La désignation de Ségolène Royal en qualité de Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est une bonne nouvelle a plusieurs titres.
1. Ségolène Royal est nommée n°2 du Gouvernement, ce qui signifie que la place de ce ministère dans le protocole gouvernemental remonte considérablement et est enfin affiché comme un ministère prioritaire.
2. Ségolène Royal conserve le périmètre du Ministère qui était celui de Philippe Martin. Une bonne nouvelle également car cela signifie que l'administration de l'écologie (DGEC) reste sous tutelle du Ministre de l'écologie.
Attention, il ne s'agit pas à proprement parler du "super ministère" tel qu'il a été piloté par Jean-Louis Borloo de 2007 à 2010. En effet, l'aménagement du territoire et le logement demeurent en dehors du périmètre du ministère de l'écologie. C'est Sylvia Pinel qui est la nouvelle ministre de l'égalité des territoires et du logement à la suite du départ de Cécile Duflot. Il est regrettable que les administrations et les politiques de l'urbanisme et l'environnement ne soient pas définitivement réunies.
3. Ségolène Royal est un "poids lourd" de la majorité présidentielle. Pour imposer ses positions au cours des arbitrages interministériels, il est toujours préférable pour un ministère d'avoir à sa tête une personne influente au sein de la majorité disposant de réseaux parmi les parlementaires et élus locaux et capables de les mobiliser. Ce qui est le cas de Ségolène Royal. De plus, elle signe ici son "retour" à un haut niveau de responsabilité politique ce qui lui impose presque une obligation de résultat.
4. Ségolène Royal connaît le ministère de l'environnement qu'elle a piloté en 1992/1993. C'est toutefois un avantage à relativiser. En effet, le fait de connaître l'administration dont on va être le(la) ministre n'a pas toujours été une garantie de réussite.
5. Ségolène Royal est "écolo-compatible" pour l'essentiel. Elle a en effet une conception décentralisée de la politique écologique et énergétique grâce à son expérience de présidente de la Région Poitou-Charentes. Elle s'est souvent engagée pour le développement des énergies renouvelables et notamment pour le solaire photovoltaïque. Sur le nucléaire, elle avait été conseillée, lors de sa campagne présidentielle de 2007, par Bruno Rebelle, ex directeur de Greenpeace et son programme proposait une approche de la réduction de la part du nucléaire pas si éloignée du scénario développé par Negawatt. Idem : ses positions sur les OGM et les hydrocarbures de schiste sont considérées comme "vertes". En revanche, sa position sur la fiscalité écologique (taxe carbone et diesel) ont pu faire l'objet de controverses.
Il conviendra de surveiller attentivement, outre la composition de son cabinet et une éventuelle ré organisation de l'administration centrale, la publication d'un éventuel décret d'attributions. Un enjeu important est en effet celui de la négociation climat. La responsabilité de préparer et de d'organiser le sommet mondial du climat à Paris, en décembre 2015, a en effet été transférée en 2012 du Ministère de l'écologue au Ministère des Affaires étrangères. On imagine cependant mal Ségolène Royal être absente de cette manifestation.
D'un point de vue très politique, Ségolène Royal a aussi la charge de démontrer que le parti socialiste peut faire de l'écologie sans les Verts, lesquels ont sans doute eu tort de refuser ce ministère. Aprés le départ des écologistes et le risque qu'ils ne deviennent opposants, le parti socialiste ne peut plus déléguer ce dossier à son allié. Il va devoir le gérer lui-même et, espérons le, faire monter de nouvelles têtes, de nouvelles compétences sur ce sujet.
A court terme, Ségolène Royal va devoir faire face à un agenda fort chargé. Pas moins de trois projets de lois sont dans les tuyaux :
- le projet de loi sur la transition énergétique qui doit normalement être soumis pour avis au Conseil économique, social et environnemental dans la deuxième quinzaine du mois d'avril.
- le projet de loi sur la biodiversité qui a été récemment présenté en conseil des ministres par Philippe Martin
- le projet de loi portant réforme du code minier qui doit être présenté en juin.
Avant toute chose, il faut espérer que le Ministre du temps long dispose de temps. Delphine Batho et Philippe Martin, malgré leur investissement, n'auront pas eu cette chance.
Arnaud Gossement
Serlarl Gossement Avocats