Le cinéma est une matière paradoxale dans le système éducatif français. En effet, pour valoriser sa passion pour le cinéma au niveau du baccalauréat, un(e) jeune lycéen(ne) doit entreprendre une filière littéraire. Il pourra ainsi prendre l’option lourde, avec un horaire hebdomadaire conséquent pour l’enseignement du cinéma, qui se terminera par un gros coefficient lors de l’épreuve du bac. Pour un étudiant en filière scientifique, moins d’heures seront consacrées au cinéma, qui sera finalement une matière optionnelle, et ne rapportera des points que si l’épreuve est un succès. OR, pour un lycéen désirant faire des études techniques de cinéma, il est indispensable, pour les concours d’entrée et même pour l’apprentissage au sein des écoles, d’avoir un bon bagage scientifique. On doit alors parfois renoncer à un baccalauréat qui aurait permis de s’épanouir d’un point de vue cinéphile pour déjà penser au futur, et au concours d’admission que l’on vise.
Pour fabriquer des images comme du son, on doit avoir des connaissances scientifiques pour se donner les moyens de produire exactement ce que l’on veut. Il est vraiment regrettable que l’on bâtisse de telles cloisons: on ne peut pas être scientifique et cinéphile, et on a plus de mal à entrer dans une école de cinéma avec une formation littéraire...
L’Ecole Nationale Supérieure Louis Lumière, par exemple, est accessible après n’importe quelle type de licence (il suffit même de deux ans d’études supérieures). Mais concrètement, le concours d’entrée est tel qu’une culture cinématographique ET de très bonnes connaissances en matières scientifiques (mathématiques, optiques, physique…) sont nécessaires. Louis Lumière prépare aux métiers techniques : ingénieur du son (ou preneur de son), directeur de la photographie (ou opérateur) ou photographe. Elle demande donc une formation scientifique en amont du concours. Mais on ne peut espérer rentrer dans l’école sans une solide culture du cinéma, qui est souvent acquises en licence de cinéma, qui n’intègre aucune matière scientifique.
La FEMIS a quant à elle toujours été plus accessible aux étudiants (de moins de 27 ans) des filières littéraires et propose beaucoup plus de filières que Louis Lumière. On peut concourir pour l’admission en section générale, scripte, distribution/exploitation, séries TV (création de séries) ou internationale. La sélection est très rude mais elle ne demande pas une culture scientifique aussi poussée que pour le concours de Louis Lumière. La sélection se fait sur le dossier d’enquête personnel du candidat, une analyse de film, des épreuves pratiques et enfin un entretien devant sept professionnels, représentants les différentes options disponibles dans l’école. Autant dire que le parcours n’est pas aisé, mais accessible aux lycéens « littéraires ».
Beaucoup d’écoles privées existent en France, à Paris comme en province. Ainsi l’ESRA (Ecole Supérieure de Réalisation Audiovisuelle) possède un centre de formation à Paris, Nice et Rennes, avec une quatrième année optionnelle délocalisée à New York ! Le concours est constitué de deux entretiens (individuel et en groupe), d’une lettre de motivation et d’un QCM. Il est accessible dès l’obtention du baccalauréat, quelque soit la filière. La formation initiale est disponible pour les sections cinéma, son ou film d’animation. Mais la relative facilité d’accès a un coût : 7500 € par an, pendant 4 ans, soit un total de 30000 € !
L’école 3IS (Institut Internationale de l’Image et du Son) se situe à Paris mais aussi à Bègle, près de Bordeaux. Elle propose une formation de trois années pour un montant de 22800 €, avec concours d’entrée, accessible dès le baccalauréat. Elle forme, en section cinéma, aux métiers de scénariste, réalisateur, assistant réalisateur et scripte, chef opérateur son et de prises de vue ainsi que monteur. La formation est vaste et complète, mais à quel prix ! Là encore, tous les bacheliers peuvent postuler.
La formation aux métiers du cinéma est aussi proposée par le biais de BTS, en 2 ans, accessible après le bac dans des lycées publics (et privés, mais très couteux). Ils sont très reconnus dans le milieu et les places sont chères. On peut postuler pour une formation initiale ou en alternance, ce qui permet de mettre un pied dans le milieu tout en étant formé (les entreprises acceptant l’alternance dans l’audiovisuel sont néanmoins assez rares, il faut le savoir). On ne trouve pas forcément toutes les options du BTS Métiers de l’Audiovisuel (image, son, montage, gestion de production et postproduction) dans chaque établissement proposant la formation. Comme pour Louis Lumière, il est préférable d’avoir une formation scientifique pour tenter d’intégrer, sur dossier et entretien individuel, un BTS Métiers de l’Audiovisuel.
Pour intégrer une école de cinéma, mieux vaut donc savoir laquelle et l’option que l’on vise. Pour des options techniques (image, son, montage), mieux vaut avoir un baccalauréat scientifique : les connaissances nécessaires en sciences (mathématiques, sciences physiques) seront beaucoup plus difficiles à acquérir « sur le tas » que la culture cinéphile, qui peut se forger dans les cinémathèques, ou grâce à de bons livres et DVD.
Pauline R.