D’après le pape François, Jésus ne demandait pas « Connais-moi ! », mais « Suis-moi ! ». Dans l’Évangile, Jésus s’adresse à ses apôtres et leur demande : « Pour vous qui suis-je ? » (Mc 8 27). Jésus s’adresse à chaque chrétien et nous demande : « Mais pour toi qui suis-je ? ». « Cette question…, dit le pape François, ne se comprend que chemin faisant, après une longue marche, faite de grâce et de péché, la marche d’un disciple. Jésus n’a pas dit ‘ Connais-moi! ’, mais ‘ Suis-moi ! C’est en suivant Jésus qu’on apprend à le connaître… Il faut rencontrer quotidiennement le Seigneur, tous les jours, dans les victoires comme les faiblesses. ’»
La connaissance intellectuelle de Dieu, ce n’est donc pas vraiment le connaître. Or, les philosophes sont réputés ne connaître Dieu qu’intellectuellement. C’est comme apprendre l’existence de l’ornithorynque, sans jamais en avoir rencontré. On se dit alors : « Ah bon; je ne savais pas… Je vais me coucher moins sot ce soir… » Ce type de connaissance ne nous affecte en rien. Il n’en va pas de même de la connaissance de Dieu. C’est la « connaissance sensible au cœur » selon le mot de Pascal. Aussi, devant la question : « Pourquoi je crois en Dieu », Maurice Zundel va jusqu’à écrire : « Je ne crois pas en Dieu, je le vis. »[1] Comme dit le pape François, vivre Dieu, c’est suivreson Fils, Jésus. Connaître, écrit de son côté Zundel, c’est « co-naître». « Pour connaître authentiquement, il faut naître à une vie authentique. »[2] Cela me rappelle ce mot du Père Sertillanges : « Pour juger vrai, il faut être grand. »[3]
Tout cela nous conduit à la conclusion selon laquelle connaître Dieu, ce n’est jamais qu’un simple constat d’un fait anecdotique, à savoir que Dieu existe, c’est faire une expérience renversante, faite justement de « retournement », de transformation; bref, de conversion. À ce moment précis, celui ou celle qui « connaît » Dieu, acquiert un savoir transfigurant. Une transformation complète de la personne s’effectue en elle : sa vision du monde et d’elle-même change du tout au tout. Même la mort, de lugubre et effroyable qu’elle paraissait auparavant, c’est-à-dire avant la conversion, devient douce et bienveillante.
C’est à ce moment précis de conversion que naît la foi, qui n’est pas l’abdication de la raison, mais la compréhension qu’il existe un mystère, une réalité, une vérité, qui dépasse la raison humaine. Or, qui dit vérité, même mystérieuse, dit « connaissance ». La foi est donc bel et bien une connaissance. Évidemment, celui ou celle qui n’a pas fait cette expérience de conversion, ne peut admettre l’existence de cette « vérité » que la raison humaine ne peut s’expliquer.
Aussi, lorsque Jésus demande « Qui suis-je ? », il ne demande pas « connais-moi ! », mais « Suis-moi ! ». Le Seigneur demande plutôt « Convertis-toi ! ». Il vient alors à toi pour te transformer, te transfigurer. Pour te dire qu’Il t’aime, et qu’Il souhaite recevoir en retour ton amour.
[1]Maurice Zundel, « Pourquoi je crois en Dieu », in La Vérité, source unique de liberté, Articles de Maurice Zundel, Tome 1, Québec, Anne Sigier, 2001, p. 145. [2] Maurice Zundel, « Vérité et liberté », p. 39. [3]A-D. Sertillanges, La vie intellectuelle. Son esprit. Ses conditions. Ses méthodes., Paris, Revue des Jeunes, 1944, p. 33.