L'opération lancée a été menée avec des blindés légers et des hélicoptères, et des tirs de mitrailleuses ont été entendus, a indiqué le ministère ukrainien de la Défense. Plusieurs camions transportant les soldats ukrainiens ligotés ont quitté la base deux heures plus tard.
"Le commandant de bataillon, Dmytro Deliatnitski et son adjoint Rostislav Lomtev ont été jetés à terre et ont reçu des coups de pied au visage. Ensuite ils ont été emportés à bord d'un hélicoptère dans une direction inconnue", a indiqué le ministère dans un communiqué. "Les militaires russes n'ont pas permis de transporter les militaires ukrainiens blessés à l'hôpital", poursuit le communiqué sans donner le nombre exact des blessés. "Actuellement entre 60 et 80 fusiliers marins sont détenus par les militaires russes dans le port de Féodossia", ajoute le ministère de la Défense.
Selon le ministère, les Russes ont posé comme condition de la libération des militaires retenus "le départ forcé des officiers ukrainiens de Crimée vers l'Ukraine continentale". Aucune information n'a été donnée quant à une éventuelle résistance armée de l'unité d'infanterie de marine des forces ukrainiennes attaquée par les forces russes à Féodossia.
Les forces russes et pro-russes ont occupé ces derniers jours sans combat plusieurs bases ukrainiennes en Crimée et saisi plusieurs bateaux de la flotte ukrainienne, dont l'essentiel est basé dans les ports de la péninsule désormais rattachée à la Russie malgré les protestations de Kiev et de l'Occident.
"La situation en Crimée est complexe. Ces derniers jours des navires ont été bloqués puis saisis (par les Russes), en dépit du fait que tous les commandants avaient l'ordre d'utiliser les armes", a reconnu dimanche le ministre ukrainien de la Défense Igor Tenioukh.
Les forces russes en Crimée cherchent depuis quatre jours à s'emparer des dernières bases encore tenues par les forces ukrainiennes. Deux bases ont été saisies samedi par les forces russes, à Novofedorivka et à Belbek. Des tirs ont été entendus lors de l'opération contre la base de Belbek, et le ministère ukrainien de la Défense, confirmant l'évacuation de la base par ses hommes, a fait état de deux blessés, un journaliste et un soldat ukrainien.
La Crimée est une péninsule située au sud de l'Ukraine et à l'ouest de la région du Kouban en Russie, qui s'avance dans la mer Noire.
Depuis l'indépendance de l'Ukraine, en 1991, la Crimée jouit d'un statut spécifique. Son parlement régional n'a pas le pouvoir d'initier des lois, mais la péninsule est autonome sur le plan budgétaire. Surtout, elle dispose de sa propre Constitution, entrée en vigueur en 1999 après de nombreux allers-retours entre Kiev et Simferopol entre 1992 et 1998.
Bordée par la mer Noire, la péninsule, qui a longtemps abrité de riches comptoirs commerciaux grecs, puis génois, était sous la domination de khans d'origine mongole, vassaux de l'empire ottoman, quand, à la fin du XVIIIe siècle, la Russie de Catherine II en a entrepris la conquête, achevée en 1783. Immédiatement mise en valeur, la région devient la tête de pont de la Russie dans les mers chaudes, et le point de départ d'une politique expansionniste dirigée vers Constantinople. L'empire Ottoman, en plein déclin, décide en 1853, avec le soutien de la France et de la Grande-Bretagne, de mettre un coup d'arrêt à cette politique en attaquant la péninsule. Le conflit, très meurtrier - 750.000 hommes y périssent en trois ans -, dont le point d'orgue est le siège de Sébastopol, se solde par une cuisante défaite russe. Pourtant, la Crimée reste sous le contrôle de Moscou.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, la péninsule, avec son bord de mer et son climat doux, devient une terre de villégiature pour l'aristocratie russe. La zone sera aussi le point de passage obligé de nombreux candidats à l'exil après la Révolution d'Octobre.
En 1954, Nikita Khrouchtchev, lui-même d'origine ukrainienne, cède la Crimée à l'Ukraine, pour fêter le tricentenaire du traité de Pereïaslav, par lequel les cosaques d'Ukraine avaient proclamé leur allégeance à Moscou. Ce n'est qu'en 1991, quand l'URSS se disloque, que les conséquences du «don» se font sentir: la Crimée se retrouve alors soumise à l'autorité de Kiev, avec laquelle elle a peu d'histoire commune.
