Ouai. Clairement ouai on est déçues par le nouveau Black Keys. Les papiers du divorce sont sur la table du salon. On se demande si Pat et Dan vont pouvoir encore se raccrocher aux branches, que dis-je, aux brindilles pour nous récupérer. Pour nous séduire de nouveau, pour susciter de l’excitation, de l’émerveillement. Pour nous faire lâcher les mêmes petits cris qu’on avait poussés en écoutant Magic Potion, Attack & Release ou Brothers. Avec le temps, évidemment, les aspirations ne sont plus les mêmes, les chemins se séparent. L’un veut plaire à plus de monde. L’autre veut garder sa chose, son précieux, pour lui tout seul. On le sait pourtant. The Black Keys crade, bluesy, sexy des débuts n’est plus. Ils sont devenus propres et beaux. Dan a même fait disparaître sa longue barbe hirsute. Pat a l’air de sortir d’une école de commerce. Et le groupe s’est suicidé sur l’autel de la pop un peu mainstream. Oui, c’est vrai, dit comme ça, ça fait très hipsters. On l’est tous quand il s’agit d’un groupe qu’on écoute depuis longtemps, avant qu’ils soient des superstars. Le mainstream, on n’a rien contre, même que parfois c’est super, surtout, quand on galère longtemps (dix ans?). Une fois que l’on a connu le succès, le top du top des ondes radios, on n’a plus envie de le quitter. C’est normal. On comprend mais on a mal. Première fissure dans le cœur avec El Camino.
Après l’horrible et inaudible El Camino, Pat et Dan ne pouvaient plus reculer. Ils étaient devenus le groupe qui avait signé le tubesque (mais si dégueulasse) "Lonely Boy", ils sont les têtes d’affiches des festivals, ils sont le groupe qui font tomber les t-shirts des jeunes demoiselles en concert qui ne connaissent que ce titre-là. Cf Rock en Seine 2012 où la Grande Scène s’est vidé une fois le titre tant connu expédié. Impossible de faire marche à arrière, pour resservir des titres un peu difficile d’accès pour certains, trop référencer pour d’autres. La batterie devient moins folle, les arrangements plus propres, la guitare s’efface. Black Keys est de moins en moins un duo, de plus en plus un groupe avec beaucoup trop d’instruments, moins d’urgence, moins de blues, moins de souffrance. La fissure s’agrandit. Le cœur est pratiquement brisé. On en tomberait presque à la renverse. Dans un grand mouvement théâtral, un peu à la Romy Schneider dans Sissi l’Impératrice, on s’écroulerait sur notre lit et on laisserait échapper de gros, vraiment très gros, sanglots.
Mais, Black Keys et nous, c’est quand même une longue histoire. Une longue histoire d’amour et évidemment, même si on sent la fin de l’histoire arriver à grand pas, on aime parfois se remémorer les bons moments. Avec nostalgie et tendresse, on se repasse les vieux morceaux, les titres qui ont ponctué notre vie, qui nous ont fait vibrer, pleurer, onduler des hanches, sauter au plafond, arracher les rideaux, trembler les murs. C’est pour cette raison-là, avant la rupture, qu’on a voulu faire une playlist avec les meilleurs titres. Nos préférés à nous. On espère alors que ce n’est qu’une mauvaise passe, parce que dans toute histoire d’amour, il y a des hauts et des bas. On espère juste que "Fever" c’est le fond du marécage. On espère qu’avec l’album à venir ils n’essaieront pas de creuser dans la terre mais plutôt de nous sortir la tête de l’eau. En attendant,on décapsule une bière, on branche le jukebox.
Girl is on my mind
Thickfreakness
I Got Mine
Just got to be
Howling For U
The Flame
Your Touch
Things Ain’t Like They Used to Be
Too Afraid to love you
Busted
Bonus : l’EP Live Your Touch