« Par son instinct, un animal est déjà tout ce qu’il peut être, une raison étrangère a déjà pris soin de tout pour lui mais l’homme doit user de sa propre raison (…) or puisqu’il n’est pas immédiatement capable de le faire (…), il faut que d’autres le fassent pour lui. L’homme pour vivre a besoin d’une transmission du savoir ou de la connaissance ». Cette transmission passe par l’information or jamais l’information n’a été aussi abondante et son accès aussi facile qu’aujourd’hui. On estime que chaque année l’humanité produit l’équivalent en informations de quoi remplir assez de disques qui, empilés les uns sur les autres, permettraient de faire l’aller-retour de la terre à la lune.
Le savoir est devenu la ressource
Qu’est ce qui différencie une innovation d’une idée rapidement reléguée au rang de simple tentative ? La réponse réside dans la diffusion de cette dernière. Beaucoup d’inventions ayant permis le développement économique des nations européennes sont apparues en Chine de nombreux siècles plus tôt : la poudre à canon, la boussole, le billet de banque. Pourtant ces inventions ont disparu de la société chinoise car elles ne sont pas devenues des innovations, autrement dit il n’y a pas eu diffusion de la connaissance.
Le savoir est devenu la ressource. Oui, devenu car il ne l’a pas toujours été. En amont de la production il y a déjà de la connaissance. L’information d’une part et la frontière technologique d’autre part sont aujourd’hui des données fondamentales pour être compétitif.
La connaissance ne tombe pas du ciel
Dès lors que la connaissance repose sur des savoirs techniques et que ces savoirs sont susceptibles d’être rentabilisés, des entreprises interviennent dans la connaissance et contribuent à son financement. Elles prennent le risque de certains coûts en recherche et développement pour prendre l’avantage sur des concurrents de manière à pouvoir influer sur les prix. Or au sein d’un tel schéma, le système éducatif est essentiel et pourrait même expliquer le retard français par rapport à l’Allemagne. Le système éducatif de cette dernière est davantage orienté vers la professionnalisation que l’apprentissage.
Est ce vraiment la meilleure solution lorsqu’on connaît l’histoire de la pensée humaniste française orientée vers le savoir encyclopédique ? Les entreprises françaises déposent moins de brevets que les entreprises allemandes, ce qui tend à montrer que la complémentarité entre le système éducatif et le système productif serait insuffisante. D’un côté l’éducation apparaît essentielle pour la croissance. Comme disait De Gaulle : « des chercheurs qui cherchent on en trouve et des chercheurs qui trouvent on en cherche ».
La course à la compétitivité
Les Etats sont ici dans une course à la compétitivité qui est d’autant plus importante qu’en 10 ans le secteur des TIC les exportations de biens d’un pays comme la Chine ont été multipliées par 10. On est passé de moins de 20 milliards en 1995 à plus de 200 milliards en 2005. Sur la même période les exportations de biens des TIC ont augmenté de 20%. Cela pose d’ailleurs problème au niveau de la structure des marchés à laquelle conduit l’économie de l’information. En effet, si l’on admet que la valeur d’un réseau dépend du nombre d’utilisateurs, l’économie de la connaissance produit une structure très oligopolistique voire monopolistique avec tous les dangers en termes de pouvoir de marchés auxquels cela peut conduire. Comme le coût marginal est nul ou quasi nul, le risque n’est plus la rareté des ressources mais la surabondance et il va donc s’agir désormais de discerner quelles sont les bonnes informations au milieu d’une foule d’informations inutiles.
La connaissance semble être devenue un facteur de compétitivité essentiel. Il s’agit d’en maîtriser la diffusion, la production et l’émergence de façon à maximiser les externalités positives mais il faudra aussi en maîtriser la consommation puisque l’information est devenue abondante voire surabondante et que celle ci est en général fournie de manière imparfaite et asymétrique et donc coûteuse. C’est pourquoi on constate que les différents opérateurs ou fournisseurs d’indices sur les marchés boursiers sont accusés aujourd’hui d’abus de position dominante. N’étant soumises à aucune réglementation, elles augmentent sans cesse leurs prix depuis 3 ans, Bloomberg allant même jusqu’à multiplier le prix des ses offres par 4 pour certaines voire 24 pour d’autres. Il s’agit là de la réalisation de la crainte citée plus haut, à savoir l’apparition d’un oligopole de l’information.