Soudain, c’est la métamorphose. Il se retrouve dans les airs. Son coeur bat à se rompre. Fini la limitation terrestre. Il s’élève selon son bon vouloir. Il peut tournoyer au gré de ses fantaisies. Liberté enfin retrouvée. Il se retrouve. Comme si la période terrestre n’était qu’un temps de pause entre deux envols, un instant de maturation entre deux métamorphoses.
Dans une étendue céleste si vaste, il se sent petit, humble et respectueux. Sa liberté de mouvements lui donne la sensation de faire parti de cette force de la nature. Il se sent accueilli, respecté et aimé. La libre expression de ses changements d’attitudes de vol lui font ressentir la paix et le calme intérieur.
L’ambiance de vol n’est plus la même. La densité de l’air a changé. La température de l’air fait un bond important. Il sent un peu de confusion dans son coeur. Il ne réussit plus à voir aussi loin. Le décor commence à grisonner. Il ressent que ces signes avant-coureurs annoncent l’arrivée d’un changement majeur. L’instinct naturel de cet oiseau lui permettra d’être à l’écoute de ces signes. Sans plus tarder, il redescend tranquillement, avec prudence. Même si ce vol est sa passion, il sait qu’il est préférable, pour un certain temps, de redescendre vers cette terre limitative. Prendre le temps de se ressourcer pour son prochain envol.
Tous et chacun se sont abrités, le temps d’une crise. Le vent s’est levé. Le vol n’aurait pu se continuer dans des conditions de sécurité. La force du vent dépassait largement les capacités de vol de cet oiseau. Le tonnerre gronde à vous en faire perdre tout votre calme. Les éclairs fulminent dans ce ciel déchaîné. Même le soleil semble s’être caché derrière cette masse imposante de nuages noirs. Ces nuages qui s’élèvent à l’infini dans le ciel, comme des tours démoniaques. Ces nuages qui, à leur base, créent des vents ascendants d’une force insoupçonnable. C’est à leur base que tout semble si calme, mais qui pourtant, rassemble toutes ces turbulences, capables de vous déchirer une aile en plein vol.
Après une forte avalanche de pluie et de grêle, le ciel se dégage et retrouve son calme habituel. Sur la plage, face à un ciel vaste et dégagé, un oiseau s’étire et se prépare à prendre son envol. Pendant sa métamorphose magique, cet oiseau médite un peu sur la condition humaine.
Si, comme un oiseau, les hommes pouvaient avoir le courage de prendre leur envol.
Si, comme un oiseau, les hommes pouvaient avoir la volonté de s’exprimer en toute liberté, en se respectant dans leurs attitudes.
Si, comme un oiseau, les hommes pouvaient apprendre à lâcher-prise de temps à autre pour se ressourcer.
Si, comme un oiseau, les hommes pouvaient apprendre à rester collés à soi, sur leur terre, pour éviter de se perdre dans la tempête.
Ce jour-là, peut-être, l’homme aura atteint la sagesse nécessaire pour rejoindre l’oiseau dans son calme et sa paix intérieure.
Dédié à tous mes amis et confrères de l’aviation.
À tous ces amis qui ont pris leur envol avec moi.
À tous ceux qui n’ont pas eu la chance de revenir au sol
Et qui sont restés dans ce ciel vaste et éclairé.Amitié,
Raymond.
Extrait du livre Après la pluie… Le beau temps.
Toile de l’oiseau du muraliste Arpi. Toile de la tempête, Luc Bouchard.