La ville de Sébastopol, où stationne la flotte de la mer Noire de la marine russe, bénéficie au sein de la Crimée d'un statut spécial : une ville autonome dans une région autonome. Son maire n'est pas élu, mais désigné par les autorités de Kiev. Économiquement et culturellement, l'emprise russe est très forte sur la ville, dont l'économie tourne autour de la base navale.
L'ancienne flotte soviétique de la mer Noire ainsi que toutes les installations ont été divisées entre la flotte russe de la mer Noire et la marine ukrainienne. Ainsi, deux forces marines partagent quelques-uns des ports et quais le long des côtes de Sébastopol et de sa région, tandis que certaines zones sont démilitarisées ou contrôlées par une seule nation.
Treize ans plus tard, de nouveaux accords renforcent la position russe. La signature des accords le 21 avril 2010 entre la Russie et l'Ukraine concernant le bail de la flotte russe de mer Noire à Sébastopol règle les nouvelles conditions de l'utilisation de cette base stratégique. Outre 8 millions de dollars de loyer annuel payés à l'Ukraine depuis 1997, la Russie est censée pratiquer à l'égard de Kiev un tarif préférentiel de fourniture de gaz correspondant à une réduction de 30% du prix normal de livraison.
Kiev bénéficie d'une ristourne sur le prix du gaz russe, qui pourra atteindre 100 dollars pour 1000 mètres cubes. Ce qui, par la suite, n'empêchera pas Moscou de faire pression sur Kiev en menaçant de couper les exportations de gaz russe vers et via l'Ukraine.
Au total, la marine russe a 15.000 militaires stationnés dans la base de Crimée, selon un accord avec le gouvernement ukrainien qui permet de stationner jusqu'à 25.000 militaires.
L'armée russe a déployé d'importants effectifs à la frontière orientale de l'Ukraine et pourrait menacer la Transnistrie, a averti dimanche 23 mars le commandant des forces de l'OTAN en Europe. "La force russe, qui se trouve en ce moment à la frontière ukrainienne de l'est, est très, très importante et très, très prête, il y a réellement un dispositif militaire suffisant à la frontière orientale de l'Ukraine pour marcher sur la Transnistrie si la décision était prise, et c'est très inquiétant."
L'intervention de Moscou en Crimée participe d'une stratégie globale de la Russie qui pourrait intervenir dans l'Est de l'Ukraine. Le but de Poutine n'est pas la Crimée, mais toute l'Ukraine: ses troupes massées à la frontière seraient prêtes à attaquer à tout moment.
Beaucoup de personnes en sont convaincus, la situation est devenue explosive.
Suite à la chute du mur de Berlin, l’URSS, ayant perdu une à une ses républiques, s’est effondrée en quelques semaines comme un château de cartes.
Lorsqu'a disparu la poussière de ce formidable tremblement de terre géopolitique, l’Europe a-t-elle eu l’impudence d’humilier la Fédération de Russie, donnant du poids à un Vladimir Poutine décidé à redonner une fierté nationale à son pays?
À l’évidence, de son point de vue, le chef du Kremlin ne pouvait laisser l’Ukraine gagner l’indépendance et s’allier à l’Europe sans réagir. Et l’annexion de la Crimée n’est peut-être, après tout, que le prix à payer pour éviter toute escalade, plus grave encore.
La crise entre la Russie et l'Ukraine autour de la Crimée constitue la "plus grave" menace pour la stabilité de l'Europe.
Depuis toujours les guerres ont été déclenchées par cette partie du monde, les dernières par exemple: les Balkans dans les années 90, la Géorgie en 2008...
Mais la Russie a-t-elle besoin de l’Europe?
L’inexistence de l’UE comme acteur diplomatique et militaire et la crise de Crimée, au-delà celle d’Ukraine, est lourde de conséquences, car l’OTAN se retire d’Afghanistan, en enregistrant un échec majeur mettant fin à ses projets d’action extérieure. Dès lors, se trouve posée la question de sa validité sur la zone qu’il est censé garantir, celle du territoire des États membres, dont, à l’évidence, l’Ukraine ne fait pas partie.
Du coup l’union avec l’Otan ne servirait à presque rien vu que les Américains ont dit aux Européens de "se débrouiller". Mais l’armement européen est bien maigre (peu d’argent et d’hommes) pour lutter contre la volonté des Russes et ce malgré l’armement attardé de ceux-ci.
Alors que doit-on faire? La question est posée.