Un film de Philippe Godeau (2013 - France) avec François Cluzet, Bouli Lanners, Corinne Masiero
M'ouais.
L'histoire : L'histoire vraie de Toni Musulin, qui défraya la chronique il y a quelques années en braquant son propre camion de transport de fonds. Un gars ordinaire, attiré par le luxe, rêvant de la grande vie, et de son passage à l'acte, après qu'on lui ait refusé pour la énième fois une journée de congé... Faut dire que ça doit être perturbant de voir s'agiter devant vous toutes ces liasses de pognon, jour après jour !
Mon avis : D'abord, je me demandais bien à quoi servait de faire un film sur cette affaire. Un braquage de plus, le quotidien, quoi... Rien de franchement spectaculaire d'ailleurs. Mes doutes se sont confirmés, ça n'a pas beaucoup d'intérêt.
Ce n'est pourtant pas mal fait, au contraire. Mise en scène fluide, suffisamment rythmée. Des tonalités de gris, tristes et mélancoliques, bousculées de temps à autre par le rouge de la Ferrari, achetée aux enchères, symbole d'une vie rêvée, autrement plus fascinante et joyeuse. Contrairement aux films de ce genre, on s'attache ici à la psychologie du personnage, un taiseux, pétri de contradictions, et le contexte social ; bien vu. Sauf que ne sont pas du tout évoqués son origine yougoslave, son intégration plutôt réussie, mais ses supposés liens troubles avec des personnalités peu reluisantes du pays de ses parents. Pas de tentative d'explication non plus concernant son train de vie, plutôt élevé pour un type qui gagnait 1700 euros par mois, qui a étonné les policiers et les juges. Godeau ne relate que les faits, et le problème, c'est qu'ils restent énigmatiques encore aujourd'hui... ça donne trop de flou au film.
Le scénario n'est donc qu'à la hauteur de la réalité connue : un type pas très sympathique, taiseux, une vie ordinaire, un braquage, et puis son étonnant revirement, allant se livrer à la police quelques jours plus tard. On peut toujours imaginer que le type regrette, cherche l'absolution par la case prison tout en ayant gardé planqués 2 millions sur les 11.6 (ce qu'il a toujours nié)... sa petite commission personnelle pour une vie désormais telle qu'il la rêvait, telle qu'il la "mérite", après des années d'humiliation au quotidien par des patrons et des banquiers pleins aux as. Il a été libéré fin 2013 et a disparu des médias. Donc on ne connaît pas la suite. Le mystère continue...
Les voleurs ne m'ont jamais réellement choquée et celui-là pas plus que les autres. D'habitude, je les trouve même plutôt sympas ! Tant qu'ils ne tuent pas, leur audace m'amuse le plus souvent ! Et puis, les pauvres qui améliorent leurs fins de mois en prenant l'argent où il est, ça n'est que le retour d'une injustice généralisée... et les plus vicieux qui visent le gros butin, je loue leur ingéniosité ! Les "victimes" sont assurées, alors je ne vais pas pleurer... Si ça m'arrivait ? Je serais en colère quelques jours sans doute, parce que je ne fais pas partie des "riches", alors qu'on me laisse profiter tranquille des petits acquis que j'ai et qu'on se serve plutôt chez les gros capitalistes pleins de tune. Mais je ne suis pas matérialiste, alors après le chèque de l'assurance, même s'il n'est pas à la hauteur de mes maigres possessions, je crois que le traumatisme passerait assez vite...
Cette histoire a un fort goût de vu, revu et rerevu. La banalité de notre quotidien décadent. Trop banal... un héros ordinaire, une histoire presque ordinaire, et trop de questions sans réponse. On a peine à s'extasier, et sur l'opération, et sur le bonhomme. Or, le paradoxe du film de braquage... c'est que pour nous captiver, il nous ressentir un minimum d'empathie pour le "héros" ; ils fonctionnent quasiment tous comme ça, à commencer par la saga des Ocean ! La vision du cambrioleur et de ses oeuvres est un petit plaisir coupable ! Or ici, Toni ne nous émeut pas du tout et ne nous tire pas le moindre sourire.
Cluzet joue sobre, parfait. Il rend le personnage bien antipathique, secret, renfermé sur son petit destin personnel, égoïste et manipulateur. Toni était comme ça, d'après ce qu'on en sait. Ses potes sont beaucoup plus sympas : Corinne Masiero - la compagne - et Bouli Lanners - le copain - sont infiniment justes et touchants. Pour moi, ce fut une révélation : quels beaux acteurs !
Avis partagés dans les critiques, presse et public, avec une moyenne pas très folichonne.
Bon, voilà, je parle, je parle, et en fait ce film n'en vaut pas la peine, à part l'interprétation...