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RZA, du Wu-Tang au cinéma et inversement

Publié le 25 mars 2014 par Wtfru @romain_wtfru

rza

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Semaine de liesse pour tous les amateurs de hip-hop, le Wu-Tang Clan a leaké un nouveau son, très efficace. On le sait, le leader de la formation légendaire de New York A.K.A. Robert Diggs A.K.A. Bobby Digital A.K.A. The RZA est un grand fan de cinéma hongkongais et de l’Asie de l’Est en général. Cette passion qu’il a pour les moines shaolin et leur code de conduite a régi sa carrière et sa musique. Mais comme tout rappeur qui se respecte, RZA a aussi beaucoup travaillé dans l’audiovisuel. Sauf que comparé à des types comme Snoop Dogg, Xzibit, Ice Cube ou autres Ice-T (tout aussi bons rappeurs au demeurant), RZA n’a pas tourné dans des productions consanguines plus ou moins efficaces, avec un yes man derrière la caméra DV, des rappeurs qui se tirent dessus pendant 1h30 et qui enchaînent les gros mots comme des perles, du type Thicker than Water (avec MC Eiht, Mack 10 et Ice Cube) ou Tha EastSidaz (avec Snoop Dogg, Tray Deee & Goldie Loc). En effet, RZA a su faire une carrière atypique en s’attirant les amitiés de types qui comptent dans le paysage cinématographique mondial.

Dès le début de sa carrière cinématographique, ça sentait très bon pour Bobby Diggs, qui a tout de suite collaboré avec un très grand, Jim Jarmusch. Effectivement, en 1999, le leader du Wu-Tang Clan compose la musique de Ghost Dog: La Voie du Samurai. Racontant l’histoire d’un tueur à gages joué par l’immense Forest Whitaker vivant selon les préceptes de l’Hagakure, Ghost Dog est un film d’une douceur insoupçonnée entrecoupé de fusillades stylisées au maximum. Le film de Jarmusch parvient parfaitement à associer la rugosité des beats composés par RZA (et de l’imagerie hip-hop représentée de manière très fine comme cette scène où le vieux mafieux se prend pour Flava Flav dans sa salle de bains), la droiture des différents codes d’honneur du film, samuraï comme mafieux et la plénitude du personnage de Forest Whitaker. Véritable chef d’œuvre injustement oublié au moment des récompenses diverses, Ghost Dog possède avant son dénouement un caméo fantastique de RZA, qui y apparaît en samurai camouflé, échangeant un énigmatique dialogue avec le protagoniste principal ”Power Equality Always See (C) Everything, my brother”, ce qui veut dire PEACE. Prodigieux.

Peace, my brother

Peace, my brother

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C’est cependant en 2003 que commence réellement les choses sérieuses. On retrouve RZA dans Coffee and Cigarettes, toujours dirigé par Jim Jarmusch, aux côtés de son compère du Wu-Tang/cousin GZA et de Bill Murray dans le segment Delirium, souvent considéré comme le plus drôle de tous. Couronné d’un succès critique, le film lui permet de se montrer en tant qu’acteur. La même année, il fait partie de l’aventure Kill Bill, le diptyque overrated de Quentin Tarantino en tant que compositeur. Ses morceaux sont relégués au second plan tant on pense plus aux chansons qui illustrent le film mais sa musique renforce de manière décisive quelques séquences du premier volet, infiniment supérieur à sa conclusion très pénible, où Robert Rodriguez s’occupe de la musique (comme c’est étrange).

