Livrer des bouquets à ceux qui sont loin de chez eux ; des bouquets de chaînes télé. Chez Thema, on ne réfuterait peut-être pas on dit plutôt que la société est spécialisée dans le développement d’offres de chaînes ethniques par flux IP (par Internet), à l’intention des téléspectateurs qui ne vivent pas dans leur pays d’origine. C’est un peu moins fleuri, mais c’est plus précis.
Créée il y a neuf ans, l’entreprise est en effet née d’un constat : quand on vit à l’étranger, ou que l’on est d’origine étrangère, la télévision est souvent le seul moyen de conserver un lien fort avec la terre et la culture d’où l’on vient. C’est elle, la télé, qui donne les infos, parle la langue, joue la musique et diffuse les images de chez soi, de son enfance ou bien de ses ancêtres. Oui mais voilà, encore faut-il pouvoir recevoir les chaînes en question. Pas toujours aussi évident qu’il n’y paraît.
Longtemps la communauté africaine de France n’avait ainsi guère de possibilité de capter les programmes en provenance de son continent. Question de modèle économique, évidemment : coût d’une transmission par satellite élevé ; population visée trop réduite. « D’accord, mais pourquoi passer par le satellite ? », s’est simplement interrogé, un jour, François Thiellet, le patron et créateur de Thema, alors qu’avec l’ADSL et le succès des box la France était déjà pourvue d’une infrastructure prête à diffuser à moindre coût la télévision par Internet.
FICTIONS TOURNÉES AU NIGERIA
« Dinosaure » des chaînes thématiques selon, sa propre expression, ancien directeur général de MCM, François Thiellet avait également été à l’origine de MCM Africa. En liaison avec le Quai d’Orsay, il s’agissait à l’époque de retransmettre en Afrique francophone des programmes hexagonaux censés contribuer au rayonnement de , personne n’avait sérieusement songé que la télévision pouvait faire le chemin dans l’autre sens.
Avec l’aide de Canal Sat Afrique, M. Thiellet a commencé par faire le tour des chaînes de télévision des pays francophones pour leur suggérer d’être diffusées en France. La proposition était du genre de celles qui ne se refusent pas : non seulement Thema prend à sa charge les frais techniques et organise la distribution, mais, en outre, elle reverse une rémunération proportionnelle au nombre d’abonnés. Dernier point, la société parisienne s’occupe également de problèmes de droits liés en particulier aux retransmissions sportives. En France, Thema signe des accords avec les principaux opérateurs de l’Internet et du « triple play » (trois services dans le cadre d’un contrat unique).
Il y a quatre ans et demi, le premier bouquet est ainsi disponible avec six chaînes (deux du Sénégal, une du Cameroun, du Mali, du Burkina et de la Cote d’Ivoire), pour 6,90 euros par mois. Le succès est immédiat.
Si bien qu’aujourd’hui Thema compte quelque 150 000 abonnés, et propose 21 programmes dans un deuxième bouquet premium à 11,90 euros. Elle propose un boîtier pour les autres pays d’Europe moins équipés en ADSL, et a élargi son offre à d’autres communautés avec, par exemple, des bouquets russophones.
Mieux, la société a créé une chaîne, Nollywood TV. Elle diffuse des fictions tournées au Nigeria, deuxième plus gros producteur de films au monde après l’Inde. Des films tournés exclusivement en anglais, et que Thema fait doubler par des acteurs africains. Un peu complexe, sachant que les fictions ne sont pas conçues pour un marché international et que tout l’audio est enregistré sur une seule piste. Du coup, Nollywood TV se retrouve aujourd’hui diffusée dans toute l’Afrique francophone. Comme un retour aux sources.