Bourrasque de particules solaires se précipitant à prés de 3 000 km/s vers le satellite STEREO A le 23 juillet 2012 – A quelques jours prés, la Terre était impactée par cette super-tempête solaire
Une des plus puissante tempête solaire connue se dirigeant vers l’orbite terrestre le 23 juillet 2012, nous a heureusement épargnée, à quelques jours prés. Potentiellement aussi intense que celle qui affecta la haute atmosphère terrestre en 1859, celle-ci aurait eu des conséquences désastreuses pour nos sociétés connectées.
D’après une récente étude publiée dans Nature Communications (18 mars 2014), nous l’avons échappé belle le 23 juillet 2012 (et les heures qui ont suivi). Deux des plus puissantes tempêtes solaires de ces dernières années ont en effet coupé l’orbite terrestre sans nous heurter… Si cela s’était produit neuf jours plus tôt, la Terre aurait alors subi une intense tempête géomagnétique. Inutile de dire que nos satellites et une partie des infrastructures électriques — dont nous dépendons presque tous — auraient souffert de ces rafales de particules solaires propulsées dans l’espace à la vitesse foudroyante de 2 000 à 3 000 km/s (d’ordinaire entre 400 et 500 km/s. pour la majorité des éruptions solaires). Les dégâts matériels se seraient chiffrés à plus de 2 000 milliards de dollars selon une étude de la National Academy of Sciences. Bien sûr, les effets auraient été désastreux à l’échelle globale. « Une super-tempête solaire, bien que d’une faible probabilité, serait un événement aux conséquences énormes qui posent de graves menaces sur les infrastructures de nos sociétés modernes » avertit le professeur Ying D. Liu qui a conduit ces recherches (Laboratoire de météorologie spatiale à l’académie des sciences de Beijing, Chine). Outre son coût très élevé, il souligne qu’il nous faudrait sans doute entre 4 et 10 ans pour nous en remettre. « Par conséquent, il est primordial pour la sécurité et les intérêts économiques de nos sociétés modernes de comprendre les super-tempêtes solaires ».
Les deux violentes éjections de masses coronales (CME) espacées de 10 à 15 minutes furent particulièrement ressenties par un satellite. Au première loge et témoin privilégié de l’activité solaire à plusieurs dizaines de millions de kilomètres de la Terre, Stereo-A (Solar Terrestrial Relations Observatory-Ahead) endura « sans coup férir » les rafales de protons, quelque 18,6 heures après leur déploiement. Il apparait dans l’enquête que l’impact fut renforcé par leur cumul avec une première salve de plasma émise 4 jours plus tôt. Sans ces données collectées par Stereo A et son jumeau, Stereo-B — situé (presque) à l’opposé — lesquels offrent un point de vue remarquable en trois dimensions de notre étoile, les chercheurs n’auraient pu évaluer cet événement de cette ampleur.
Un événement intense potentiellement aussi dévastateur que celui de 1859
Ce qui a été observé le 23 juillet 2012 rappelle à l’équipe de physiciens deux événements dont fut témoin une partie de l’humanité dans l’histoire récente. Le premier, survenu durant l’ère moderne, un certain 13 mars 1989 reste dans les annales pour avoir plonger dans l’obscurité durant 9 heures plus de 6 millions d’habitants au Québec. Pourtant beaucoup moins intense, la tempête géomagnétique provoqua une immense panne du réseau électrique. Plus chanceux, les habitants du Texas se souviennent quant à eux des aurores boréales qui dansaient, une fois n’est pas coutume, dans leur ciel.
Le second, désigné « événement de Carrington » (car observé à la surface du Soleil par l’astronome Richard Carrington) fut, en revanche, beaucoup plus puissant et cataclysmique. Pour les auteurs, celui de 2012 était d’une ampleur comparable à ceux qui se sont enchainés à la fin de l’été 1859. Une série d’éjections de masses coronales venait alors d’impacter la magnétosphère terrestre. Les aurores qui déferlaient furent observées jusqu’à Tahiti ou Hawaï ! On raconte d’ailleurs qu’on pouvait lire le journal en pleine nuit ! Plus grave cependant, les courants électriques induits dans le sol endommagèrent le réseau télégraphique nord-américain, provoquèrent des incendies dans les bureaux des télégraphes ainsi que des électrocutions. Environ 5 % de l’ozone fut vraisemblablement détruit dans la haute atmosphère. On imagine aisément les conséquences pour nos sociétés interconnectées d’aujourd’hui si cela devait se produire…
Enfin, on notera que cet événement de 2012 qui nous a épargnés s’est déroulé durant la période proche du pic d’activité du cycle solaire 24. Comme tous les 11 ans en moyenne, notre Soleil apparait en effet plus animé. Cela se traduit notamment en surface par une hausse significative des taches sombres accompagnée d’une intensification des éruptions. Plus tardif et faible que les précédents — peut-être le cycle le plus faible de ces 100 dernières années ! —, force est de constater qu’il est tout à fait en mesure d’affecter notre petite planète et ses infrastructures lors de ces tempêtes les plus furieuses. « Si elle avait frappé la Terre, il aurait probablement été comme “the big one” de 1859 » assure Janet Luhmann (Université de Californie) qui a participé aux recherches.