Pourtant passé par la machine QT et par Jim Jarmusch, RZA voit sa carrière cinématographique redescendre. Il signe le score de l’hilarant Soul Plane en 2004, une comédie extrêmement débile et graveleuse jusqu’à l’extrême et la jouissance signée Jesse Terrero (avec Method Man). Le film raconte l’histoire d’un type resté coincé dans les toilettes d’un avion qui décide d’acheter une compagnie aérienne avec ses dommages et intérêts, la N.W.A. Tout un programme. Si voir un strip-club dans un avion, un aveugle obsédé sexuel joué par l’exceptionnel John Witherspoon qui doigte une pomme de terre et les Ying Yang Twins jouer leur inoubliable Salt Shaker vous intéresse, Soul Plane est le film pour vous.
La même année, on le retrouve sur Blade: Trinity, dont il signe encore la bande son avec Ramin Djawadi, futur compositeur de Game of Thrones. Le film étant ce qu’il est (un troisième opus décevant d’une saga qui a connu le firmament avec un chef d’œuvre pour deuxième épisode), impossible de bouder son plaisir devant la scène centrale, au son de Fatal, une des meilleures chansons de film de cette décennie, sauvage et grandiloquente, comme RZA sait les faire. Il faut attendre jusqu’en 2007 pour entendre une nouvelle composition de RZA, pour le manga Afro Samuraï, une semi-déception tant il semblait parfait sur le papier. Imaginez Samuel L. Jackson en samurai afro solitaire, qui cherche à devenir le plus grand d’un Japon mi-féodal mi-futuriste et en ame damnée de ce samurai. Cela aurait dû être un classique, ce n’est qu’un plaisir non coupable mais pas vraiment inoubliable (surtout quand Samurai Champloo est passé par là).

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C’est effectivement en tant qu’acteur qu’on va désormais retrouver RZA au cinéma, à partir de 2005, malheureusement dans des films qui ne vont pas marquer l’histoire du cinéma, sans pour autant que ceux-ci soient des navets. Il joue dans Derailed de Mikael Hafstrom, un sympathique thriller de série avec Clive Owen, Vincent Cassel, Jennifer Aniston dans un contre-emploi et Xzibit, où il incarne le meilleur ami du héros.
On l’aperçoit ensuite dans trois films inédits en France, The Lather Effect, une comédie dramatique et dans The Box, un thriller avec Gabrielle Union et Giancarlo Esposito. Ce dernier le dirige dans Gospel Hill, un drame sur un meurtre raciste qui revient hanter une famille Afro-américaine, avec Danny Glover, Angela Bassett et Julia Stiles. C’est en 2007 qu’il fait son retour sur les écrans français, avec la fresque policière de Ridley Scott, American Gangster. Sans être un classique, le film du moins cool des frères Scott reste un thriller de très bonne facture, contant l’histoire de Frank Lucas, interprété par Denzel Washington, baron de la drogue dans le Harlem des années 70. RZA y apparaît en collègue de Russell Crowe, qui joue le flic chargé d’arrêter Frank Lucas. Sa présence est remarquée, à défaut d’avoir un large temps d’écran. Ceci l’envoie dans Life is Hot in Cracktown en 2009, l’auto-adaptation du livre de Buddy Giovinazzo, chronique d’un block de Manhattan gangréné par le trafic de crack dans lequel Bobby Digital y jouait un baron de la drogue. Malheureusement, le film n’est pas sorti en France et n’a pas connu un succès public aux USA. On le retrouve cependant en salles la même année dans le navet pathétique de Judd Apatow (qui avait ouvert En cloque, mode d’emploi avec Shimmy Shimmy Ya d’ODB), Funny People, horrible pensum prétentieux et complaisant de deux heures et demie sur un comique détestable joué par Adam Sandler. RZA n’y fait qu’un petit caméo en début de film, tant que le spectateur est réceptif, heureusement pour lui (on ne peut pas en dire autant d’Eminem, dont la scène atteint des niveaux de nullité crasse assez élevés).
Dans le même genre, RZA apparaît dans un autre caméo rapide avec  Date Limite, comédie naze du non-moins nazebroque Todd Phillips, où il joue un employé d’un aéroport.
Son dernier caméo en date remonte à 2011 avec le très jouissif (et accessoirement meilleur de la saga) A Very Harold & Kumar Christmas 3D de Todd Strauss-Schulson, excellente stoner comedy furieusement drôle et étonnamment tendre, où il bénéficie d’une scène écrite totalement pour lui. RZA retrouve les rôles plus importants avec son petit passage décisif dans Repo Men en 2010, un film un peu raté de Miguel Sapochnik, qui tente quand même de tenter quelque chose de nouveau dans le domaine assez moribond de la SciFi. Il y joue un musicien endetté que Jude Law doit secouer pour recouvrer l’argent que RZA doit à la société qui l’emploie. Bobby Diggs y montre, avec brio, une facette qu’on ne connaissait pas chez lui dans la mesure où son rôle doit procurer de l’émotion chez le spectateur. Dommage que le film ne soit clairement pas au niveau les deux heures durant. Il apparait ensuite dans un arc scénariste de la saison 5 de Californication.

