"Comment dire. Au début, quand tu te promènes dans Pipriat, la seule chose que tu vois, c'est la ville morte. La ville fantôme. Les immeubles vides, les herbes qui poussent dans les fissures du béton. Toutes ces rues abandonnées. Au début, c'est ça qui te prend les tripes. Mais avec le temps, ce qui finit par te sauter en premier à la figure, ce serait plutôt cette sorte de jus qui suinte de partout, comme quelque chose qui palpiterait encore. Quelque chose de bien vivant et c'est ça qui te colle la trouille. Ca, c'est une vraie poisse, un truc qui t'attrape partout. Et d'abord là-dedans.
De son pouce, il tapote plusieurs fois son crâne.
Je sais de quoi je parle."
Gouri débarque avec sa moto dans un village voisin de la zone sinistrée, près de Pipriat. Il retrouve là pour une soirée autour d'un repas arrosé ses camarades de catastrophe, ceux qui sont restés au plus près du lieu maudit. Il est revenu pour sa fille, qui est malade, récupérer l'ancienne porte de sa chambre. L'accès à l'immeuble qui était leur domicile est interdit, il faudra passer les barrages à la nuit tombée, se cacher, être un étranger, un voleur, dans ce lieu sinistré, encore plein des souvenirs d'une vie figée à jamais...
J'ai beaucoup aimé le style et l'atmosphère de ce petit livre d'Antoine Choplin dont l'action ne se déroule que le temps de quelques heures. J'y ai retrouvé quelques échos de ma lecture d'un Printemps à Tchernobyl [clic ici]. On y retrouve la même fascination mêlée de crainte pour "la zone", l'important se situant dans les blancs du texte, dans ce qui est gardé sous silence. L'économie de mots, d'effets, fait sens et apporte à ce roman beaucoup de force. Une belle découverte.
Editions Points - 5.70€ - Janvier 2014
Pour Aifelle, un des meilleurs romans de la rentrée 2012 ! [clic ici] D'autres avis... Cristie -Hélène -Kathel -Leiloona -Maryline -Noukette -Philisine Cave -Valérie