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[critique] Her : Androïd rêve-t-il de moutons électriques ?

Publié le 19 mars 2014 par Vance @Great_Wenceslas

Her : Avec son quatrième long-métrage, Spike Jonze nous parle de lui, mais également de nous. Film d'anticipation qui n'en a pas l'air, Her est avant tout une histoire d'amour tout ce qu'il y a de plus simple, malgré l'originalité de son concept. L'occasion pour le réalisateur de faire le point sur sa vie privée, tout en abordant un sujet universel qui parlera à chacun de nous. En s'affranchissant de Charlie Kaufman, Spike Jonze gagne en épure, en sensibilité, et nous offre son film le plus personnel et le plus touchant.

[critique] Her : Androïd rêve-t-il de moutons électriques ?

Quatre films et beaucoup de courts-métrages pour le touche-à-tout Spike Jonze, qui n'a jamais été autant sincère qu'avec sa nouvelle réalisation, une première pour lui en tant qu'instigateur de l'histoire et scénariste. C'est dire si le sujet semble lui tenir à cœur. En effet, les errances émotionnelles de ce personnage incapable de tourner la page après son divorce paraissent particulièrement évoquer la vie privée du réalisateur. Sans faire de la sur interprétation, il est assez intéressant de voir Her comme une réponse possible de Spike Jonze à son ex-femme, Sofia Coppola, qu'il avait accompagnée sur le tournage de Lost In Translation, un film sur la rencontre entre deux personnes perdues sentimentalement, incapables de s'adapter à leur environnement. Outre les fameux plans typiques de Sofia Coppola (personne qui regarde le paysage de l'intérieur d'un train en marche, soleil à travers les arbres…), on retrouve quelques similitudes parfois étonnantes dans le film de Spike Jonze, notamment dans une scène de comédie entre le héros et une femme entreprenante renvoyant directement à la séquence « lick my stockings » de Lost In Translation ou encore dans les inévitables conversations à demi-mots en plein milieu de la nuit sur un lit. On pourra aussi remarquer la présence de K.K. Barrett, production designer des deux films, ainsi que bien évidemment de Scarlett Johansson, toujours au cœur de ces romances « interdites », qui s'interrogeait sur la pertinence de son mariage récent dans le film de 2004.

[critique] Her : Androïd rêve-t-il de moutons électriques ?

Mais le plus intrigant reste l'arc narratif de Rooney Mara, interprétant l'ex-femme de Joaquin Phoenix, mais semblant surtout imiter Sofia Coppola, dans ses gestes, ses postures et ses attitudes et même dans ses goûts vestimentaires. Rien de négatif, juste une remise en question sur sa relation. On peut penser que l'homme se sert de son film pour tourner la page, avec tendresse et respect. Mais bien entendu, Her est bien plus qu'un film égocentrique. C'est une histoire universelle que met en scène Spike Jonze. Sous ses allures de film de science-fiction, le monde représenté à l'image est très proche du nôtre. Le Los Angeles futuriste (principalement filmé à Shangaï pour certains extérieurs) a quelque chose de crédible, de réaliste, et l'environnement technologique est une proposition envisageable de ce qui pourrait bientôt débouler dans le quotidien. Le but est bien entendu d'arriver à mettre en place un univers cohérent pour que les spectateurs ne remettent jamais en cause ce qu'ils voient, et surtout pour qu'ils croient à cette histoire d'amour entre Théodore et Samantha, son nouvel OS. Etrangement, alors que le concept est complètement délirant, on s'habitue à cette romance et on la trouverait presque normale. C'est la grande qualité d'un film qui joue constamment sur un équilibre fragile, jamais moqueur, à la limite d'être ridicule tout en ne l'étant à aucun moment. Car derrière l'aspect potentiellement malsain d'un tel postulat, la relation entre Théodore et Samantha n'est pas artificielle et paraît bien plus naturelle et évidente que bien des interactions humaines. La sincérité avec laquelle les deux « individus » s'unissent est désarmante, tout comme l'évolution de leur relation arrive à être touchante. La romance est somme toute très classique, très simple, et c'est en cela que l'identification fonctionne totalement. L'on ressort du film bouleversé, mais également rassuré…

En s'affranchissant de Charlie Kaufman, Spike Jonze met en scène un film beaucoup plus épuré, beaucoup plus sensible. Sa réalisation est subtile, d'autant que le fait de ne filmer quasi uniquement qu’un seul personnage tient de l'exploit narratif. Joaquin Phoenix est comme à son habitude absolument remarquable, et il est accompagné de comédiennes tout aussi douées. Bien entendu, on retiendra la performance hallucinante de Scarlett Johansson, venue remplacer Samantha Morton (qui avait enregistré tous les dialogues

Note sur 5 : 5
aux côtés des autres acteurs au moment du tournage). Mention à la photographie (un jeu decouleurs magnifique, entre le rouge/rose et des tons jaunes et bleus selon l'ambiance) et à la musique planante. Et l'on s'amusera du petit clin d'œil à Blade Runner au moment de l'installation du nouvel OS !

Her est clairement un film à ne pas manquer…

[critique] Her : Androïd rêve-t-il de moutons électriques ?

Titre original

Her

Mise en scène 

Spike Jonze

Date de sortie

19 mars 2014 avec Wild Bunch

Scénario 

Spike Jonze

Distribution 

Joaquin Phoenix, Scarlett Johansson, Amy Adams, Rooney Mara & Olivia Wilde

Photographie

Hoyte Van Hoytema

Musique

Arcade Fire

Support & durée

1.85 :1 en 35 mm / 126 min

 

Synopsis : Los Angeles, dans un futur proche. Theodore Twombly, un homme sensible au caractère complexe, est inconsolable suite à une rupture difficile. Il fait alors l'acquisition d'un programme informatique ultramoderne, capable de s'adapter à la personnalité de chaque utilisateur. En lançant le système, il fait la connaissance de 'Samantha', une voix féminine intelligente, intuitive et étonnamment drôle. Les besoins et les désirs de Samantha grandissent et évoluent, tout comme ceux de Theodore, et peu à peu, ils tombent

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