Lundi matin, j’étais obligé de descendre en ville (à une dizaine de kilomètres de mon village) pour laisser ma voiture au contrôle technique. Plutôt que d’attendre une heure à côté de l’atelier qui n’est pas loin de mon ancien quartier de résidence lorsque j’habitais cette bourgade, j’ai marché le long d’une rue parallèle à la voie ferrée, un quartier qui s’effiloche en vieilles bâtisses et en parcelles de terrain plus ou moins en friche. Une des parcelles minuscules est recouverte d’arbustes à papillons aux branchages si denses qu’ils forment des voûtes sous lesquelles le vent accroche des sachets en plastique et toutes sortes de déchets d’emballages.
C’est dans des cartons assemblés en une tanière qu’on ne peut même pas appeler une cabane (ni une tanière puisque même une véritable tanière est plus confortable) qu’un homme est mort de froid il y a au moins une dizaine d’année.
Juste avant de rester là quelques instants, interdit, face à ce non lieu où une vie humaine s’est terminée dans une absolue désolation, je venais de passer devant les panneaux d’affichage des listes pour les élections municipales. Tous ces gens nous parlent d’emploi, d’aménagement, d’équipement, d’économie, de finance, de développement, de tourisme, de « vivre ensemble ». Tout cela est bien gentil mais j’attends la liste qui parlera du type mort de froid dans l’entrelacs de branchages des arbres à papillons.