Interview : Frédéric Lerner

Publié le 02 avril 2014 par Lemediateaseur @Lemediateaseur

Quelques jours après la parution de notre chronique sur Muzungu, son nouvel album que nous chroniquions ici, nous avons eu le plaisir d’interviewer Frédéric Lerner.

L’occasion de revenir avec lui sur la création de cet opus, sur sa découverte de l’Afrique et sur notre appréciation du disque.

Bonne lecture,

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Bonjour Frédéric,

Ton nouvel album Muzungu est dans les bacs depuis quelques jours, comment te sens-tu ?

Très serein. Je suis super heureux de l’accueil du public. Pour beaucoup, c’est mon meilleur album donc je suis ravi.

Cet opus sort quelques années après le précédent, t’es-tu demandé s’il y avait encore une place pour toi ou si ton public allait encore répondre présent ?

On est tellement dans une nouvelle ère dans ce métier que c’est sans cesse un recommencement. Il n’y a jamais d’acquis. Tout reste toujours à prouver et j’ai la chance d’avoir une fan-base présente depuis le début, qui me suit et qui m’encourage. Comme je suis attentif à tout ce qui se fait, j’ai l’impression d’avoir la tendance et je n’ai pas peur de me tromper.

Tu as pensé à tous ces nouveaux artistes et style musicaux en travaillant ce disque ?

Non, car de toute manière on m’a tellement montré comme quelqu’un qui est dans la veine des anciens, que je n’ai pas besoin d’être dans celle des nouveaux. Je fais de la variété française et je ne vais pas me prostituer ou me travestir parce qu’aujourd’hui c’est Stromae qui fonctionne bien. Je fais ce que je sais faire et il y a une phrase qui dit « cultive ce que tu es », donc je continue mon bout de chemin en tentant simplement d’être meilleur par rapport aux albums précédents.

Ce disque est « né » d’une rencontre il y a quelques années avec Beniwe, peux-tu nous en parler ?

En 2006, au moment de terminer mon album Ca passe ou ça casse, j’ai rencontré Sonia Rolland, elle m’a parlé de son association Maisha Africa et m’a demandé d’écrire ce qui aurait pu devenir un single caritatif. La collaboration n’ira pas au bout pour diverses raisons, mais Sonia m’a présenté son cousin, Beniwe qui est une véritable star de la chanson au Rwanda. Il  est venu poser ses vibes sur le titre qui finira sur l’album. De là est née une véritable amitié avec ce garçon que j’ai invité pour ma première partie à l’Olympia et pour de nombreux concerts. Pour me remercier, il m’a m’invité sur la terre de ses racines.

Tu as donc bravé ta peur de l’avion pour aller le voir, qu’est-ce qui t’a frappé sur place pour que tu tombes sous le charme ?

Ce qui m’a frappé, même si cela apparaît comme très cliché, mais pourtant tellement déroutant, c’est ce peuple qui n’a rien entre les mains et qui vous donne tout. J’ai la chance de faire partie des privilégiés, dans une société industrialisée dans laquelle on peut presque tout avoir et là-bas, rien que mon Smartphone… ils n’avaient jamais vu ça. C’est une sorte de voyage en terre inconnue, j’ai pris une claque dans la gueule avec ces gens qui ont tout le temps le sourire alors qu’ils auraient matière à se plaindre.

Face aux paroles de Ecoute ou de Une autre vie, on se demande si ça parle de ton expérience sur place, est-ce le cas ?

Ecoute, est, je pense, la chanson la plus autobiographique de ce voyage. Être accueilli avec autant d’amour et de partage a vraiment été une leçon de vie. Après, un album résume toujours les quatre ou cinq années de vie entre le dernier et le nouveau, donc j’évoque aussi l’amour ou l’observation, il n’y a pas que l’Afrique, même si l’enveloppe est très africaine. Les émotions d’ici ou de là-bas se retrouvent, comme avec la chanson Nisaidié dans laquelle je parle d’une mère qui perd son enfant, on peut le vivre aussi à Paris. Simplement, l’image de cette femme en turban et de ce bébé qui pleure prenait une vraie dimension en situant l’histoire là-bas.

Tu as tout écrit et composé toi-même sur ce disque?

J’ai écrit et composé moi-même, humblement, en essayant de bien faire les choses, à l’exception du duo avec Lionel Richie car il avait déjà produit la musique. J’ai aussi coréalisé l’album avec Mister Ndanga, un producteur magnifique qui m’a beaucoup appris sur les arrangements et qui m’a ouvert l’esprit dans ma manière d’écrire et de composer. Je travaillais guitare-voix ou piano-voix et on construisait la chanson par couche, et ici, c’est la musique qui s’est posée en premier. Le titre Ecoute est venu d’une boucle de tam-tam sur laquelle j’ai composé une mélodie dont je n’avais pas l’habitude et ce fut une vraie surprise.

As-tu appris à jouer des instruments « locaux » ?

Instruments locaux non, mais ils ont une manière de jouer de la guitare qui est totalement différente de nous, ils tapent les cordes avec chaque doigt et ça donne des sons incroyables.

Dans la chronique, nous parlions de deux parties sur cet album, es-tu d’accord avec ça et as-tu supervisé cette césure ?

Oui, jusqu’au mastering il faut que je sois dans le studio, sinon je crains toujours de louper une étape. C’est vrai que je voulais raconter un voyage et un retour en France. Je ne voulais pas non plus dérouter le public, douze chansons avec des chœurs africains auraient pu « saouler ».

Nous évoquions le duo avec Lionel Richie, comment celui-ci s’est créé ?

Ça a d’abord été une première rencontre il y a dix ans en faisant sa première partie à Bercy. Il avait été d’une gentillesse extraordinaire, que certains Français devraient parfois imiter (sourire). C’était presque ma première scène et c’est un énorme souvenir. Il y a un an, j’ai assisté à son concert au Zénith, j’ai eu la chance de pouvoir le saluer dans les coulisses et chose incroyable il m’a reconnu. J’ai cru à une blague et ça m’a mis super à l’aise. Comme nous avons la même productrice, je me suis permis comme un enfant sans gêne si je pouvais rêver d’une collaboration. Sa chanson One world me suivait depuis des années dans mon casque et j’ai demandé à faire une adaptation libre de son texte pour reprendre le titre en duo, et il a accepté.

Le disque vient de sortir, peut-on déjà évoquer une tournée ou des dates de concerts ?

Il y aura peut-être une grosse tournée des plages cet été avec un sponsor, ça m’éclaterait, et il y aura une grosse date parisienne en fin d’année. Pour le reste, ça se met en place, ça sera un travail sur deux ans et j’espère pouvoir rencontrer un maximum de public.


Le Mediateaseur remercie Frédéric Lerner pour sa simplicité et sa gentillesse. Il était vraiment passionné en parlant de cet album et nous espérons que cela ressort dans la retranscription.

Son album Muzungu est disponible dans les bacs et nous vous conseillons d’y prêter une oreille attentive.