Le free to play : borne d’arcade des années 2010

Publié le 04 avril 2014 par Edelit @TransacEDHEC

Drôle de marché que celui des jeux vidéo free to play ! League of Legends, World of Tanks, Team Fortress 2, Tribes Ascend… autant de grands noms de l’industrie vidéoludique présentant pourtant un point commun atypique : être distribués gratuitement au monde entier via des versions dématérialisées sur internet. Difficile d’imaginer un modèle économique capable de générer des revenus à assez long terme pour en faire un modèle viable ! Surtout lorsque l’on sait que les budgets de développement de ces titres peuvent atteindre des millions  de dollars (voire des dizaines !) et que ceux-ci nécessitent des mises à jours quasi hebdomadaires.

Le secret de ces titres réside dans leur approche à première vue novatrice du jeu vidéo et de l’implication du client final. Si, dans la plupart des cas, le joueur peut tout à fait profiter de son jeu sans débourser un centime, tout est fait en revanche pour l’inciter à passer à la caisse via un système de microtransactions de quelques euros (en général…) « in-app » afin de lui offrir avantages techniques, accélérateurs de niveau, nouveaux éléments de jeu ou encore améliorations cosmétiques (via de nouveaux packs de « skins »). Certaines de ces améliorations ayant une durée d’utilisation limitée dans le temps (comme les fameux « boosters d’expérience », accélérateurs de progression), il peut être intéressant de relever le parallèle de modèle économique avec les bornes d’arcades ayant marqué l’histoire de l’industrie dans les années 90 : tout est fait pour créer une addiction et une série d’achats continuelles chez les joueurs. La différence tenant dans l’accès à la partie gratuite du jeu, leur servant de « mise en bouche » destinée à leur faire sauter le pas.

Ces microtransactions sont le cœur même de l’intérêt des free to play : en proposant des prix de base relativement bas, pour des produits induisant une satisfaction éphémère, le consommateur final est alors tenté de craquer toujours plus… au point d’investir au bout d’un an bien plus que ce que lui aurait couté un jeu traditionnel.

Notons également que cette flexibilité de distribution (finies les distributions par le réseau habituel, synonyme de boîtes et DVD couteux et rapidement obsolètes à cause des mises à jour obligatoires) autorise une offre adaptée aux particularités culturelles de chaque continent. C’est ainsi qu’en Russie, le FPS Warface fait carton plein avec plusieurs dizaines de milliers de joueurs connectés simultanément, quand sa version européenne peine à réunir plus de 300 joueurs aux heures de pointe. Crytek, développeur du titre, s’estime déjà satisfait des résultats et a même annoncé vouloir se concentrer majoritairement sur le F2P, délaissant les blockbusters couteux qui ont pourtant fait sa renommée depuis 2004.

D’autres développeurs et éditeurs, comme le leader mondial EA Games, ont d’ores et déjà commencé à décliner leurs licences phares dans des versions gratuites, désireux d’expérimenter cette curiosité numérique mais aussi de s’y faire une place au cas où le modèle devait s’imposer à toute l’industrie.