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Hollande nomme Valls: la purge après la défaite

Publié le 01 avril 2014 par Juan
Hollande nomme Valls: la purge après la défaite

François Hollande a donc osé l'improbable et si prévisible choix, Manuel Valls, pour diriger son prochain gouvernement.

On devrait l'applaudir et le haïr.

Lundi soir vers 18h12, Jean-Marc Ayrault est donc répudié. Il paye la perte de 172 mairies de communes de plus de 9.000 habitants. On louera plus tard l'abnégation personnelle de ce grognard de la Hollandie, honnête mais écrasé. François Hollande a tranché. A 20 heures, le président français déboule sur nos écrans. Il reconnaît son échec, une franchise assez spectaculaire depuis l'Elysée. Il annonce une équipe de "combat", un gouvernement "resserré", des baisses de cotisations pour les salariés, mais Manuel Valls en premier ministre. Hollande assigne une mission de "justice sociale", un "pacte de solidarité", mais il nomme Manuel Valls.
Allez comprendre.
"Au pacte de responsabilité, doit correspondre un pacte de solidarité. Son premier pilier, c'est l'éducation, et la formation de la jeunesse ; son second, c'est la sécurité sociale avec la priorité donnée à la Santé ; et enfin le troisième, c'est le pouvoir d'achat avec une diminution des impôts des Français et une baisse rapide des cotisations payées par les salariés."


L'intégralité de l'intervention de Hollande en... par lemondefr
Assez vite, les deux ministres écologistes Cécile Duflot (Logement) et Pascal Canfin (Coopération) annoncent qu'ils ne resteront pas dans un gouvernement dirigé par Manuel Valls. Ce n'est pas l'homme qui est cause - entre ex-collègues, on peut s'estimer - mais la ligne politique qu'il incarne. On murmure que Jean-Vincent Placé, autre écologiste du Sénat, pourrait au contraire rejoindre l'équipe. La chasse aux postes est ouverte.
Le futur gouvernement sera nommé mercredi, 2 avril. On voulait éviter le poisson du 1er avril.
Car ceci n'est pas un poisson d'avril.
François Hollande ne serait donc pas tel Jacques Chirac qui en son temps commis l'erreur de refuser de nommer son ministre de l'intérieur à la tête de son énième gouvernement. Hollande cherche peut-être à désactiver un premier opposant de l'intérieur, ambitieux qui ne se cache plus.  C'est l'interprétation la plus souple, la plus positive qu'on puisse faire de cette nomination précipitée. Tactiquement, la démarche est doublement utile. Elle propulse Valls au devant de la scène pour mieux l'exposer. Elle permets aussi de doter la France d'un gouvernement à droite, sous un président (majoritairement) élu à gauche.
Chapeau l'artiste ! Hollande poursuit son oeuvre de triangulation de l'UMP qu'il voit encore comme son principal opposant en 2017, avec ou sans Nicolas Sarkozy.
Ceci n'est pas un poisson d'avril.
François Hollande en fait n'aurait pas eu de choix. Manuel Valls serait une décision par défaut. Laurent Fabius, Jean-Yves Le Drian et quelques autres auraient refusé. Il n'avait pas le choix puisqu'il tient encore à son Pacte de Responsabilité. Il n'y a pas de tournant à gauche, aucun signe n'a été annoncé ce lundi soir. Ces éléments de langage ne servent à rien.
S'il clarifie à l'extrême le positionnement politique de son gouvernement, François Hollande tire donc les conséquences institutionnelles exactement inverses de cette défaite municipale que ce qu'il fallait. Au soir du second tour, les ténors de l'UMP se succédaient sur les plateaux radio-télévisés pour attaquer Hollande, à défaut de pouvoir critiquer une politique. L'entre-deux n'avait qu'un temps. Hollande a choisi de marquer davantage son ancrage à droite, ignorant le désaveu.
Jean-Luc Mélenchon résumait exactement et calmement la situation: "il nomme comme premier ministre le plus grand commun diviseur possible de la gauche".
C'est la gauche qui a manqué à l'équilibre de cette équipe. Manuel Valls, qui représente la droite du PS, qui est avancé comme réponse politique. L'homme des foucades contre les Roms et leur prétendue incompatibilité à l'intégration arrive donc à Matignon. On nous promet qu'il a "changé".
Déjà ?
Car Manuel Valls divise à gauche. Les sondages - encore eux - le donnent populaire parmi les sympathisants du Parti socialiste. A la primaire de 2011, il n'avait réuni que 5,6 % des suffrages. Sa popularité sondagière le crédite d'environ 40 à 50% de soutiens, toutes sensibilités confondues.  Son activisme sécuritaire n'a eu aucun effet sur les résultats électoraux de dimanche dernier.
Il est tout aussi difficile de tirer une quelconque conclusion politique que la ligne politique incarnée par Manuel Valls - soc-lib à souhait, sécuritaire en pire- corresponde un temps soit peu aux attentes des électeurs qui ont récusé les listes municipales socialistes: l'abstention a frappé lourdement un électorat découragé mais pas convaincu par l'opposition de gauche; d'autres ont choisi justement cette opposition de gauche, qu'il s'agisse de sa version light à Grenoble (alliance EELV/PG) ou ailleurs. Ignorer celles et ceux qui ont délaissé les candidats socialistes au profit d'autres listes à gauche ou de l'abstention pure et simple est une curieuse attitude politique.
Ceci n'est pas un poisson d'avril. 
Ami sarkozyste, reviens. 
C'est cadeau. 



Crédit illustration: DoZone Parody


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