Celui qui n’existait plus (récit complet)

Publié le 19 mars 2014 par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Chronique  » L’homme qui n’existait plus ». Et si Norman profitait du 11 septembre pour disparaitre ?

Scénario de Rodolphe, dessin de Georges Van Linthout

Public conseillé : Adolescents-adulte

Style : Road-movie
Paru le 19 mars 2014, chez Vents d’ouest

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Histoire

Banlieue résidentielle de New-York. Un homme gratte à une fenêtre d’un pavillon, réveillant en sursaut une jeune fille. Elle va chercher sa mère, qui ne sait que faire. Voilà deux semaines que l’inconnu rôde près de leur maison. Elevant ses grands enfants seule depuis la mort de son mari, la femme ne sait vers qui se tourner ? La police lui promet des rondes et un voisin lui donne une arme…
Quelques mois plus tôt, Norman Jones, la quarantaine, directeur financier d’une société d’assurance florissante passe son temps chez sa maîtresse, au lieu de se rendre à ses rendez-vous professionnels. Lassé de sa vie, de sa routine, de sa famille, il se met à rêver de ses douze ans.
Quand le 11 septembre, le Boing 747 de l’American Airlines percute le World Trade Center, il est censé être dans la tour, à son bureau.
Norman revient chez sa maîtresse et lui annonce qu’il s’est débarrassé de toutes ses pièces d’identité et moyens de paiement.
Devant son incompréhension, il part, avec 20 dollars en poche, de nouveau libre de toutes entraves, prêt à refaire sa vie…

Ce que j’en pense

Qui n’a jamais eu envie de tout laisser tomber et de recommencer une nouvelle vie, son train-train, ses acquis, aa réussite sociale (pour certains) ?
L’envie folle d’entamer une autre vie, en effaçant tout, nous chatouille tous, plus ou moins…
C’est cette crise existentielle de la quarantaine, avec passage à l’acte, que Rodolphe et Van Linthout nous proposent d’explorer.
Profitant de l’attentat du 11 septembre, Norman, leur anti-héros, abandonne tout. Ultime lâcheté, il prend la fuite, larguant les amarres, son travail, son identité, sa famille, ses enfants, son confort… sa vie quoi !
Récit intimiste, Rodolphe nous fait vivre au quotidien cette vie de bohème démunie à la recherche d’un hypothétique bonheur. De la joie enfantine et futile d’être libre et sans aucune contrainte, jusqu’au désespoirs de la solitude extrême, Rodolphe ne nous épargne rien de l’errance de Norman. Car sa liberté a un prix. Ce n’est qu’un fantôme, qui ne peut s’arrêter et tisser des liens sans risquer d’être repéré. Sans parler des problèmes financiers. Vivre au jour le jour avec quelques maigres dollars n’est pas facile et use son homme.

Road-Movie

Road-movie pur et dur, fuite en avant désespérée et dramatique, ”L’homme qui n’existait plus” a des faux airs de Kerouac (sur la route). Avec sa mélancolie qui colle à la peau, ses musiques “Oldies” dans le creux de l’oreille, Rodolphe nous fait vivre le quotidien vrai et sensible de Norman.
Le plaisir d’une lecture, les rencontres malheureuses et celles qui ensoleillent un moment ,il raconte, heure après heure, jour après jour, la vie simple et rude d’un déraciné en quête de lui-même.

Vous avez dit “sociétal” ?

A travers Norman, c’est aussi un regard sur notre société que Rodolphe pose, sans en avoir l’air. Sans juger, il raconte aussi bien les salauds qui viennent tabasser Norman pour le plaisir, que l’homme désintéressé qui lui donne gîte, couverts et vêtements par charité. Portrait de notre société dans ses excès (positifs et négatifs) et notre solitude, c’est avec réalisme que Rodolphe nous amène à réfléchir sur nous même…

Le dessin

Roman graphique parfaitement maîtrisé, Van Linthout est au diapason de Rodolphe dans ce Road-movie désenchanté. Son dessin noir et blanc à l’aquarelle modèle avec subtilité et légèreté le récit. Tout en nuances, avec juste ce qu’il faut de noirs, Van Linthout a composé une ambiance triste et poisseuse qui ne me lâche plus.

Pour résumer

“L’homme qui n’existait plus” est un superbe et intense Road-movie, pleins d’émotions, de petits moments (de joie et de peine). Avec ce roman graphique sensible et un réaliste, Rodolphe et Van Linthout nous offrent le parcours vrai et poignant d’un homme sur la route, en quête de lui-même…