Il y a quelques semaines, je consacrais déjà un article aux multiples candidats frontistes qui faisaient alors polémique en raison de leurs propos, de leurs actes ou encore de leurs positionnements idéologiques. A quelques jours du premier tour des élections municipales, il convient de faire un petit bilan sur l’état des listes du Front national. Si Marine Le Pen se réjouit de la présence de son parti dans 597 communes ce dimanche (un record), les nombreux cafouillages et autres irrégularités qui ont fait surface depuis le dépôt officiel des candidatures, viennent ternir les derniers jours de campagne du FN. Candidats néonazis, citoyens inscrits sans leur consentement, absence totale de parité, les listes frontistes restent plus que jamais d’extrême droite.
Des candidats qui viennent mettre à bas la stratégie de dédiabolisation
L’un des buts clairement affichés par le FN pour cette campagne municipale 2014, était de battre un record de candidatures afin de conforter sa présence dans les médias. C’est aujourd’hui chose faite. Cependant, à force de vouloir coute que coute former des listes et des listes, le parti de Marine Le Pen a fini par s’écarter de sa ligne stratégique, celle de la dédiabolisation, laissant ainsi souvent transparaitre sa véritable nature.
On ne compte ainsi plus les candidats frontistes qui depuis plusieurs semaines se font remarquer, non pas parce qu’ils ont des réponses crédibles à apporter à la crise sociale que traverse actuellement notre pays, mais parce qu’ils tiennent des propos ou ont des comportements antirépublicains et antidémocratiques.
A Cluses par exemple, en Haute-Savoie, un colistier FN s’est récemment fait remarquer en raison de ses commentaires islamophobes et de son affection particulière pour Mein Kampf. A Roanne, dans la Loire, c’est la tête de liste en personne qui s’est faite épinglée à cause de son adoration pour le dictateur fasciste italien Benito Mussolini.
Paul-Marie Couteaux, tête de liste dans le VIe arrondissement de Paris, a quant à lui été jusqu’à affirmer qu’il est nécessaire de "concentrer" les Roms "dans des camps". Des propos très certainement partagés par le négationniste, et non moins candidat FN dans le XIIe arrondissement, Pierre Panet.
La palme de l’ignominie revient cependant au candidat frontiste à Laval, en Mayenne. Celui- ci dit voir dans l’immigration "un cancer" et dénonce "l’africanisation" de la ville. Il explique par ailleurs que les immigrés africains "ne vivent pas au même rythme que nous" et envoient des "sommes importantes" en Afrique, gagnées selon lui "avec l’aide de la braguette du père de famille"…
Multiplication des suspicions de fraudes électorales autour des listes frontistes
Lorsqu’il ne trouve pas assez de néonazis pour boucler ses listes, le FN a une méthode imparable, il inscrit tout simplement des citoyens sans leur consentement ! Châlons-sur- Saône, Lillebonne, Bandol, Elbeuf, Orléans, Cuers, on ne compte plus les municipalités où des citoyens se sont ainsi retrouvés colistiers contre leur volonté. A Grand-Quevilly, en Seine-Maritime, ce n’est pas moins de 22 des 35 candidats présentés qui ont demandé à ce que leurs noms soient retirés de la liste.
Dans la plupart des cas, le parti d’extrême droite a profité de la faiblesse de certaines personnes, souvent âgés, pour les forcer à s’inscrire ou tout simplement les duper. A Louhans par exemple, un couple quasi analphabète, a ainsi été manipulé. A Orléans, il en a été de même pour un nonagénaire et sa femme atteinte de la maladie d’Alzheimer. A Villeneuve-lès-Avignon enfin, c’est un homme sous curatelle renforcée qui s’est retrouvé colistier…
Le FN est même allé jusqu’à maintenir la candidature d’une personne décédée il y a un mois, à Enghien-les-Bains dans le Val-d’Oise. Dans ces conditions, comment peut-on venir se pavoiser dans les médias et se féliciter d’avoir bouclé un record de listes ? L’extrême droite ne recule devant rien, ne respecte rien, ni personne, et c’est justement à cela qu’on la reconnaît !
Page Facebook du candidat FN à RoanneLe FN reste le parti le moins paritaire de France !
On aurait pu croire que l’arrivée de Marine Le Pen à la tête du FN s’accompagnerait de davantage de parité au sein du parti. Pourtant, sur ce sujet comme sur tant d’autre, rien n’a changé. On dénombre en effet parmi les têtes de liste frontistes pas mois de 83% d’hommes ! Un chiffre qui fait de la formation d’extrême droite la moins paritaire de France, loin derrière le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon qui présentera lui, près de 46% de candidates pour ces élections municipales.
L’extrême droite a toujours tenu un discours allant à l’encontre des droits des femmes. Son positionnement réactionnaire sur la question de l’IVG en est par exemple la preuve. Récemment, le député de la Ligue du Sud, Jacques Bompard, et non moins proche du Front national, a justement tenu à aborder le sujet de la parité lors d’une séance au sein de l’hémicycle.
Cependant, loin de s’offusquer de la surreprésentation des hommes parmi les têtes de listes frontistes, celui-ci s’est indigné de la sous-représentassions des femmes dans les prisons françaises. "Les établissements pénitentiaires accueilleraient 65 606 hommes, tandis qu’il n’y aurait que 2 214 femmes (…). Une telle inégalité femmes-hommes est inacceptable (…)". Risible !
Le Front national en campagne
Autre constat flagrant pour ces élections, le FN a décidé de favoriser son implantation dans les petites communes. On note clairement cette volonté si on fait la comparaison avec les élections de 1995, ou la formation d’extrême droite avait présenté un nombre de listes proche de celui de cette année (524 contre 563).
En effet, le parti était à l’époque présent dans 281 communes de plus de 20 000 habitants contre seulement 239 aujourd’hui. A l’inverse, il présentait 243 listes dans celles allant de 1000 à 20 000 habitants contre 324 cette année.
Ce constat est particulièrement visible en Ile-de-France, où le FN peine à s’implanter. En Seine-Saint-Denis par exemple, malgré les annonces faites il y a plusieurs mois, seules deux listes frontistes seront finalement présentées. Dans ce département où le taux de chômage avoisine les 17% et la part des ouvriers les 23%, il est intéressant de constater que le "parti des ouvriers" peinent à se constituer un socle électoral et une base militante conséquente.
Malgré les multiples polémiques qui ont surgit ces dernières semaines, le Front national peut compter sur la complaisance des grands médias. Il est à ce sujet choquant de constater que sur les quatre premières semaines de campagne, le parti d’extrême droite a eu un temps de parole particulièrement important sur les grandes chaines d’information. Il est par exemple de 43% sur BFM-TV¹, de 15.1% sur I-télé ou encore de 19% sur LCI. Des chiffres ahurissants pour un parti qui ne sera pourtant présent dimanche que dans près de 12% des communes de plus de 2000 habitants². Ce mercredi matin, les radios françaises faisaient elles aussi la part belle au FN, puisque des cadres du parti étaient présents simultanément sur France Info, France Inter et RMC !
¹ La chaine se défend aujourd’hui en expliquant que c’est un long reportage sur les "faux candidats" frontistes qui est responsable de ce chiffre ahurissant. Il n’en demeure pas moins que celui-ci a aussi permis aux leaders du parti d’extrême droite de longuement s’exprimer.
² Près de 5000 communes ont aujourd’hui plus de 2000 habitants (ce qui représente environ 75% de la population).