Dc Saga n'est plus, longue vie à Dc Saga présente. Pour inaugurer ce genre de trimestriel au sommaire composite, rien de mieux qu'une aventure de Batman, le héros le plus bankable de la Distinguée Concurrence. Cette fois, il s'agit de retrouver le Dark Knight face à un ennemi impitoyable et redoutable, qui est un peu son double maléfique, un certain Wrath. Ce dernier est sur le point de faire son apparition dans sa version New 52, aussi Urban juge bon de nous rafraîchir la mémoire, avec une longue aventure en deux parties plutôt intéressante. Tout d'abord, nous effectuons un plongeon dans le temps, avec un récit unique (Batman Special 1) de 1984, signé Mike W.Barr et Michael Golden. Le destin de ce Wrath (colère, ou courroux en Vf) ressemble point par point à celui d'un Bruce Wayne qui n'aurait pas connu la compassion et n'aurait pas reçu de soutien après le mort de ses parents, assassinés dans une ruelle de Crime Alley. Livré à lui même, abandonné à l'orphelinat, et victime des magouilles internes aux forces de police (qui tentent de masquer le fait que les parents du criminel n'étaient autre chose que des flics ripoux), Wrath va grandir dans la haine et le ressentiment, au point de se confectionner un costume qui ressemble beaucoup à celui de Batman, et mener ensuite une vaste croisade contre les forces de l'ordre, avec en point de mire le commissaire Gordon. C'est ce dernier, au début de sa carrière, qui a abattu en état de légitime défense les géniteurs de ce nouvel ennemi. Bien sur, nous sommes dans les années 80, et les couleurs, les bulles de pensée qui rythment l'action, un certain ton didactique qui n'a plus cours aujourd'hui, tout cela peut rebuter le lecteur le plus jeune. Mais il n'empêche, il s'agit d'un récit bien maîtrisé et qui a marqué son temps, que j'ai relu avec un plaisir évident. Golden aux dessins, d'ailleurs, ça ne se refuse pas.
24 ans plus tard, le personnage de Wrath refait une apparition sur les pages de quatre épisodes de la série Batman Confidential. Cette dernière revient sur des événements du passé de Batman, jusque là jamais relatés. En fait, notre héros comprend vite qu'il ne s'agit plus du même ennemi, qui a trouvé la mort lors de la première confrontation. Qui peut bien avoir repris le flambeau, et poussé le mimétisme a adopter les mêmes gadgets, le même costume, le même modus operandi (déformé par la haine) que la Chauve-Souris de Gotham? Cette fois, Nightwing est de la partie. Il n'était encore qu'un jeune Robin, bien des années avant, quand Wrath fit son apparition. Et il se doit d'être présent, ce coup-ci, car le retour de cet ennemi qu'on pensait disparu pourrait bien être lié au rapport qui l'unit à son aîné et protecteur. Lequel semble avoir quelques difficultés relationnels à son encontre, au passage (nous sommes à l'époque des premiers pas de Nightwing avec les Titans, une tentative d'émancipation qui comporte aussi des frictions). Les dessins sont de Rags Morales, encore un peu acerbe mais doué, indéniablement, et le scénario de Tony Bedard. Une parution fort intéressante qui nous montre que la frontière entre un héros et un criminel peut parfois être poreuse, bien mince, et où se mêlent déterminisme et discours sur la (dé)construction de l'individu, selon les stimuli et les épreuves qu'il devra traverser. Wrath, comme reflet sombre et amer du Batman, qui en devient presque un modèle d'équilibre mental à coté. Qui l'eut cru...