J’ai eu du mal à entrer dans ce roman. L’écriture est assez hachée, et comme on plonge directement dans une histoire qui en mêle plusieurs, j’ai mis quelques temps à trouver mes marques. Mais une fois celles-ci prises, je l’ai dévoré sans presque reprendre mon souffle. Très vite, le mensonge que Samir a construit crée la tension, très vite on comprend le danger de sa situation. Car pour un Musulman, prétendre entrer dans une famille juive relève de l’outrage au plus haut niveau. On touche là à un des conflits religieux et culturels les plus délicats. J’ai réellement eu pitié de ce personnage qui tente tout pour éviter les discriminations et vit une double vie, Sam l’avocat outre atlantique, Samir le fils de Nawal en France.
En revanche, j’ai trouvé les deux autres protagonistes profondément antipathiques. Nina m’a agacée à ne pas pouvoir décider seule de ce qu’elle veut faire, à se laisser influencer par Samuel qui insiste pour qu’elle approche Samir afin d’en savoir plus, puis par Samir qui l’entretient comme une maîtresse vénale. Quant à Samuel, il fait froid dans le dos par la psychose qui s’empare de lui et se retrouve littéralement possédé par cette histoire d’usurpation. Chacun à leur manière, ils ne laissent pas indifférents.
L’intrigue est particulièrement bien construite puisqu’on révèle petit à petit les histoires qui ont mené là les uns et les autres, et la spirale se resserre petit à petit. Samir voit enfin l’occasion de récupérer Nina, maintenant qu’il est quelqu’un et que Samuel n’est plus personne. La réapparition dans sa vie d’un frère fantôme d’une vie qu’il a laissé de l’autre côté de l’Atlantique menace sa fragile situation. Jusqu’où le mensonge pourra-t-il durer? J’adhère.
La note de Mélu:
Un grand moment dans la sélection du Prix Océans.
Un mot sur l’auteure: Karine Tuil (née en 1972) est une auteure française qui a déjà signé plusieurs romans salués par la critique.