Abdel Fattah al-Sissi / ©Khaled Elfiqui/EPA
Désormais officiellement candidat à la présidentielle, le vice-Premier ministre égyptien personnifie le retour d'un régime où l’armée concentre tous les pouvoirs, comme sous Moubarak.Abdel Fattah al-Sissi, le militaire architecte de l’éviction du président islamiste élu Mohamed Morsi, a annoncé officiellement qu’il se présenterait à la présidentielle prévue au printemps prochain. L’accession attendue à la présidence de l’ex-chef de l’armée consacre le retour d’un pouvoir autoritaire dans une Égypte en proie aux attentats, doublé d’une économie vacillante. Lundi, un tribunal égyptien a condamné à mort 529 islamistes, partisans de la confrérie des Frères musulmans, et près de 700 autres attendent un verdict après leur procès tenu hier. La répression atteint des niveaux sans précédent. La chasse aux islamistes est menée sans pitié dans tout le pays.
Dans ce contexte, Abdel Fattah al-Sissi, jusqu’à présent ministre de la Défense et vice-Premier ministre d’autorités intérimaires qu’il a lui-même installées, entend profiter d’un plébiscite des Égyptiens désireux de mettre fin à trois années d’instabilité. En effet, après la révolte qui chassa Hosni Moubarak du pouvoir dans le tumulte du Printemps arabe, 16 mois d’intérim assuré par une faction militaire conspuée par la rue et un an de présidence Morsi émaillée de crises et de violences, la grande majorité des quelque 85 millions d’Égyptiens n’aspirent plus désormais qu’à une chose : trouver l’homme à poigne qui pourra en finir avec le chaos.
Dans un pays exclusivement dirigé depuis 1952 par des militaires, à l’exception de Morsi, l’homme fort se doit d’être issu de cette puissante institution. C’est d’ailleurs en uniforme de maréchal qu’Abdel Fattah al-Sissi a annoncé sa candidature, un treillis qu’il portait "pour la dernière fois", selon ses mots, car la Constitution n’autorise que les civils à briguer la présidence. En treillis ou en civil, al-Sissi restera un militaire à poigne. Sa stratégie brutale s’est déjà soldée par la mort de plus de 1 400 manifestants pro-Morsi, violemment réprimés par soldats et policiers, eux-mêmes cibles d’attaques meurtrières désormais quotidiennes menées par des groupes islamistes radicaux.
Les nouvelles autorités ont arrêté plus de 15.000 personnes, jugées par centaines dans des procès de plus en plus importants, selon des responsables de la police. La répression atteint des sommets, au-delà de ce que l’Égypte a connu sous l’ère Moubarak. Les Égyptiens paient le prix fort pour le retour à la stabilité tandis que le pays ne sort pas de sa crise économique. Face à un terrorisme qui se propage, dans une économie en ruine, Abdel Fattah al-Sissi et son clan de militaires ont résolument choisi la manière forte.FG