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Badass Motherfucker

Badass Motherfucker

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En 2012, RZA rentre définitivement dans la cour des grands. Il réalise son premier film (après avoir déjà tenté sa chance dans les 90’s), véritable hommage à son amour de la culture shaolin: The Man With the Iron Fists. D’abord imaginé comme un diptyque avec le Django Unchained de Tarantino, où son personnage, Thaddeus, devait apparaître dans quelques scènes, The Man With the Iron Fists, à défaut d’être un film parfait, est un film de cinéphage amateur de Hong Kong période Shaw Brothers. Cependant, l’aventure a refroidi le rappeur qui s’est même absenté deux semaines pendant le montage. En effet, cette histoire de vengeance d’un seigneur chinois aidé par un forgeron ancien esclave d’une plantation de coton et un policier opiomane devait durer quatre heures et exploiter son univers si particulier au maximum, sur deux films. Mais Eli Roth (toujours là pour foutre le boxon, celui-là) refusa et le poussa à livrer une version d’1h36 pour le cinéma. En résulte un film d’une maladresse parfois déroutante, au scénario un peu simpliste avec des raccourcis obscurs et des effets spéciaux un peu crades. Mais The Man with the Iron Fists est aussi un film exceptionnellement divertissant, au potentiel passionnant, à la musique très réussie (entre chansons bien choisies et un score génial composé par RZA et Howard Drossin) qui peut être revu plusieurs fois sans s’en lasser, à l’imagerie et à la mythologie éblouissantes, avec des acteurs qui cabotinent joyeusement comme Russell Crowe, Rick Yune (le X-Blade, un seigneur avec une armure qui lance des lames), Byron Mann (splendide bad guy aussi machiavélique qu’hilarant) et surtout Lucy Liu en mère matrone dangereuse et séduisante. Cette dernière est tout bonnement géniale. Le film recèle de quelques scènes dantesques, comme le combat des Gémeaux ou le premier combat de Zen-Yi, le X-Blade. Ne serait-ce que pour cela, The Man With the Iron Fists est un petit bijou imparfait qui en devient presque touchant. En tout cas, c’est indispensable.

Depuis, RZA est apparu dans son tout premier blockbuster, le gentil G.I. Joe : Retribution de Jon M. Chu, dans lequel il jouait un rôle qu’il se devait de jouer au moins un jour: le Blind Master de Storm Shadow et de Snake Eyes, qui envoie Jinx et Snake Eyes appréhender Storm Shadow. Ce sont les scènes les plus réussies du film, d’ailleurs. Toujours en 2013, il est allé en Thaïlande tourner sous la direction de Mr. Ong-Bak Prachya Pinkaew dans Tom Yum Goong 2, un film de baston en 3D où RZA joue le méchant américain capitaliste, le lot de tout Américain dans un film est-asiatique. Son prochain rôle sera encore un méchant, celui de Brick Mansions, le remake de Banlieue 13 réalisé par le yes man Camille Delamarre, toujours sur un scénario de Luc Besson. C’est aussi le dernier film de Paul Walker avant sa mort. R.I.P. Brian O’Conner.

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RZA est vraiment trop laid en Blind Master, on le préfère en bad guy.

RZA est vraiment trop laid en Blind Master, on le préfère en bad guy.

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RZA s’affiche désormais comme un second rôle solide qu’on aimerait revoir dans des films plus ambitieux, chez des réalisateurs aussi exigeants que Jarmusch ou Tarantino, à l’image d’Xzibit chez Werner Herzog, par exemple. Pourquoi ne pas réaliser un second film, aussi ? S’il n’est pas le plus talentueux des rappeurs/acteurs (Ice Cube remporte la Palme, ne serait-ce que pour les jouissifs Torque, Trespass et XXX² et les hilarants Are We There/Done Yet ?), RZA fait partie des plus atypiques. Espérons qu’il garde cette particularité.

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