Je serais bien le dernier à me plaindre de travailler en
médiathèque. Non pas pour tous les avantages que les gens
s'imaginent en général. Je précise au passage, pour tenter de
briser un cliché largement répandu et qui revient le plus souvent,
que non, je ne passe pas mon temps à lire au boulot. En revanche,
j'ai l'opportunité de lire certains livres ou autres bandes
dessinées, ou bien de voir des films avant qu'ils ne soient mis à
disposition du public. Tout ça en direct de my home associated,
histoire d'être cohérent avec ce que je vous disais à l'instant.
Et parfois il arrive que je découvre des perles au hasard de mes
pérégrinations dans les locaux de réception, quand bien même la
curiosité naturelle n'aurait pas été activée. Une BD en tête de
rayonnage et l'affaire est jouée. C'est dire si l'équipe d'Ankama,
ou même Denis Lapière et Mathieu Reynès, qui avaient déjà eu
l'occasion de bosser ensemble sur l'incontournable Alter Ego, ont
fait du bien beau job en matière de couverture qui attire l'oeil,
avec cette teinte bleutée dans laquelle se baigne un grand visage
d'homme barbu, des bulles éparses autour de son visage, les yeux
grands ouverts avec une forme énigmatique se dessinant dans ses
iris.
Ce visage on va très vite apprendre à le connaître. Il s'agit de
celui de Bruno Daix, nageur pour l'A.U.E.M. Il est en congès depuis
peu mais son boss, Driss Bouira le sollicite pour une mission de la
plus haute importance dans le Pacifique Nord. Il s'agirait,
peut-être, de découvrir pourquoi depuis quelque temps, l'eau ne
gèle plus sur Terre. Nous sommes en 2157, la chaos est à portée de
mains.
A l'image de la couverture, le lecteur de la Peur géante se retrouve
très vite hypnotisé par l'histoire et les dessins qui la portent.
Hypnotisé et néanmoins porté par le courant d'une narration vive
et alerte. L'action se met très vite en place après la scène
d'introduction. Bruno Daix se retrouve en transit à l'aéroport
d'Oran quand l'inexplicable se produit. La fonte des glaces s'est
accentuée provoquant un gigantesque tsunami qui ravage toute la
surface de la Terre. Les planches qui décrivent la catastrophes se
révèlent totalement sidérantes, angoissantes.
J'ai lu La Peur Géante, le livre de Stefan Wul, il y a fort
longtemps, sans en garder un souvenir très prégnant. A la lecture
de la BD, je mesure combien je devais être trop jeune à l'époque
pour en apprécier toute la teneur. Le roman puise en effet sa force
dans des considérations écologiques dont je ne mesurais pas la
portée à l'époque. L'adaptation riche en événements et en
rebondissements parfaitement maîtrisés, appuyée d'une pertinence
et d'une cohérence coloristiques, a provoqué, je l'avoue, la
volonté de me replonger dans le roman pour avoir – à nouveau –
le fin mot de l'histoire... en attendant la suite de l'adaptation.
Mission accomplie en tout cas de la plus belle des manières pour
Denis Lapière, Mathieu Reynès, y compris pour ce qui est du dossier consacré à Stefan Wul en fin d'ouvrage. A sa lecture on aurait envie
cette fois-ci de lire toute l'œuvre de l'auteur et toutes celles que les éditions Ankama ont eu la bonne idée d'adapter. Quand les mots et
l'images se complètent de la sorte, c'est du tout bon.
La Peur géante. Tome 1, La Révolte des océans, de Denis Lapière, Mathieu Reynès, d'après le roman de Stefan Wul, Ankama, 2013, 48 p.