Méfiez-vous de vos domestiques !

Publié le 04 avril 2014 par Dubruel

DENIS (d'après Maupassant)

Un matin, M. Rambaud lisait la lettre

Que venait de lui remettre

Son valet, Denis.

Il était écrit :

Je recule devant le procès

Dont vous m’avez menacé.

Je vous adresse 50 000 francs

Pour tout dédommagement.

M. Rambaud n’avait pas saisi

Pourquoi Denis s’était mis

Dans la journée à chantonner gaiement

Tout en balayant, lavant et astiquant.

Vers minuit, muni d’un grand couteau,

Denis avait voulu égorger M. Rambaud

…Mais il ne réussit qu’à l’égratigner.

Son maître ne dormait pas

Il s’était dressé et renseigna ainsi son valet :

-« Mon pauvre Denis, ne rêve pas ;

…Je n’ai pas encore reçu l’argent ! »

Tout penaud, le serviteur se sauva

…Puis revint avec alcool et pansement.

Il soigna son maître avec dévouement.

-« Si vous ne me dénoncez pas,

Je vous servirai toujours fidèlement. »

M. Rambaud, ne voyant pas malice,

Garda Denis à son service.

Or, huit jours après,

À l’angle de la rue de Parme,

M. Rambaud vit son valet encadré

Par deux gendarmes.

Denis lui lança :

-« Ce n’est pas bien, çà ! 

Vous m’avez dénoncé ! »

-« Non, je n’ai jamais parlé à quiconque. »

Le brigadier eut alors un sursaut :

-« Si je comprends, cet homme a donc

Voulu vous tuer, monsieur Rambaud ? »

-« Oui, mais je n’ai pas fait de déposition.»

-« Je prends note de votre déclaration

Et la justice appréciera.

J’arrête votre serviteur

Car c’est un voleur.

Il a braconné

Sur les terres des Murat. »

Sur ce, Denis fût emmené.

L’avocat plaida la folie mentale

Nécessitant des soins à l’hôpital.

M. Rambaud fut interrogé

Par le Président :

-« Pourquoi avez-vous protégé

Ce dément ? »

-« Voyez-vous,… il est si difficile

Aujourd’hui de trouver un bon domestique…»

Denis fut placé dans un asile

Et soigné pour troubles psychiques.