Municipales: après la raclée, la gueule de bois

Publié le 26 mars 2014 par Juan

Le président français a interrompu un G7 à La Haye, soit-disant à cause du résultat calamiteux des candidats socialistes au premier tour des élections municipales dimanche dernier. C'est la panique. 

Enfin ?


1. La pression est montée d'un cran sur Jean-Marc Ayrault. Un premier sondage, qui en appellera d'autres, proclame les souhaits de la population échantillonnée. Le remaniement, souhaité ou craint, reste un levier dérisoire de l'action institutionnelle disponible. Lundi à midi, quelques ténors étaient avec Ayrault pour déjeuner. Et il paraît qu'ils ont "atterris", qu'ils sont sortis du "déni".
Mardi dans l'après-midi, les chefs de cabinets de quelques ministères auraient été appelés à faire leur bagage. Quelques ministres s'en sortent un peu mieux. Le premier sondage d'après la raclée municipale est sorti dès ce lundi 24 mars, quelques heures après le scrutin. Que retenait-on, à plus ou moins 2,5 point de marge d'erreur ? 79% des sondés veulent se débarrasser du gouvernement actuel.
Mais quelques ministres s'en sortent mieux que d'autres: Manuel Valls chute mais demeure largement en tête, second derrière Juppé. La pugnacité de Najat Vallaud-Belkacem paye. Elle gagne 5 point, et même 12 parmi les sympathisants de gauche.
2. La pression est sur Hollande que d'aucuns jugent désormais responsable de tout. Il faudrait oublier l'atonie de l'opposition de gauche (inversement proportionnelle à la virulence verbale de ses leaders), l'éparpillement des suffrages, et l'abandon abstentionniste. Le Figaro, mardi, avait même trouvé un anonyme "poids lourd PS" qui déclare: "Il est coincé. S'il en fait trop, il est sanctionné par les électeurs. S'il n'en fait pas assez, il est sanctionné par Bruxelles et les marchés."
Hollande devrait donc faire un ménage.
Vraiment ? 
3. Hollande a quitté "précipitamment" la réunion du G7 qui rassemblait les grands de ce monde sauf la Russie, punie d'avoir annexée l'Ukraine la semaine dernière. Au menu de son agenda allégé, des "réunions de travail". Son agenda officiel était vide. Lundi, Ayrault a expliqué à quelques responsables socialistes qu'il avait entendu "le message des Français qui réclament davantage de justice sociale".
Faut-il attendre un changement, une inflexion ? Non. Le Pacte d'(Ir)responsabilité sera présenté en avril. Quelques éditocrates finissent par s'inquiéter qu'un nouveau premier ministre ne soit pas à même de vendre cette affaire.
François Hollande est rentré un peu plus tôt parce qu'il avait un président chinois à accueillir. Le patron de la plus grande dictature du globe est en France, à Lyon, pour 3 jours. Il n'y avait pas de supporteurs socialistes agitant des drapeaux dans les rues, comme lorsque Nicolas Sarkozy recevait le même dictateur en France il y a quelques années. Mais l'accueil sera "exceptionnel".
Real-politik, quand tu nous tiens, tu nous fait honte.
4. Pour une fois, la première sans doute depuis que Hollande encaisse seul, avec Ayrault, le choc d'impopularité (août 2012), nombre d'élus socialistes sont (enfin) paniqués. Le Monde, sous la plume de Bastien Bonnefous et David Revault d'Allonnes, commente: "une forme de panique politique a saisi les socialistes, à tous les étages du pouvoir". Ils ont la trouille. Solidariser les élus socialistes, petits ou grands barons, sur le sort de l'équipe qui gouverne est peut-être la meilleure conséquence à attendre de la suite de ce scrutin détestable. La défaite était attendue. Mais "la surprise, c'est l'ampleur" (un conseiller).
"Un peu partout en France, la jeunesse nous a manqué ; les couches populaires se sont détournées ; les classes moyennes nous ont évités ; les banlieues et les campagnes se sont terrées. Il faut savoir entendre les silences."
Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale
6. La victoire médiatique du Front national provoque quelques errements. L'un des combles du ridicule fut atteint et dépassé par le directeur du Festival d'Avignon, terrifié à l'idée que sa ville passe au Front. Courageux, l'homme annonça dès lundi que "son" Festival quitterait la ville si le FN s'emparait de la mairie. Quel courage!
Plus loin, au sein de l'opposition de gauche, on se félicite d'une victoire, on clame que le FN n'a pas gagné, que c'est le réveil de la vraie gauche. La défaite de dimanche n'est pas la victoire de la gauche. Vu de droite, c'est évident. Vu de France, aussi. Additionnez tous les scores que vous souhaitez, la gauche sort perdante.
Au final, toutes composantes confondues, dans son acceptation la plus large, sans faire de tri aucun, les listes de gauche ont rassemblé 37,74% des suffrages. Et l'abstention, qu'on pense importante parmi l'électorat de gauche, a atteint 38,6%.
Qui ose donc crier victoire ?