source de cette vague de violence verbale, ses longues jambes sont divines, on lui a déjà demandé de poser pour des agences de mannequinat. Une beauté féline, une beauté féminine, une beauté fragile de jeune femme qui se découvre dans un monde si brutal.
L'entourer de mes bras encore, lui dire mon amour, répondre encore à ses questions, joindre ses amies, toutes celles qui croient en elle. Une tribu, un melting-pot si pétillant de jeunes filles et jeunes femmes, si diverses par leurs origines et cultures, toutes copines, toutes fières de leurs amitiés, de leurs diversités. S'aimer !
Nylonement