FIGAROVOX- A l'occasion du mariage annoncé de SFR avec Numericable, alors que le ministre du Redressement productif avait pris fait et cause pour Bouygues, Robin Rivaton prend la défense d'Arnaud Montebourg.
Alors que les questions se multiplient sur les conséquences d'une recomposition du secteur des télécommunications, les commentaires se concentrent sur la situation du consommateur ou l'emploi en oubliant la caractéristique première d'une industrie de réseau, la qualité des infrastructures.Du haut de ses 25 ans fêtés récemment, la technologie internet a montré qu'elle était une triple révolution. Révolution des télécommunications qui a permis l'émergence du courrier électronique, de la messagerie instantanée et de la voix sur IP (technique qui permet de communiquer par la voix via réseaux numériques). Révolution des données dont le volume a explosé grâce à l'augmentation des capacités de stockage et de calcul. Révolution de l'information en assurant les rapports directs entre producteurs et consommateurs et entre citoyens lorsqu'il n'y a pas d'échange marchand. En mars 2013, le cabinet McKinsey suggérait qu'Internet aurait créé un quart des emplois en France depuis 1995.Notre pays a pris du retard, ou plus précisément a perdu son avance. Alors que la France possédait le plus large réseau ADSL du monde avec 34 souscriptions pour 100 habitants, elle a loupé le tournant du très haut débitA l'heure où s'accumulent les mauvais augures sur la situation économique de notre pays, notre seule et réelle chance réside dans une capacité d'innovation renouvelée à travers l'entrepreneuriat. Alimenté par une jeunesse nombreuse et bien formée, ce mouvement est de grande ampleur. Preuve en est, la France se distingue par une des intentions entrepreneuriales les plus fortes des pays développés. Pour réaliser pleinement ce potentiel, des réseaux de communication les plus performants possibles sont indispensables.Pourtant, notre pays a pris du retard, ou plus précisément a perdu son avance. Alors que la France possédait le plus large réseau ADSL du monde avec 34 souscriptions pour 100 habitants, elle a loupé le tournant du très haut débit. Nous ne sommes que le 31e pays au niveau du raccordement très haut débit avec 3 abonnements pour 100 habitants. Causalité évidente, la dépense par habitant dans les réseaux de télécommunication y a été, sur la dernière décennie, 18% plus faible que dans les autres pays de l'OCDE.En février 2013, le gouvernement a présenté un plan pour raccorder tous les foyers français au très haut débit en dix ans. Ce plan produit ses premiers effets puisque plus de 10 millions de foyers sont désormais éligibles au très haut débit. La France achèvera son réseau avec 3 à 4 ans d'avance sur ses voisins allemands ou anglais mais avec une décennie de retard sur la Corée du Sud, le Japon ou les pays scandinaves.A peine avons-nous réagi que déjà se profile une nouvelle menace. C'est désormais dans le mobile que se joue la partie. Alors que nous ratiocinons sur le déploiement du réseau 4G en France, au CeBIT, le plus grand salon des nouvelles technologies, qui a lieu chaque année à Hanovre; les Allemands et les Anglais ont scellé une alliance pour déployer la 5G. La Grande-Bretagne y a déjà investi 15 millions d'euros et souhaite prendre le leadership du programme européen Metis 2020 qui tente d'en définir les standards. Hors d'Europe, la concurrence fait également rage. La Corée du Sud a annoncé investir 1,1 milliard d'euros dans cette technologie. La 5G est attendue pour 2020 avec des débits dix fois supérieurs à ceux de l'actuelle 4G. Cette technologie devra tout connecter, les humains mais aussi les machines mobiles entre elles. Elle sera le pilier indispensable à la technologie des objets connectés dans laquelle notre pays souhaite devenir leader.Le ministre Montebourg est parfaitement dans son rôle en soulignant l'endettement excessif qui résulterait d'une reprise de SFR par Numéricâble.Dans ces conditions, et alors que les finances publiques sont sous une contrainte de plus en plus forte - l'Etat ne mobilisera d'ailleurs que 3 milliards sur la vingtaine du plan très haut débit -, le rôle des opérateurs est capital. La France dépourvue des grands acteurs de services, comme Google, qui déploie lui-même la fibre aux Etats-Unis, ne peut compter que sur ses opérateurs. Ceux-ci ayant été mis sous forte pression ces dernières années avec la baisse des prix, leurs capacités financières doivent être précautionneusement étudiées. Aussi le ministre Montebourg est parfaitement dans son rôle en soulignant l'endettement excessif qui résulterait d'une reprise de SFR par Numericable.